Le 8 août, un communiqué officiel allemand rédigé par le Generalquartiermeister von Stein sur la foi des renseignements qui lui sont parvenus a annoncé prématurément la nouvelle qu'attendait toute l'Allemagne : la chute de la forteresse de Liège. Cette première victoire, il l'a fait claironner aux quatre coins du pays. Elle est annonciatrice d'une avancée victorieuse à travers la Belgique, vers la France. Mais Liège n'est pas tombé et, deux jours plus tard, il faut donner un semblant de réalité à l'information erronée.
Le 15 août, un « brave petit soldat » français écrit à sa mère et à sa sœur. Parti (on ne sait d'où) le mercredi 12, il est arrivé à Gironcourt, près de Toul dans les Vosges, après un voyage de vingt-trois heures. Il a apprécié les grogs très chauds offerts par de charmantes jeunes filles à Montbard, près de Dijon. Nous ne saurons pas s'il a préféré les boissons à celles qui la servaient, ou l'inverse. Son enthousiasme, quoi qu'il en soit, n'a pas encore eu l'occasion d'être ébranlé.
Antime, dans le roman de Jean Echenoz, 14, a moins d'allant. Il s'inquiète pour l'usine, moins cependant que Charles, qui en est le sous-directeur et qui est parti à la guerre en pensant que c'était une affaire de quinze jours. De Vendée, ils ont été transportés en train vers les Ardennes, sans très bien savoir où ils étaient arrivés. Au début, cela ne s'était pas trop mal passé, malgré la fatigue du voyage.
Jean Echenoz, 14. Minuit, 2012