Em Habanim - Qui parmi tous les casablancais d'origine, n'ont pas connu ou ne serait ce qu'entendu parler de cette institution au service des plus démunis de Casablanca ?
Voilà une oeuvre juive qui forma de nombreux érudits en sciences juives, mais également qui fut à l'origine de la formation d'une des premières chorales du Maroc, mais aussi une des plus prestigieuses. Ce qui donna l'inspiration à de nombreux élèves de cet institution d'ouvrir,plusieurs années plus tard, avec ce prestigieux nom, de nombreux etablissements à travers le monde (Los Angeles, Paris, etc...)
Aujourd'hui Em Habanim est toujours au même endroit, même bâtisse, les salles de classe sont toutes là, certes elles sont fermées mais en levant la tête et en fermant les yeux, on arrive encore à imaginer et entendre, le nombre de jeunes garçons courant dans tous les sens et dévalant les escaliers après les cours.
La synagogue offre toujours des offices, tout le long de l'année et de la semaine.Tenu par le descendant des créateurs, celui qui porte le même nom de la famille, Mr David Bendayan.
Georges SEBAT
Lundi 10 Octobre 1949, dans les locaux de l’association des anciens élèves de l’Alliance Israélite à Casablanca, une cérémonie intime avait été organisée par les soins des dirigeants de l’œuvre Em-Habanim, à l’occasion de la distribution qui venait d’être faite d’effets d’habillements neufs à 400 enfants nécessiteux, âgés de 6 à 16 ans.
Asssistaient à cette cérémonie, M. Zagury, président du Comité de la communauté Israélite de Casablanca, M. Le Président du Tribunal Rabbinique, le Commandant Peyronnie, représentant M. Le Chef de Région, S.E le Khalifa du Pacha, M. Fink et Mme Bengio du JOINT, ainsi que MM. Mosès Bendayan et Albert Lévy, président et vice-président de Em-Habbanim.
Cette œuvre contribue pour une large part au sauvetage des enfants juifs nécessiteux qu’elle habille et nourrit et auxquels elle dispense un enseignement primaire, comportant principalement des cours d’hébreu et de français.
M. Albert Lévy, vice président, a prononcé à cette occasion un discours dont nous citons ci-dessous les principaux passages :
« Pour la deuxième fois au cours de cette année, comme les années précédentes d’ailleurs, nous procédons aujourd’hui à l’habillement des 400 enfants qui nous ont été confiés.
Vous les verrez tout à l’heure, tous de neuf vêtus des pieds à la tête, et je suis certain que vous éprouverez le même sentiment de joie et de satisfaction que nous éprouvons en voyant leurs visages épanouis du bonheur de ne pas sentir, malgré leur origine très pauvre, abandonnés et diminués par rapport aux autres enfants plus favorisés par le sort.
Tout comme les autres enfants issus de familles plus aisées, ceux d’Em-Habanim ont eu leur habillement complet pour la fête de Souccot ; et sans parler de l’avantage moral qu’ils en retirent par suite du relèvement de leur personnalité, cet acte a une portée charitable et sociale indiscutable à l’approche de l’hiver.
Sans ces vêtements, beaucoup parmi eux seraient obligés de déserter les cours, faute de ne pouvoir affronter les rigueurs de l’hiver.
A la veille de chacune de nos grandes fêtes, le même problème se pose au comité. Déficit budgétaire. Pas d’argent. Faut il habiller les enfants ou non ? Si oui, avec quels moyens ?Chaque fois, ce sont les mêmes questions, et chaque fois c’est la même réponse, téméraire, mais toute naturelle, comme le serait celle de toute bonne mère de famille : il faut les habiller, et il faut se débrouiller pour y arriver.
On se débat, on se démène et on y arrive. C’et pour cela que chaque fois nous nous faisons un devoir de célébrer ce succès, en même temps que de montrer à ceux qui nous accordent leur bienveillant appui que leur effort généreux et leur sollicitude n’ont pas été vains.
