De Jalil Lespert avec Pierre Niney, Guillaume Gallienne, Charlotte le Bon, Laura Smet et Marie de Villepin
Synopsis : Paris, 1957. A tout juste 21 ans, Yves Saint Laurent est appelé à prendre en main les destinées de la prestigieuse maison de haute couture fondée par Christian Dior, récemment décédé. Lors de son premier défilé triomphal, il fait la connaissance de Pierre Bergé, rencontre qui va bouleverser sa vie. Amants et partenaires en affaires, les deux hommes s’associent trois ans plus tard pour créer la société Yves Saint Laurent. Malgré ses obsessions et ses démons intérieurs, Yves Saint Laurent s’apprête à révolutionner le monde de la mode avec son approche moderne et iconoclaste.
L'exigence de l'amour et l'amour de l'exigence
Présenter sur de la musique classique, sans autre ornement dialogué, les oeuvres d'art que sont les créations du roi de l'élégance et de l'irrévérence faite femme, leur conférant une dimension quasi mystique, est une des nombreuses bonnes idées qui viennent illuminer ce biopic.
Comme celle d'engager Pierre Niney pour le rôle titre et Guillaume Gallienne pour celui de Pierre Bergé. Mieux qu'une incarnation, les deux sociétaires de la Comédie Française livrent une "véritable réincarnation" des deux amants terribles de la mode, de la bouche même de Betty Catroux, une des muses qui a fait partie de l'imagerie Saint-laurent.
Adoubé par Pierre Bergé, porté par un Pierre Niney hanté par la frénésie créatrice et la personnalité torturée du "faiseur" de mode le plus emblématique de son époque, ce biopic sent le vécu tout en restant très cinématographique.
Evitant l'ecueil de la narration froide ou de l'imitation grotesque, Jalil Lespert a préféré chercher la vérité de l'homme, invitant Pierre Niney à s'immerger dans des images d'archives et dans l'art d'Yves Saint-Laurent (il a pris des cours de dessin).
Il y est tellement parvenu qu'il a réussi à restituer la voix frêle et parfois affectée du styliste, trouvant au passage la faille : une grande timidité doublée d'une profonde mélancolie mais un anticonformisme qui révolutionna la mode féminine et, par résonnance, libéra celles-ci, les guidant vers plus d'émancipation et d'audace.
Guillaume Gallienne n'est pas en reste dans ce biopic esthétique et langoureux, il compose un Pierre Bergé viril, fort comme un roc, capable de tout accepter par amour, même d'emprisonner celui qu'il aime pour le protéger de son instinct d'auto-destruction.
C'est ce que l'on retiendra aussi de ce film : au-delà de la simple reconstitution de la genèse de l'empire Saint-Laurent jusqu'à ses années sombres, c'est une poignante histoire d'amour qui est portée à l'écran, dans toute son ambivalence.
Mais quel amour n'est pas ambivalent?
Comme l'amour que porte Saint-Laurent pour ses créations qui finit par le ronger d'angoisse et lui prendre son énergie vitale.
Comme finalement ce long-métrage : à la fois beau, lyrique, émouvant mais à certains passages un peu "clichés" (un baiser sous les ponts de Paris, la lente déchéante au beau milieu des années 70, le dernier "salut" du maître), à l'esthétique classieuse parfois à l'excès.
En résumé : Une époustoufflante reconstitution du mythe Saint-Laurent, qui restitue la vérité de l'homme derrière toutes ces créations et celle de l'homme qui partagea sa vie jusqu'à son dernier souffle. Une ode au génie créatif, à la frénésie des artistes.
Chapeau bas à Pierre Niney et Guillaume Gallienne : simplement magistraux.
Note : 8/10
Yves Saint Laurent
Yves Saint Laurent Bande-annonce VF