RGO, ces trois petites lettres qui nous en ont tant fait baver, craquer, pleurer, espérer, regretter à l’époque ou Liloute était un tout petit bébé… Je vous en avais déjà parlé ici, ici et là, ces quelques mois de douleur pour elle et d’impuissance pour nous ont été très durs à vivre. Tellement que je n’espérais qu’une chose pour sa soeur : qu’elle n’en souffre pas, qu’elle passe à travers.
C’est raté.
Déjà, à la maternité, et ce même pendant l’allaitement, Miniloute a commencé à montrer quelques signes qui m’ont rappelé trop de (mauvais) souvenirs et qui m’ont vite alertée. Des pleurs après la tétée/le biberon, une difficulté à faire ses rots, des régurgitations à 2 voire 3 heures du dernier biberon… Ajoutons à cela qu’elle a commencé à tirer la langue très souvent, mâcher un chewing gum imaginaire, se raidir en hurlant de plus en plus souvent, inconsolable, en projetant sa tête en arrière, le corps cambré. Ses pleurs sont devenus des cris aigus, même en passant au lait hypoallergénique (conçu pour réduire les risques d’allergie et non pour les enfants allergiques, nuance) Notre première soirée à la maison a été marquée par des heures de cris de douleur, même en écharpe, et il a suffi d’un regard entre monsieur et moi pour se comprendre : nous avions un bébé RGO, à nouveau.
Seulement c’était beaucoup plus intense et beaucoup plus précoce que pour miss S. Là où notre ainée avait montré des signes progressifs à 2 voire 3 semaines de vie, sa petite soeur a tout de suite souffert. Si on s’était toujours dit qu’on saurait quoi faire, qu’on le gérerait mieux, on a d’abord eu un gros coup au moral : malgré les 3 ans qui nous séparaient de la dernière fois, c’était encore bien frais dans nos mémoires… Les journées de hurlement, les soirées interminables à marcher dans l’appartement avec bébé hurlant dans l’écharpe, les frissons à chaque début de crise, les tâtonnements, changements de lait et traitements en tous genres, les innombrables visites chez la pédiatre et à la pharmacie, les heures passées à googler ces trois petites lettres de l’horreur pour trouver des conseils, des témoignages, tout ce qui pourrait aider et donner un espoir de guérison rapide…
Sauf que c’était un fait, et on le savait : le reflux gastro oesphagien de bébé, c’est une suite de hauts, de bas, de moyens, de bas, de hauts… Jusqu’à la guérison, qu’on nous promet à l’âge de la marche. Autant dire que quand ton bébé RGO a 2 mois tu as envie de te tirer une balle, ou d’hiberner jusque là !
Une fois la première (et mauvaise) impression passée, on s’est dit que plus tôt on agissait, mieux c’était. Cette fois ci, on connaissait l’ennemi : on ne nous baladerait plus de coliques en pleurs du soir, on nous écouterait vu les antécédents familiaux !
Tout a commencé par un coup de fil à la pédiatre qui a suivi (et guéri) Liloute… En congés, elle ne peut pas nous recevoir, mais nous demande de passer au lait de riz AR (qu’on connaissait en version simple, petite nouveauté dans le monde des régurgitations acides du nourrisson !), et nous dit qu’on se verra dès son retour pour appliquer le même protocole que pour sa soeur.
« On ne va pas perdre de temps cette fois, on ne la laissera pas souffrir »
Espoir.
Et puis, après une nuit très courte, beaucoup de hurlements de douleur, et le constat que non, on ne pouvait pas attendre, nous nous sommes rendus chez notre généraliste, avec l’espoir qu’on nous écouterait.
En congés. DAMNED ! Vive le mois d’Août… Tant pis, on repartira bredouilles, bébé hurleur en écharpe et mes nerfs qui commencent à lâcher.
On choisit à contre coeur de passer par les urgences. Miniloute pleure tellement qu’elle ne s’alimente plus comme avant, saute des biberons, est toute faible… Après avoir confié Liloute à sa mamie, on passe par cette salle d’attente qu’on n’a que très peu connu pour la grande (et qui deviendra notre résidence secondaire pour la seconde, bref). On nous reçoit vite: les bébés de moins de 3 mois ont la priorité. Après une rapide auscultation, on nous affirme que bébé va bien, qu’un nourrisson ça pleure et que c’est bien normal. Le traitement ? « beaucoup de câlins »
Désespoir…
Ce soir là, Miniloute hurlera 5 heures non stop et finira aphone, avec du mal à respirer. Retour aux urgences pour monsieur qui partira seul sous l’orage avec le cosy… Et me tiendra informée par texto (autant dire que je n’ai pas dormi de la nuit, que j’ai beaucoup pleuré aussi…)
On le prend un peu plus au sérieux. Il faut faire une prise de sang pour l’allergie, vu que sa soeur l’a eu, c’est fort probable que ce soit la même chose. On a un lait épaissi sans PLV, c’est très bien. Mais Miniloute a perdu du poids, ne boit plus correctement, cela inquiète l’interne qui nous fixe un rendez vous le surlendemain. Pas de traitement, il faudra voir si cela tourne à l’oesophagite ou non.