C’est tellement devenu une tradition pour nous d’habiller de neuf, nos enfants deux fois par an, que si jamais ce qu’à D’ ne plaise, les circonstances nous obligeaient à manquer de le faire une seule fois, il nous semblerait que ce serait l’écroulement de toute notre œuvre. Rappelons à cet égard que pendant la pénible période de restriction, nous avons pu remplir cette lourde mission grâce à la sympathie agissante que nous a toujours témoignée l’administration locale.
Cependant, je crois devoir rappeler que l’habillement n’est pas l’essentiel de notre œuvre. Em Habanim est surtout et avant tout une œuvre d’éducation et de protection des enfants malheureux. Elle les éduque, les instruit, les nourrit et les habille. Ses charges sont chaque jour plus lourdes et il tient vraiment du miracle qu’elle puisse encore faire face à la tâche qu’elle s’est imposée.
A ce propos, il m’est agréable d’exprimer ici un vibrant hommage et toute notre reconnaissance au Comité de la Communauté Israélite de Casablanca et à l’American Joint Distribution Committee pour l’intérêt qu’ils nous portent en nous accordant des subventions substantielles.
Notre reconnaissance va aussi à tous ceux qui donnent à notre Œuvre leur collaboration bénévole et dévouée. Ils sont assez nombreux et je leur demande de m’excuser et de ne pas m’en vouloir si je ne cite pas leurs noms. »
Noar - 16 Novembre 1949
1) Moise Bendayan (Fondateur Em Habanim) 2) David Bendayan 3) Itshak Kidochim 4) Haim Look (Grand Paytan) 5) Yossef Kidochim 6) frères Elmaleh 7) Haim Hazan 8) Schlomo Portal 9) Israel Suissa
NEE dans une période difficile, l'école Em Habanim a surmonté de nombreux obstacles grâce à la ténacité, au dévouement et à la générosité de ses membres fondateurs — MM. Moïse et David Bendayan — et si aujourd'hui elle montre une belle vitalité (la meilleure récompense certes pour ceux qui se sont consacrés à sa réalisation) elle devrait cependant pouvoir se développer encore afin de ne pas être contrainte de refuser des enfants à chaque rentrée scolaire.
Brossons à grands traits l'historique d'Em Habanim. Cette œuvre fut créé en 1942 dans une ruelle du Mellah. Elle recruta ses premiers élèves parmi des enfants nécessiteux, atteints pour la plupart de maladies (gale, teigne et trachome notamment) et qui traînaient leur oisiveté dans les rues, entraînés, à six et sept ans sur la pente des mauvais chemins !
On ouvrit une petite cantine pour y accueillir vingt de ces enfants. Ils furent deux cent cinquante en six mois. 11 fallut déménager et s'installer rue Lusitania. La vétusté, l'exigüité des anciens locaux exigeaient, en effet, que l'on pensât à l'avenir en faisant construire. Ceux qui n'ont pas eu l'occasion depuis 1942 de se rendre à Em Habanim n'en croiront pas leurs yeux : sur un terrain d'une superficie de 270 m2, se dresse un petit immeuble coquet de deux étages, à quelques pas d'une synagogue claire et accueillante.
A L'ETROIT
L'ensemble est plaisant mais quand quatre cents enfants s'engouffrent par les portes de l'école, turbulents et joyeux, on se rend compte qu'Em Habanim est littéralement construite sur... un -mouchoir de poche ! Ce qui frappe surtout c'est une cour minuscule où les enfants sont à l'étroit. Leurs récréations sont de ce fait compromises.
Les locaux administratifs « bureaux, économat, infirmerie, cuisine -- confirment cette impression. Lilliput aimerait bien pouvoir jouer un peu des coudes. Et il n'y a pas de réfectoire ! Le préau en fait fonction. Encore est-il nécessaire d'assurer deux services pour le petit déjeuner, le déjeuner et le goûter. C'est l'une des questions oui préoccupent actuellement les dévoués et actifs dirigeants d'Em Habanim qui ne voient pas sans un soupir d'envie le terrain mitoyen à leur école et qui serait une solution idéale à leurs problèmes.
