La critique de Claude :
La guerre de Norvège (d’avril à juin 1940) est peu connue des Français. Tout juste certains se souviennent-ils de l’héroïsme de nos Légionnaires et de nos Alpins autour de Narvik, d’autant plus que nombre de ces héros rapatriés en Angleterre ont, comme la 13ième Demi-Brigade de Légion étrangère, choisi la France Libre, et s’y sont illustrés.
Pourtant, cette guerre devrait être enseignée aux candidats à l’élite comme un exemple d’inconséquence des chefs (politiques et militaires).
Aux affaires, à Londres, le pauvre Chamberlain, politicien conservateur que l’âge a privé de ses moyens, et qui recherche en tout « l’apaisement ». A Paris, Paul Reynaud, nouveau venu qui sera paralysé par le système politique de la III ème République, où les majorités fondent en une nuit. A Berlin un loup qui veut une façade atlantique pour l’Allemagne et sa Marine, et entend assurer ses approvisionnements en minerai de fer .
C’est pour « couper la route du fer » (Paul Reynaud) que les Alliés pensent en décembre 39 à intervenir en Norvège ; les planificateurs militaires entreprennent des études, en les appuyant sur la force écrasante de la Royal Navy , mais sans penser aux moyens terrestres nécessaires, à leur armement, à leur équipement, à leur entrainement, à leur engins de débarquement, à leur appui par l’aviation .
Personne, pas plus d’ailleurs à Berlin qu’à Londres, ne connaît la Norvège, au point que les principaux responsables militaires allemands et alliés achèteront le guide Baedeker (l’équivalent de notre Michelin Vert) quand ils seront nommés. Le Royaume est pourtant un redoutable terrain : temps exécrable, fjords étroits, routes rares et verglacées, visibilités brouillées, distances immenses du Nord au Sud ( il y a plus de kilomètres entre Oslo et l’extrême Nord –Tromsö- qu’entre Oslo et Paris).
Le désastre humain sera à la hauteur de l’impréparation ; bien entendu, les Allemands attaquent les premiers, le 9 avril, et les Alliés répondent comme ils peuvent. Seuls les détachements débarqués à l’extrême Nord (Narvik) bousculent les Allemands, au prix de grands sacrifices.
Le désastre de mai-juin 1940 en France oblige les Alliés à abandonner Narvik si chèrement acquise ; il reviendra aux commandants militaires de prévenir « avec tact » le Roi et le Gouvernement de Norvège de l’effroyable nouvelle ; les Alliés rembarquent, laissant les courageux Norvégiens aux prises avec les Nazis – qui ont installé un Führer fantoche, Quisling – le Roi et le Gouvernement accepteront d’être évacués vers la Grande Bretagne, solution qui s’appliquera aussi à la Pologne et aux Pays Bas.
Ce récit passionnant, et qui n’exclut pas l’humour, suscite la colère : l’inconséquence du commandement britannique, et malheureusement des politiciens des deux démocraties alliées, est clairement responsable des sacrifices des marins britanniques, et des chasseurs français et norvégiens. Le tout a été oublié dans l’accumulation des malheurs de 1940-1945, puis de la Victoire.
Mais l’inconséquence actuelle des politiciens de toutes étiquettes sur les affaires économiques rappelle sinistrement la conduite de la guerre en Norvège et ailleurs.
« Churchill contre Hitler, Norvège 1940, la victoire fatale » par François Kersaudy aux Editions Taillandier, collection Texto, 367 p. 9,50 €.
N.D.L.R : Churchill ne deviendra le patron qu’en mai 1940, lors de l’attaque allemande sur le Continent , ce qui rend le titre « Churchill contre Hitler », sans doute choisi par l’éditeur, assez inapproprié.