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Charmes de l'opposition

Publié le 26 août 2014 par Malesherbes

Le 13 mars 1983, François Mitterrand souhaite une « autre politique » et amorce le « tournant de la rigueur ». Le 22 mars, Jean-Pierre Chevènement, ministre de la Recherche, démissionne  et déclare : « Un ministre, ça ferme sa gueule ; si ça veut l'ouvrir, ça démissionne ». Apparemment, Arnaud Montebourg n’a pas fait sienne cette règle de conduite. En fait, il a plutôt subi le même sort qu’un de ses lointains prédécesseurs peu après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing.

Le 9 juin 1974, au moment de la reprise des essais nucléaires à Mururoa, Jean-Jacques Servan-Schreiber, nommé ministre de la Recherche et de la Technologie le 27 mai 1974, déclare à France Inter : « Au nom de la France, des bombes vont exploser de nouveau dans le ciel du Pacifique et contaminer les habitants de la Polynésie française. C’est une chose contre laquelle je me suis élevé l’année dernière de toutes mes forces, lorsque j’étais à Tahiti avec le Bataillon de la Paix… » . À la demande de Jacques Chirac, premier ministre, le Président de la République exclut  immédiatement le contestataire.

Arnaud Montebourg avait peut-être pensé que François Hollande, répugnant à décider, ne réagirait pas à sa tentative de se placer comme un recours pour 2017. Il se serait heurté à la volonté de Manuel Valls, qui nourrit comme lui des ambitions présidentielles et ne supporte pas de voir un concurrent se préparer la position confortable de la Cassandre qui pourrait dire, le moment venu : « je vous l’avais bien dit ». Si le président a peut-être hésité à sacrifier un ministre plutôt populaire, Manuel Valls l’a vraisemblablement contraint à sévir en avançant la menace : «  c’est lui ou moi ».

Plutôt que de se limiter à l’éviction des deux coupables, il a sans doute été décidé de mettre en place un nouveau gouvernement, pour provoquer un choc dans l’opinion et éliminer les ministres dont on n’était pas satisfait pour s’assurer des collaborateurs plus dociles. Comme les ministres servent à quelque, il est évident qu’une phase de transition par ces temps de crise n’est guère de nature à renforcer leur efficacité.   De plus, le nouveau gouvernement disposera certainement d’un soutien plus limité que le précédent, ce qui lui rendra plus difficile de faire voter les lois.

Il est aussi fort possible que la perspective de ne plus disposer de majorité n’effraie pas François Hollande. L’Assemblée devant alors être dissoute, les élections législatives amèneraient très vraisemblablement une majorité de droite. Notre président continuerait à présider, laissant l’UMP et ses séides se coltiner la crise. Après avoir réussi à être élu en 2012 sur la détestation de Nicolas Sarkozy, il estimerait pouvoir tenter en 2017 de tirer parti de l’échec possible de l’actuelle opposition. Il serait peut-être temps de réviser la maxime de Boileau : «  La critique est aisée mais l’art est difficile ». Ne vaudrait-il pas mieux dire : « gouverner est délicat mais s’opposer est aisé. », comme le démontrent présentement avec éclat vainqueurs et vaincus de 2012 ?


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