De mode et de livres

Par Manouane @manouane

Je les avais remarqué depuis un certains temps, ces grands livres de design et de mode soigneusement placés dans une belle grande bibliothèque juste à la gauche de l’entrée de la boutique, mais je ne m’étais jamais arrêté pour les regarder de plus près. La raison était simple : il s’agissait d’une boutique aux vêtements tendance. Et chacun le sait, la mode en général et les vêtements en particulier font peur aux amateurs de livres. Ils ont toujours la crainte irrationnelle de se faire regarder bizarrement à cause de leur accoutrement.

Mais aujourd’hui, j’ai osé. Je suis entré et je les ai regardé. Heureusement, ils sont situés de telle manière qu’en faisant face à la bibliothèque, on tourne le dos au personnel et aux clients de la boutique. Ça aide.

Dès le premier coup d’œil, j’ai compris qu’ils n’avaient pas qu’une fonction décoratrice, loin s’en faut. Ils avaient visiblement été choisis avec une grande minutie. Les thèmes : design, art contemporain, architecture et danse contemporaine. Des grands livres au design soigné. En y regardant de plus près, j’ai eu l’impression qu’il s’agissait, dans la majorité des cas, de livres qui ne sont pas disponibles normalement au Québec. Comment? Les maisons d’édition m’étaient inconnues. Le livre de Marc Décimo m’a tout de suite interpellé. Son titre : La Bibliothèque de Marcel Duchamp, peut-être  (Les Presses du réel, 2002). Peut-être? J’adore. Je prends.

« Des livres dans une boutique de mode? » demandais-je à la femme derrière le comptoir à qui je tendais le livre. Elle m’expliqua que le propriétaire était un passionné de mode et de livres sur des sujets spécifiques, et qu’il voulait que les deux cohabitent dans sa boutique. Elle me confirma aussi qu’il importait ses livres d’Europe étant donné qu’il ne pouvait se les procurer ici. « Ce n’est sûrement pas ce qui rapporte le plus dans cette boutique » affirmais-je, avec un sourire en coin. Non, mais ça plaît au propriétaire. Et cette raison lui suffit.

Sur le chemin du retour, en pédalant sur mon Bixi, j’ai pensé à cette boutique et à son propriétaire. J’avais l’impression qu’il avait placé dans sa boutique une extension de sa bibliothèque personnelle, composée de livres dont il consentait à se départir. Des ouvrages qu’il avait lu, aimé et chéri, mais qu’il ne pouvait peut-être pas conserver chez lui par manque de place. Alors, presqu’à regret, il les plaçait sur les rayons de sa seconde bibliothèque, celle de sa boutique, en espérant qu’ils ne trouvent pas trop vite preneur, comme ça il pourrait continuer à les lire, à les feuilleter. Et même s’il n’y touchait pas, par manque de temps, au moins il n’avait qu’à tourner la tête pour les regarder, et peut-être que ça le rassurait.

Je me suis amusé à imaginer des boutiques qui consacreraient un pan de leurs murs à une bibliothèque. Quels livres y retrouverait-t-on?


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