Cela ne compromet pas cependant les proches projets d'Em Habanim : la création de deux nouvelles classes où l’on enseigne deux métiers qui sont bien dans la tradition du judaïsme marocain : l'horlogerie et la bijouterie.
«Une partie de nos élèves, nous a-t-on rappelé, à ce propos, sont dirigés vers les écoles professionnelles de l'ORT-Maroc, mais nos nouvelles classes nous permettraient de faire faire à nos élèves l'apprentissage de deux spécialités qui ne figurent pas au programme d'enseignement de l'ORT-Maroc ».
ENSEIGNEMENT : HEBREU, ARABE, FRANÇAIS
Nous avons alors demandé quel était le programme scolaire de l'Ecole Em Habanim dont-le directeur est M. Meyer Amar.
« Nous disposons de onze classes : dix, rue Lusitania, une rue Mouret ; le cycle d'études est de sept ans. Notre programme comprend l'enseignement de l'hébreu, depuis le cours préparatoire jusqu'à la deuxième année de « guémara » (la plupart des professeurs des écoles talmudiques du Maroc sont recrutés chez nous), l'enseignement de l'arabe, cours préparatoire et cours moyen, et l'enseignement du français : cours préparatoire jusqu'à l'examen d'entrée en sixième ».
— Quel est l'âge de vos élèves quand ils entrent à Emhabanim ?
— Six ans, minimum.
— Font-ils du sport ?
— Le Cercle de l'Alliance met très aimablement son terrain de sports à notre disposition, et la Division du Service de la Jeunesse et des Sports, ses moniteurs. Ce qui nous permet de prévoir des exercices physiques dans nos programmes.
— Quels sont vos effectifs ? — 400 en 1961. L'année dernière ils atteignaient 320. Douze instituteurs assurent l'enseignement. Au cours de notre visite à Em Habanim nous avons pu constater l'existence de douches modernes. Nous avons appris qu'elles furent construites en 1959. Il y en a 23. Nous avons pu visiter également l'infirmerie de l'école — petite main bien équipée — dont s'occupe le personnel qualifié de l'OSE. Que de progrès depuis 1942 ! « Mens sana in corpore sano » : un esprit sain dans un corps sain. Les enfants d'Em Habanim sont studieux, propres, conscients» dirait-on, des efforts importants que nécessitent leur instruction et leur éducation...
DES CONCOURS PRECIEUX Autour de M. Bendayan, deux comités, masculin et féminin, sont inlassablement sur la brèche, pour assurer l'équilibre d'un budget qui fut en déficit l'an dernier et cela malgré les concours précieux et réguliers du Joint, d'Ozar Hatorah, ainsi que de celui de la Communauté Israélite. On ne saurait passer sous silence l'aide appréciable que constituent les cotisations des fidèles habitués de la synagogue d'Emhabanim, dont M. Judah Chriqui est le sympathique et infatigable animateur des « hïllouloth ». Quant à la fête annuelle d'Emhabanim en l'honneur des communiants (« Bar Mitzva ») elle revêt un éclat qui illustre bien l'esprit d'une oeuvre admirable.
LE COMITE Président : M. Moïse Bendayan. Vice-président : M. Albert Lévy. Trésorier : M. Judah Chriqui. Trésorier-adjoint : M. Jacob Suissa Secrétaire : M. Joseph Amar. Secrétaire-adjoint : M. Samuel Derhy, et quatorze assesseurs.
LES COMMISSIONS Commission « cantine » : M. Rahamim Serfaty et M. Suissa. Commission d'enseignement : M° Amar et M. Judah Chriqui. Commission d'hygiène : Mme Chriqui, M. Rahamim Serfaty. Commission des sports : M. Rahamim Serfaty, M. Charles Bendayan. Commission des fêtes : MM. Derhy et Delmar.
La Voix des Communautés – Juin 1961