"C'est une maison (...) adossée à la colline..." (air connu)
Mon été s’est transformé à la suite d'une décision un peu folle : alors que je devais partir pour un périple dans le sud de la France et plonger dans les eaux limpides de la Méditerranée, j’ai tout annulé pour aller dans les Vosges au vert, au calme, au frais, changement radical donc, pas très sexy m’a-t-on dit… Lieu où j’ai fini par faire ce que j’exécute au quotidien, à savoir prendre soin des dessins d’un artiste. Point positif : celui pour qui j’ai fait cela a peut-être appris que le scotch, la colle, le fixatif et les cartons acides sont à bannir parce que mauvais pour ses dessins. Bref, tout ça pour dire : des expos, je n’en ai pas vues, mais j’ai lu tous ses livres ou presque.
Frédéric Boilet, projet de couverture pour Tôkyô est mon jardin, en collaboration avec Benoît Peeters et Jirō Taniguchi (Casterman, 1997, rééd. 2003, rééd. Ego comme x 2011). Photo: C.R.L’expérience a été enrichissante : au niveau gustatif d’abord. L’homme, en effet, mitonne de bons petits plats qui éveillent les papilles, le soir par contre, ce qui n’est pas le mieux d’un point de vue diététique, mais bon, passons, ce sont ses habitudes. D’un point de vue humain ensuite : intéressant, l’homme surprend par moments mais il est un conteur passionné et passionnant qui vous entraîne dans les méandres de ses histoires. D’un point de vue culturel : j’ai lu, lu, lu et lu, ses livres à lui bien entendu mais pas uniquement. J’ai vu des films aussi, l’homme aime le cinéma, j’en ai vu un certain nombre dont certains manquaient à ma culture filmique (Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy, par exemple, The Thing de John Carpenter aussi même si je ne trouve pas que ce dernier me manquait…). J’ai aussi fait du jardinage (ce qui n’a pas été mon activité préférée, soyons clairs).
Frédéric Boilet, dessin préparatoire pour 36 15 Alexia, Les Humanoïdes Associés 1990, rééd. Ego comme X 2004. Photo: C.R.
Ce fut donc un été ou plutôt des vacances qui m’ont faite osciller entre divers extrêmes, je suis passée De Grandes espérances d’Alfonso Cuarón* à des moments studieux pendant lesquels je me suis rendue compte d’à quel point j’avais été pervertie par mon, voire, mes divers "métiers". En effet, pendant mon séjour :
. j’ai consulté des pochettes de dessins dans lesquelles j’ai fait une sélection sur le thème du désir, je me suis aussi énervée parce que même si les papiers n’avaient pas jauni, ils n’en demeuraient pas moins en phase de décrépitude programmée (le scotch, la colle, plier, le fixatif, la lumière, les variations de température, l’hygrométrie, soyons clairs, c’est le mal pour du papier) ;
. j’ai fait un premier rangement qui nécessitera d’être poursuivi (pour ce qui n’a pu l’être) et modifié (pour ce qui l’a été) par l’ajout de papier barrière entre les différents dessins afin que, par exemple les éléments de scotch ne collent pas à d’autres feuilles que celles sur lesquelles ils sont, hélas, déjà collés ;
. j’ai aussi écrit un article ou plutôt j’ai recommencé à zéro un article déjà écrit… Le premier n'était pas assez habité...
Bref, au lieu de glander… J’ai fait plein de choses, ce qu’on pourrait qualifier de fou mais je vais préférer dire : "déformation professionnelle", qu’en dites-vous ? Le tout sans être payée autrement qu’en nature : il va sans dire qu’il est ici question des bons petits plats du soir. Dans une société consumériste telle que la nôtre, est-ce étrange ?
Frédéric Boilet, dessin préparatoire pour Demi-tour, en collaboration avec Benoît Peeters et Emmanuel Guibert (Dupuis Aire libre 1997). Photo: C.R.
Pourquoi est-ce que je vous écris tout cela ? Peut-être parce qu’en cette rentrée, je manque d’inspiration… Mais c'est plutôt pour partager le fait que même si je n'ai pas été voir d'expo, que je n'ai rien fait de "fou", que j'ai un peu bossé, c'était intéressant. Cet été n'a pas été la fin de l'année mais c'est tout comme et les vacances que je m'étais programmées ressemblaient beaucoup trop à mon quotidien : aller là, puis là, prendre le train aux aurores pour ne pas arriver en retard au truc suivant, etc. bref, ça aurait sans doute été reposant et dépaysant mais ce n'est pas le choix que j'ai fait. Un regret cependant: je ne suis pas assez sortie, je n'ai pas assez pris l'air, ni le large... ce sera pour une prochaine fois!
Aujourd'hui, c'est la rentrée. Sur lifeproof, on passe à nouveau à deux publications par semaine, on essaiera peut-être trois plus tard, tout dépendra du temps que l'on a au vu de nos vies respectives.
Gravière de la Wantzenau, 31 août 2014, comme un air de fin d'été... Photo: C.R.
Pour que vous sachiez : Marine a quitté Rennes pour sa Marseille natale, Ophélie vadrouille un peu partout avant de s'installer définitivement quelque part, Caroline a quitté Strasbourg pour Mulhouse, Anaïs quitte Strasbourg pour Paris, Stéfania a décidé de quitter définitivement lifeproof, peut-être que Christelle trouvera le temps de revenir écrire (à voir), les deux Cyril sont toujours dans leurs villes respectives (Nantes et Berlin), l'un d'eux est devenu papa entre temps, Jean-Charles reste à Strasbourg ainsi que moi-même, lui fait une thèse donc on essaiera de l'en tirer l'une ou l'autre fois et moi je continuerai à avoir la bougeotte a priori... Et pour les guests qui sont intervenues cette année, peut-être reviendront-elles, elles sont les bienvenues quoi qu'il en soit. Tout ça pour dire : au plaisir de continuer à vous faire partager cet art contemporain (mais pas uniquement), que l'on aime et ce, quel que soit le lieu où l'on se trouve !
Cécile.
*De Grandes espérances, film d’Alfonso Cuarón dans lequel on entend Ethan Hawke / Finnegan "Finn" Bell dire « You know what this is? It's my heart, and it's broken. ».