A seulement 7 années-lumière, la quatrième étoile la plus proche de notre système solaire est une naine brune qui affiche des températures polaires et, vraisemblablement, des nuages d’eau. Les premiers jamais observé ailleurs que dans notre système solaire.
Relativement petit et sombre, l’astre désigné WISE J085510.83-071442.5 — ou W0855, version courte — débusqué dans l’infrarouge grâce aux télescopes spatiaux WISE (Wide-field Infrared Survey Telescope) et Spitzer par Kevin Luhman (université de Pennsylvanie) et son équipe, est la plus froide naine brune connue à ce jour. Distante de seulement 7,3 années-lumière de notre système solaire, cette étoile minuscule est la quatrième plus proche de nous, après le trio d’Alpha du Centaure (Alpha Centauri A, B et C ; cette dernière est plus connue sous le nom de Proxima du Centaure) à quelque 4,3 années-lumière, l’étoile de Barnard (une naine rouge à 6 années-lumière) et la double Luhman 16 (à environ 6,6 années-lumière), dont le nom rappelle qu’elle fut découverte par la même chercheuse.
D’une taille équivalente à celle de notre Jupiter pour une masse 10 fois supérieure, les caractéristiques physiques de WISE J0855-0714 évoquent aux astronomes une planète géante. En effet, considérées comme des étoiles ratées, les naines brunes sont en quelque sorte le chainon manquant entre les planètes les plus grosses et les naines rouges, une classe d’étoiles qui arborent une masse suffisante pour permettre la fusion thermonucléaire en leur cœur. Notre nouvelle voisine à laquelle se sont intéressé de près l’équipe de l’astrophysicienne Jacqueline Faherty (Carnegie Institution for Science, à Washington D.C.), apparait comme une petite solitaire, dépourvue de tout compagnon stellaire…
Dans leur étude publiée dans The Astrophysical Journal Letters menée au cours de trois belles nuits de mai 2014 avec le télescope Magellan Baade de 6,5 mètres, les chercheurs estiment avoir détecté la présence de nuages d’eau dans son atmosphère. En réalité, parmi les 151 images obtenues dans le proche infrarouge, le rayonnement de la naine brune rejoint celui émit par certains modèles de ces astres sombres créés en laboratoire. Pour Jonathan Fortney, chercheur à l’université de Californie et co-développeur de modèles atmosphériques, « c’est la première preuve de nuage d’eau » jamais observée en dehors de notre système solaire… Certes, des traces d’eau furent récemment relevées dans le spectre de plusieurs exoplanètes mais cette fois, il s’agirait de formations nuageuses comme on peut en voir sur Terre ou Mars. D’ailleurs, WISE J0855-0714, dont la température oscille entre – 48 ° C et – 13 ° C, apparait partiellement nuageuse (vraisemblablement environ la moitié de sa surface) au contraire, par exemple, de notre ardente voisine Vénus, totalement enrobée de nébulosités de dioxyde de soufre. Nos quatre planètes géantes et gazeuses dissimulent, quant à elles, toutes leur eau sous d’épais nuages de glace d’ammoniaque.
Pour confirmer la présence de ces nuages d’eau à la surface de la naine brune, les astronomes ont besoin de déchiffrer son spectre. Pour cela, seul le futur télescope spatial James Webb (le lancement du JWST est prévu pour 2018) sera en mesure de réaliser de cet astre obscur. Cette découverte est un pas de plus dans la compréhension et la caractérisation des atmosphères d’autres mondes.
Presque deux fois plus loin de notre système solaire que Proxima Centauri, WISE J0855-0714) est la naine brune la plus froide connue des astronomes. Illustration de cette étoile ratée, en partie couverte de nuage d’eau
Crédit photos : Nasa, JPL-Caltech, Penn Sate University, Rob Gizis, Cuny BMCC.