1789. Au crépuscule de sa vie, Casanova décide de rédiger ses mémoires. Il y raconte les nombreuses conquêtes amoureuses accumulées depuis ses seize ans mais surtout il propose une critique sans concession de la société de son époque dont il s’estime être le « produit » le plus représentatif. Ces mémoires (douze volumes dans l'édition intégrale publiée par Plon au début des années 60 !) sont donc avant tout une plongée dans les intrigues, les coulisses et les vices de l’Europe du XVIIIème siècle.
On y découvre un Casanova individualiste forcené ne cherchant que son profit immédiat et la jouissance sans contrainte. Mielleux à souhait, déclarant le plus sérieusement du monde son amour enflammé à chacune de ses conquêtes (« j’ignorais ce qu’était le vrai amour, tu es la première femme à me révéler ce mystère ». Ben voyons…), le jeune homme profite de toutes les occasions se présentant à lui. Bellâtre, charmeur, il n’a rien contre les femmes mariées, bien au contraire (il faut dire qu’elles le lui rendent bien). Loin de toute modestie, il se peint en amant aussi attentionné qu’endurant. Duo, trio, nuits entières passées à copuler sans connaître la moindre faiblesse, le gaillard était, à l’entendre, un très, très bon coup. En même temps, ce sont ses mémoires, il a bien le droit de se donner le beau rôle, j’en ferai autant le jour où je m’attaquerai aux miennes. Le problème, c'est que les auteurs de cette adaptation en BD ne s’attardent que sur ses vantardises érotiques et masquent les aspects historiques les plus intéressants. Résultat, une succession répétitive de tableaux érotico-porno où les conquêtes s’enchaînent sans la moindre émotion. On sent en filigrane la décadence de la société de l’époque mais on reste en surface alors que cet aspect est sans aucun doute la partie la plus intéressante de l’œuvre originale. Dommage, vraiment dommage.
Et le dessin me direz-vous ? Bof, bof… Je ne connaissais Stephano Mazzotti que de nom et je trouve son trait bien trop figé pour émoustiller la rétine. Bon, ok, j’avoue, je ne le connais pas que de nom, j’ai déjà découvert ses talents en feuilletant par le plus grand des hasards (et à plusieurs reprises) les albums de la série Selen. Ça ne vous dit rien ? Laissez-moi vous rafraîchir la mémoire :
(au passage je vous conseille le très réussi « La baronne avale la fumée ». Tout est dans le titre.). Bref, revenons à nos moutons pour constater en toute honnêteté que cet album est une vraie déception. Récitatifs plombants, graphisme hyper réaliste bien trop froid pour provoquer le moindre début d’excitation et mise sous silence de la partie « documentaire » de l’œuvre, ça fait quand même beaucoup de points négatifs. Je ne sais pas quand sortira le second volume, mais ce sera sans moi.
Mémoires de Casanova T1 : Bellino de Stefano Mazzotti. Delcourt, 2013. 62 pages. 14,95 euros.
Une déception, certes, mais que j'ai une fois de plus le plaisir de partager avec Noukette.