Ce petit roman jeunesse est très original. Il pousse sa logique jusqu’au bout (et les doigts tombent comme des mouches). Très vite, le roi et ses partisans s’expriment sans utiliser la moindre lettre “e”. Il faut admirer la virtuosité de l’auteur pour n’en avoir pas laissé passer un seul et très vite, je me suis amusée à scruter les dialogues pour m’assurer que non-non, cette lettre, la plus utilisée de la langue française, en était tout simplement bannie. De plus, on ne cesse de demander au roi de faire preuve de clémence et de laisser à ses sujets un temps d’adaptation pour comprendre ce nouveau langage, ainsi que de leur fournir un dictionnaire. On voit alors se multiplier les conseils: comment remplacer ce mot par un qui n’aurait pas de “e”? Les détours pris par la langue sont parfois saugrenus et franchement amusants.
Mais l’histoire est bien évidemment en deux temps. On n’a plus le droit de dire “e”? La résistance est là et en prend le contrepied: elle n’utilisera plus que cette seule et unique voyelle. Et là encore, le jeu recommence: on décortique les phrases pour s’assurer que oui-oui, il n’y a bien que des “e” entre ces consonnes, et ça fonctionne! Jusque dans les prénoms des personnages, comme Hélène, on trouve cette contrainte stylistique qui avait fait sensation chez Pérec et qui devient ici franchement ludique.
La note de Mélu:
Plutôt réussi!
Un mot sur l’auteur: Gilles Barraqué (né en 1957) est un auteur jeunesse français