Un article du Monde, hier : "Bruxelles récuse une coprésidence française pour l'Union pour la Méditerranée".
On y donne des nouvelles de l'avancement des discussions sur ce projet destiné à remplacer le navrant processus de Lisbonne.
Bruxelles se distingue dans cette affaire, avec l'appui de l'Allemagne, par sa grande volonté de nuire et le souci prioritaire de positionner l'Europe avant toute question d'efficacité :
"Les propositions de la Commission, qui doivent faire l'objet d'une communication mardi 20 mai à Bruxelles, réaffirment la prééminence des institutions européennes sur la politique euroméditerranéenne - processus de Barcelone -, au sein de laquelle l'Union pour la Méditerranée a été intégrée."
Voilà l'Europe : un grand carcan servant à fliquer les pays membres.
"la Commission rappelle que la représentation extérieure de l'UE sera, dès l'entrée en vigueur le 1er janvier 2009 du traité de Lisbonne, du ressort du président du conseil européen, de celui de la Commission et du haut représentant pour les affaires étrangères. La France ne pourrait donc copiloter l'UPM que pendant sa présidence de l'UE, au second semestre 2008."
Il n'y a plus qu'à prier pour que l'Irlande rejette le TCE et que la France retrouve, peut-être, le droit de mener une politique étrangère.
Naturellement, dès qu'il s'agit d'Union européenne, les questions se posent tout de suite en termes de mécanos onstitutionnels, avec un secrétariat de l'Union plus un Comité permanent. Pour ce qui est de l'efficacité,par exemple financière, voilà l'avis de la commission : "Le fait de savoir si les fonds communautaires peuvent être impliqués est une question qui ne peut trouver réponse à ce stade."
Excellente manière de renvoyer les bronzés à leur bled, d'où ils ne devraient pas avoir l'outrecuidance de sortir pour venir importuner l'Europe blanche de Frontex.
Quelques commentaires de lecteurs du Monde :
Certains ont tout compris :
"A l'intérieur de l'Europe notre président n'a de pouvoir que si il convaint ses partenaires de suivre ses idées. Sinon il se prend ce genre de coup de pied au cul diplomatique. Pas de financement, 20 personnes au plus, contrôlée depuis Bruxelles, l'Union pour la Méditerranée est dès son lancement une coquille vide."
ou encore :
"Premiere erreur: integrer le nouveau processus au processus de Barcelone qui a pleinement montre son inefficacite. autant dire que l'UPM est quasi mort-ne! Deuxieme erreur: on laisse beaucoup trop de pouvoir a la Commission qui sape des le depart toute initiative qui peut nuire a son influence, influence tres egocentrique et technocratique. pauvre UE!"
Les indispensables chiens de garde sont cependant présents :
"Il n'est pas indispensable d'être un grand pays pour servir utilement le bien commun européen. Les hommes d'Etat du Benelux (Spaak, Rey, Tindemans, Thorn, Mansholt...) ont travaillé modestement et efficacement. Peut-être justement parce qu'ils ne tentaient pas de mettre surtout l'Europe au service de leur pays et de leurs ambitions nationales. Bâtir l'Europe est un travail d'équipe."
Ce dernier n'a pas compris qu'il ne s'agit pas là d'Europe, mais de développement en Méditerranée
Mais la forme de raisonnement qu'il emploie est assez caractéristique : sur toute question, il convient de savoir qu'est-ce qui fait "avancer l'Europe".
Voilà l'ultima ratio des soutiens de l'Europe : par dessus la démocratie, par dessus les projets de coopération internationale, l'Europe, par dessus tout.
Méfiance.
Sur Frontex :
lire un excellent billet, signé Jean Ziegler, repris sur un blog trouvé par hasard, dont j'extrais ce court passage :
"Pour défendre l’Europe contre ces migrants, l’Union européenne a mis sur pied une organisation militaire semi-clandestine qui porte le nom de Frontex. Cette agence gère les « frontières extérieures de l’Europe ». Elle dispose de navires rapides (et armés) d’interception en haute mer, d’hélicoptères de combat, d’une flotte d’avions de surveillance munis de caméras ultrasensibles et de vision nocturne, de radars, de satellites et de moyens sophistiqués de surveillance électronique à longue distance. Frontex maintient aussi sur sol africain des « camps d’accueil » où sont parqués les réfugiés de la faim, qui viennent d’Afrique centrale, orientale ou australe, du Tchad, de la République démocratique du Congo, du Burundi, du Cameroun, de l’Erythrée, du Malawi, du Zimbabwe… Souvent, ils cheminent à travers le continent durant un ou deux ans, vivant d’expédients, traversant les frontières et tentant de s’approcher progressivement d’une côte. Ils sont alors interceptés par les agents de Frontex ou leurs auxiliaires locaux qui les empêchent d’atteindre les ports de la Méditerranée ou de l’Atlantique. Vu les versements considérables en espèces opérés par Frontex aux dirigeants africains, peu d’entre eux refusent l’installation de ces camps. L’Algérie sauve l’honneur. Le président Abdelaziz Bouteflika dit : « Nous refusons ces camps. Nous ne serons pas les geôliers de nos frères.[...] Revenons à Frontex. L’hypocrisie des commissaires de Bruxelles est détestable : d’une part, ils organisent la famine en Afrique ; de l’autre, ils criminalisent les réfugiés de la faim."
Un jour certains auront des remords d'avoir soutenu l'Union européenne envers et contre toute humanité.