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Inhotim: Helio Oiticica, l’art en relation

Publié le 25 août 2014 par Aicasc @aica_sc

INHOTIM : Helio Oiticica. L’Art en relation
Extrait des cahiers de vacances de Matlide Dos Santos

Le Centre d’Art Contemporaine d’Inhotim (CACI) fait la part belle aux artistes brésiliens, dont Helio Oiticica. A l’imbrication nature-art-architecture propre au Parc, Oiticica ajoute une quatrième dimension : l’humain, plutôt l’humain agissant. Car dès les années 60, ses œuvres annonçaient le passage de l’objet à la relation, de la réception visuelle à l’expérience multisensorielle. Ce qui aujourd’hui est le paradigme de l’art contemporain était à l’époque visionnaire et pionnier. Hors des centres culturels hégémoniques, Oiticica dans ses créations mais aussi dans ses écrits proposait les bases d’un art relationnel.
Le CACI présente une œuvre monumentale en plein air – Le pénétrable Magic Square n°5 – De luxe et la Galerie Cosmococa, où sont réunies cinq installations iconiques de la série Bloc-experiment : Cosmococa – programa in progress en duo avec le cinéaste brésilien Neville d’Almeida. Ni les Magic squares ni les Cosmococas n’avaient été exécutées par l’artiste de son vivant. Les œuvres étaient au stade de projets, déclinées en maquettes (magic squares) ou en instructions précises (cosmococas), qui ont permis la construction de la première version d’un Magic Square à Inhotim et de diverses versions des Cosmococas depuis 1992 (au Tate – Londres, au MOCA – NY, au Museum fur Moderne kunst – Francfort …).

Penetrable Magic Square n° 5 de luxe

Penetrable Magic Square n° 5 de luxe

Penetrable Magic Square n° 5 de luxe

Penetrable Magic Square n° 5 de luxe

Magic squares

Panneaux de 6 mètres de haut par 6 mètres de largeur en matières & couleurs diverses
Le pénétrable Magic square n ° 5 – De luxe (conception, NY, 1977 – inauguration, Inhotim,2010) est une des premières œuvres qu’on aperçoit dès l’arrivée dans le Parc. C’est aussi une des plus colorées et attrayantes. Dans la série Magic Square les expérimentations d’Helio sur l’objectivation de la peinture (la couleur devenue sculpture) fusionne avec ses expérimentations sur la participation du public. Ce sont des propositions d’aires ludiques/interactives pour l’espace public.

« …alors j’ai commencé à faire ce truc comme ça, des maquettes qui sont et peuvent être une place… d’ailleurs je les appelle ‘magic square’ car square veut dire à la fois carré et place. Qui puisse être quelque chose qui est là en permanence pour l’usage du public”. Helio Oiticica, 197 ? dans son Interview pour la Folha de Sao Paulo).

Pour Helio, il s’agissait d’un espace où le public peut/doit exister de manière inventive, une sorte d’« autothéâtre » à l’usage des participants. Le magic square n° 5 fait partie d’un ensemble de six constructions qui se positionnent doublement en tant que forme géométrique et lieu public pouvant à la fois, accueillir et générer un flux de personnes. En plein milieu d’une large clairière, juste devant le lac, l’oeuvre attire et se laisse approprier par tout un chacun.

Pavillon Cosmococa, photo extérieure

Pavillon Cosmococa, photo extérieure

Pavillon Cosmococa photo extérieure

Pavillon Cosmococa photo extérieure

pavillon cosmococa photo intérieure

Pavillon cosmococa photo intérieure

Cosmococas
Crées par Hélio Oiticica et Neville d’Almeida à New York en 1973, les Cosmococas sont des environnements sensoriels immersifs, constitués par la projection de diapositives sur les 6 murs d’un espace fermé (incluant donc le sol et le plafond), des bandes sonores, des propositions d’aménagement du lieu et divers éléments tactiles, ainsi qu’un protocole performatif que le participant peut suivre ou pas. Les artistes parlaient alors de quasi-cinéma, questionnant la relation du public avec l’image-spectacle. Oiticica et Neville vident les images de tout sens narratif et proposent une inversion des rôles : au cinéma l’image bouge et le spectateur reste passif ; dans le quasi-cinéma l’image est quasi arrêtée (c’est une projection non séquentielle de groupes de diapositives, projetées non pas linéairement, les unes derrière les autres, mais simultanément sur des murs distincts) alors que le public est ou peut être actif dans l’environnement (hamacs, piscine, ballons, sable, éléments en mousse).

Cosmococa

Cosmococa

2.Onobject - cosmococas 2, sol en mousse épaisse, rendant difficile le déplacement et objets en mousse , disséminés sur le sol : cônes, cylindres, cubes, triangles, sphères. Musique de Yoko Ono. Parfois on entend sonner un téléphone. Les lumières sont éteintes et des images sont projetées sur deux des parois de la salle : photos de yoko Ono, couvertures de magazines

2.Onobject – cosmococas 2, sol en mousse épaisse, rendant difficile le déplacement et objets en mousse , disséminés sur le sol : cônes, cylindres, cubes, triangles, sphères. Musique de Yoko Ono. Parfois on entend sonner un téléphone. Les lumières sont éteintes et des images sont projetées sur deux des parois de la salle : photos de Yoko Ono, couvertures de magazines

3. Cosmococa CC3 Maylerin

3. Cosmococa CC3 Maylerin

4. cosmococa CC4, Nocagions, rend hommage à John Cage e au “blanc sur blanc » suprématiste de de Malevitch. L’œuvre permet une expérience plus radicale avec l’immersion dans la piscine à l’intérieur de laquelle seulement on perçoit les lumières vertes et bleues qui l’entourent.

