C’est à une visite tout à fait exceptionnelle que nous convions aujourd’hui les lecteurs de Milanese Special Selection. Il y a un mois en effet, j’ai eu le plaisir et l’honneur de découvrir en exclusivité l’atelier d’un des derniers grands noms de l’art tailleur napolitain (un style qui ne trompe pas et une fabrication sans reproches), Sartoria Partenopea, dont j’avais eu l’occasion en juin de détailler la collection Printemps/Eté 2015-2016.
Sartoria Partenopea : à la rencontre d’Angelo et Mauro Blasi
La première chose qui frappe en pénétrant dans le bâtiment de 5000 mètres carrés construit en 2004 sur les dessins de l’architecte Benedetto Gravagnuolo est la très grande rigueur qui y règne. L’endroit est propre, lumineux, pensé, rationnel, studieux, à mille lieues de ce que l’on pourrait imaginer d’un atelier de cette taille. Autre élément remarquable, non sans lien avec le précédent : l’heureux mélange de modernité et de tradition. Si la main de l’homme, ici, occupe une telle place, il n’est pas question pour autant de mépriser les innovations de la technique. Pas de dogmatisme, donc. Il en résulte, pour le client, un sentiment de sécurité bienvenu.
Angelo Blasi, le fondateur
Il est l’homme des grandes ambitions et le garant d’un certain purisme. Avant de se lancer dans l’aventure Sartoria Partenopea, il dirigeait pas moins de 350 tailleurs dans l’entreprise familiale – une lourde charge qu’il ne regrette pas. Au milieu des années 1990, après 27 ans de travail ininterrompu, cet héritier d’une longue lignée de tailleurs (la famille Blasi était déjà en activité à la fin du XIXe siècle) repart de zéro avec une équipe de 18 tailleurs (contre 70 aujourd’hui) et l’envie d’offrir le meilleur de la tradition napolitaine au meilleur prix. Rapidement viennent les premiers succès, au Japon tout d’abord, puis aux Etats-Unis, plus récemment en Russie. La rencontre avec Vittorio Genna et Fulvio Scannapieco, très actifs dans les domaines de l’aérospatial et de l’électronique à travers la société Ala (Advanced Logistic for Aerospace), apportera un second souffle au projet, tant sur le plan du financement que sur celui de l’organisation, en donnant naissance à la SGB (« Scannapieco Genna Blasi »), aujourd’hui titulaire de la marque Sartoria Partenopea. En 2011, Angela Blasi a été fait Maestro del lavoro suite à l’attribution par le Président de la République italienne de la Stella al merito del lavoro récompensant la compétence, le travail mais aussi la conduite morale.
Dans le bureau d’Angelo Blasi, non loin d’un sympathique clin d’œil (un hélicoptère en cachemire, cadeau de Loro Piana), un ballon siglé Albert Arts, témoin de la longue amitié qui lie le fondateur de Sartoria Partenopea et « le fils du tailleur » Albert Goldberg.
Mauro Blasi, à la conquête de nouveaux marchés
Directeur commercial de Sartoria Partenopea, Mauro Blasi, 34 ans, est également très investi dans la conception des collections et le suivi des modèles. Le tournant casual, le rajeunissement du style et la diversification vers un public plus jeune avide néanmoins de belles choses, c’est à lui qu’on le doit. Mû par une triple passion pour l’art tailleur, le football et la ville de Naples, il a très vite anticipé les nouveaux besoins de la clientèle. Son atout-maître : une solide culture du produit perfectionnée, dès la fin de ses études, chez Loro Piana et Ermenegildo Zegna.
Trois styles, Vintage, Dandy et Lounge composent les collections Sartoria Partenopea. Le premier fait une large place aux costumes teints et lavés (le fameux tinto in capo), le second s’adresse aux hommes qui aiment s’habiller pour le plaisir de s’habiller, le troisième est dédié aux grandes occasions (tapis rouges, premières d’opéra ou de théâtre, cérémonies, etc.).
Sartoria Partenopea : prêt-à-porter de haute qualité et sur mesure made in Napoli
De la réception des tissus à l’expédition des produits finis, toute l’organisation a été remise à plat. Ici, rien n’est laissé au hasard. Chaque pièce emprunte un chemin prédéfini. Pour conserver les costumes dans les meilleures conditions, un second circuit de climatisation a été installé, distinct de la climatisation principale.
Moins de 40 costumes sortent de l’atelier chaque jour, ce qui permet de maintenir un très haut niveau de qualité. Un costume prêt-à-porter, compte tenu de la part importante de travail manuel, requiert au minimum 16 heures de travail, un costume sur mesure 50 heures et plus. À noter que le service sur mesure représente aujourd’hui 35% du chiffre d’affaires de Sartoria Partenopea.
Certains tailleurs travaillent aux côtés du signor Blasi depuis 40 ans, mais, comme a tenu à me le préciser le maître des lieux, contrairement à d’autres ateliers, la moyenne d’âge, ici, est peu élevée. Les apprentis sont formés en interne et changent de poste régulièrement pour éviter les automatismes.
Le fatto a mano, toujours.
Présentée pour la première fois en 2013, la veste 300 grammes est à peine plus lourde qu’une chemise. Une prouesse technique impressionnante !
La caverne des 40 voleurs ne dut pas faire meilleure impression sur Ali Baba. Ici sont entreposés 30 000 mètres de tissus.
Pour les excentriques richissimes, ce tissu est composé de cachemire, de vigogne et… de platine. Prix indicatif d’un costume : 20 000 euros.
Autre lieu où il vaut mieux ne pas s’aventurer (on pourrait facilement être tenté) : le magasin où sont entreposées les commandes avant expédition.
Ce mystérieux R.T. a fait le bon choix. D’autant qu’il a aussi commandé cinq autres costumes…
Le repassage, une étape primordiale dans la réalisation d’un costume.
Miscellanées sartoriales
Merci à Angelo et Mauro Blasi pour leur hospitalité et leur patience.
N.B. Les personnes intéressées par la tenue d’un trunk show Sartoria Partenopea à Paris sont priées de me contacter à cette adresse : [email protected].