" C'est ce soir-là que je t'ai perdu, papa, que nos faiblesses ont triomphé. Ce soir-là que mon adolescence orpheline a commencé"
Mandaté par les compagnies d'assurances pour évaluer dommages matériels et lésions corporelles, Antoine, le narrateur, a pris l'habitude singulière de traduire en espèces, tous les moments de la vie. Une vie dont il fait le bilan doux-amer, marquée d'un déficit d'amour parental, d'une famille implosée, de lâchetés répétées et d'une impossibilité à exprimer ses difficultés, à pleurer, tout simplement. La bête gronde en son inconscient qui pourrait prendre l'allure d'un fauve.Viré de son boulot, de son couple, Antoine sent sourdre une colère, un désespoir irrémédiables. Va-t-il commettre l'irréparable?
" Le mal qui infusait alors. Le fauve qui se réveillait.
On ne voyait que le bonheur"
Monologue entrecoupé d'apostrophes à son père, malade, à Léon, son fils, perdu, la narration se partage en trois volets, qui d'une plongée en solution violente, désespérée, oeuvre à la reconstruction, au sublime pardon.
Avec ce nouveau roman dense, maîtrisé, Grégoire Delacourt frappe où on ne l'attendait pas.
"Notre vie s'écrivait à coups de post -it indifférents sur la porte du réfrigérateur."
Et toujours ce sens de la formule qui frappe, fouette et fustige..
Apolline Elter
On ne voyait que le bonheur, Grégoire Delacourt, roman, Ed. JcLattès, 20 août 2014, 360 pp