4. cosmococa CC4, Nocagions, rend hommage à John Cage e au “blanc sur blanc » suprématiste de de Malevitch. L’œuvre permet une expérience plus radicale avec l’immersion dans la piscine à l’intérieur de laquelle seulement on perçoit les lumières vertes et bleues qui l’entourent.

5.Cosmococa CC5 Hendrixwar/Cosmococa Programa-in-Progress Dimensions : au moins 5 M × 6 M × 6 M Matériel : hammacs colorés, diapositives 35mm, dispositif audio

5.Cosmococa CC5 Hendrixwar/Cosmococa Programa-in-Progress Dimensions : au moins 5 M × 6 M × 6 M Matériel : hammacs colorés, diapositives 35mm, dispositif audio

A Inhotim, 5 Cosmococas : Trashiscapes, Onobject, Maileryn, Nocagions et Hendrix-War sont installées dans le pavillon que les Architectes Associés de Belo Horizonte ont conçu spécialement pour les accueillir. Les images projetées -couvertures de magazines, de disques, de livres, présentant les visages d’icônes de la contreculture (Luis Buñuel, Yoko Ono, Marilyn Monroe, Jimi Hendrix) retouchées avec de la cocaïne. Le nom générique de la série évoque évidement la drogue et même si n’elle est utilisée que comme un pigment, elle entraine dans son sillage l’idéologie libertaire des années 60/70 contre les conventions bourgeoises, elle est donc transgression. Si transgression = plaisir, pénétrer les cosmococas est très transgressif : on se prélasse dans les hamacs d’Hendrix war, on nage dans Nocagions au son de John Cage, on a du mal à marcher sur de la mousse tellement épaisse et molle de l’Onobject que rapidement on se résout avec délice à rester couchés et si on se veut moins paresseux, on joue aux ballons à Maileryn. Aucune des cosmococas n’a été performée ou exhibée durant la vie d’Helio, cependant, il en ressort clairement de ses écrits que lui et Neville avaient imaginé distribuer les cosmococas comme une sorte de multiple cinéma portatif, un cinéma en boite. Les travaux pouvaient être installés dans différents lieux, piscine, jardin, appartement…

Biographie de l’artiste

Rio de Janeiro, 1937-1980. Helio a vécu en accéléré un condensé d’identités : boursier, dealeur, écrivain, inventeur, malade, migrant, penseur, peintre, performeur, plasticien, sculpteur, visionnaire, vulnérable, … Après des études de peinture et le dessin classiques auprès d’Ivan Serpa au Musée d’Art Moderne de Rio, Oiticica rejoint le Grupo Frente (1954-1956), puis de 1959 à 1961, le Grupo Neoconcreto aux côtés des deux Lygias, Clark et Pape. Cette première partie de sa production montre une grande influence d’artistes tels que Piet Mondrian , Paul Klee et Kazimir Malevitch. Il développe très tôt un ensemble de monochromes, les Metaesquemas, d’une radicalité conceptuelle absolue. Fou de couleur il va passer de la surface plane à sculpture (bilatéraux, série de reliefs suspendus), et de la couleur-sculpture à la couleur à toucher et sentir comme dans la série des Bolides (1963-1969 : boîtes et bouteilles contenant du pigment pur ou liquide, manipulables par le public, puis à la couleur en mouvement, comme les parangolés objets-vêtements à danser, combinant couleur, mouvements et rythme. Puis à la couleur-expérimentation, des séries Nucleus, Pénétrables, ou des environnements labyrinthiques comme Tropicalia, et jusqu’ aux très complexes environnements cosmococas. Il expose à Londres (Galerie Signes et au Whitechapel art Gallery) et New York (MoMA), à Paris (Biennale de Paris 67) Zurich, Edinburgh, Toquio (Bienanale 67), Montevideo, Buenos Aires, Rio et Sao Paulo (Biennales de 57, 59, 65, 94, 95,98). En 1971, il s’installe à New York grâce à une bourse du Guggenheim.

photos retouchées à la cocaïne

photos retouchées à la cocaïne

photos retouchées à la cocaïne

photos retouchées à la cocaïne

Rétrospectives :

1992, Salle du jeu de Paume et Witte de With center for contemporary art
2007, The body of colour, Tate Modern Gallery de Londres et le Museum of Fine Arts de Houston.
2012 – Helio Oiticica : Penetrables, Galerie Lelong, Londres
2013-The great labyrinth, Museum für Moderne Kunst, Frankfort,
2014- Helio Oiticica –Propositions, IMMA, Irlande


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