« Revenez si c’est pire »
Mais je n’ai pas envie d’attendre que ce soit pire. On nous dit que les pleurs sont surement dus à la chaleur dans l’appartement. On passera donc plusieurs nuits toutes portes et fenêtres ouvertes, ventilateur à fond, mais rien ne change. Mon bébé RGO souffre, j’angoisse, je culpabilise de ne plus l’allaiter (mais avec un reflux de cette ampleur, on me l’a pourtant affirmé pour Liloute, cela n’aurait rien changé au sein…Sauf que je culpabilise quand même !), je voudrais souffrir à sa place, j’imagine les mois de galère, je vois Liloute reléguée au second plan qui demande si sa soeur est malade, je pleure, je m’énerve, savoir ce qu’a son enfant et ne rien pouvoir faire… Se heurter à l’incompréhension du côté médical, avoir l’impression de trop en demander, de s’inquiéter « pour rien », quelle frustration !
Dimanche matin, une semaine après la naissance de miss N. et 3 jours depuis le retour à la maison, le rendez-vous aux urgences ne me dit rien qui vaille… Encore un déplacement inutile, une dépense pour la sécu qui ne donnera rien de concluant. Et pourtant.
Le médecin qui nous reçoit nous écoute, posément. Observe bébé et constate une petite reprise de poids. Mais légère. Hoche la tête plusieurs fois quand je lui récite la liste des symptômes. Je retiens ma respiration, persuadée qu’elle va nous dire que c’est normal, de rentrer nous reposer avec bébé.
« C’est vraiment le tableau classique du RGO. Votre bébé souffre, il faut faire quelque chose, de toute évidence vous avez testé toutes les mesures à prendre et rien ne change. C’est sans doute allergique et les signes sont assez impressionnants pour un bébé de cet âge. »
C’est là, marqué sur son carnet de santé : RGO. Début d’oesophagite. A 7 jours… Si petite et déjà si malade ! J’ai envie de pleurer, entre le soulagement et la triste confirmation que mon bébé souffre bel et bien…
Elle nous explique qu’il faut donner un traitement. Un traitement unique si possible, mais un traitement quand même, dosé en fonction de son poids. Qu’on commence avec un petit dosage, mais qu’il faudra sans doute le doubler si cela ne fonctionne pas. Qu’elle sait qu’elle est petite et que ça peut nous faire peur, mais que si il y a oesophagite, c’est l’hospitalisation qui nous attend.
Je suis soulagée. C’est horrible, moi qui suis contre les médicaments (quand ils ne sont pas forcément nécessaires), je suis soulagée de pouvoir donner un anti acide à mon tout petit bébé de 7 jours ! Ce même anti acide qui a amélioré considérablement l’état de Liloute il y a quelques années, qui représentait l’espoir pour nous, mais aussi le dernier recours.
Un lait sans PLV épaissi, des pansements gastriques et un anti acide… Beaucoup de médicaments pour un si petit enfant…
On nous a demandé de revenir pour un contrôle il y a quelques jours. Cette fois ci, on nous a redit que c’était normal à cet âge, et on nous a demandé d’arrêter de venir aux urgences. Miniloute a dépassé son poids de naissance, c’est le principal. Aucune augmentation des doses à prévoir, même si les douleurs persistent. De toute façon il faut du temps pour que tout se stabilise.
Une pédiatre passe quand même nous voir pour nous dire de tenter un épaississant naturel dans le lait. Le même que celui qu’on prenait pour miss S. Décidément… Nous avons commencé hier à mettre de l’amidon de maïs dans du lait AR (je n’y aurais jamais pensé!) et on tatonne encore au niveau des doses. On les a augmentées par deux fois, et pour l’instant ça a l’air d’améliorer le problème des remontées. Miniloute dort en ce moment hors de nos bras, boit mieux, ne grimace plus pendant le biberon, on est dans une période « avec » mais on connaitra encore des jours « sans »… A devoir augmenter les doses de traitement en parrallèle de la prise de poids, des poussées dentaires…
Le RGO, cette petite maladie faite de poussées, de rémissions, cette petite bête sournoise et usante… On y est, à nouveau, pas le choix, il faudra bien faire avec ! Et comme on ne fait rien à moitié, on a à nouveau écopé de la peine maximale, ou presque : le reflux résistant aux mesures hygiéno-diététiques, le RGO important qui nécessite un traitement lourd et un lait hyper épaissi… Avec menace d’oesophagite cette fois.
Alors certes, on l’a déjà vécu, on l’a pris très très tôt, et on a eu la chance d’être entendus rapidement.
Certes, Miniloute ira surement mieux bientôt, d’ici quelques semaines ou mois, mais cela reste terriblement long. Trop long. Voir souffrir son enfant, aller mieux, puis rechuter, tout en sachant à quel point elle doit avoir mal et qu’on est déjà sur la solution « extrême » niveau traitement…
Heureusement, on reste soudés, on profite des moments de « mieux »… En attendant le moment où tout sera derrière nous !