« Cette fille n'a rien de commun avec moi. De la vie, elle n'a vu que les arbres. Moi, j'ai vu leurs racines tordues enlacer les pierres et les cercueils. »
Dans le nord de l'Islande, en 1829, Agnes Magnúsdóttir est condamnée à mort pour l'assassinat de son amant, Natan Ketilsson. En attendant que la sentence soit exécutée, Agnes Magnúsdóttir est placée en résidence surveillée à Kornsá, dans la ferme de l'agent de sécurité du canton, Jon Jonsson, avec sa femme et leurs deux filles.
Une australienne qui écrit son premier roman sur la rugosité de l’Islande au XIXe siècle... j’étais curieuse. Bien m’en a pris. J’ai été happée, avec force, dans le récit de la vie d’Agnès Magnúsdóttir. J’ai tout aimé. L’écriture, sans fioriture, la narration, sensible et directe, l’histoire, fascinante et cruelle.
En contant Agnès, la bâtarde, la sorcière, la criminelle, Hannah Kent réussit à dépeindre un portrait sans complaisance et, surtout, sans manichéisme. Lorsqu’une femme est jugée par la justice des hommes, l’histoire est bien plus complexe que celles retenues par les mémoires, tel est le parti pris de l’auteure.
A la grâce des hommes est un premier roman brillant qui exacerbe les émotions et qui donne furieusement envie de remonter le temps. L'inéductable en marche. Beau et féroce.
Presses de la cité, 395 pages, 2014, traduit de l’anglais par Karine Reignier
Extrait
« Si j'étais jeune et simplette, croyez-vous que la police et les juges auraient pointé le doigt vers moi ? Non. Ils auraient accusé Fridrik. Ils auraient dit qu'il nous dominait, qu'il nous a forcées à tuer Natan pour mettre la main sur sa fortune. Toute la vallée savait que Fridrik rêvait de délester Natan d'une partie de ses biens. Mais quand la police m'a interrogée, quand ils ont compris que j'avais la tête sur les épaules, ça ne leur a pas plu. Femme qui pense n'est jamais tout à fait innocente, vous comprenez ? On ne peut pas lui faire confiance. Voilà la vérité, que ça vous plaise ou non, mon révérend ! »