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La gueule de bois de Michel Sapin

Publié le 15 août 2014 par Juan

La gueule de bois de Michel SapinLa veille du 15 août, un peu plus de six mois après les grandes annonces du socialisme de l'offre de François Hollande, l'un des plus proches fidèles du président livrait un terrifiant constat d'échec dans les colonnes d'un grand quotidien du soir. La France dirigée par Hollande ne tiendra pas ses engagements de réduction des déficits.

Le ministre des finances a-t-il réellement pris conscience qu'il fallait changer de politique ?

Non.


"Cette année, la croissance du PIB devrait être de l'ordre de 0,5 %, et rien ne nous permet, à l'heure actuelle, de prévoir, pour 2015, une croissance très supérieure à 1 %."

C'est dit.
1. A la différence de ses prédécesseurs, Michel Sapin ose le constat. C'est déjà cela. Nicolas Sarkozy et son premier collaborateur Fillon, comme tous les autres perroquets de la Sarkofrance de l'époque, étaient dans le déni de la plus évidente des réalités - l'échec de leurs réponse à la crise.
"Mieux vaut assumer ce qui est, plutôt que d'espérer ce qui ne sera pas."
2. Le ministre accuse d'abord le reste du monde. Il plaide l'innocence. "C'est pas de not'faute, m'sieur !!". En effet, le voici qu'il entame son propos: "La vérité donc, c'est que, contrairement à toutes les prévisions du Fonds monétaire international (FMI), de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou de la Commission européenne, la croissance est en panne, en France comme en Europe."
3. Ce serait d'abord la faute à l'Europe qui est en panne. Et surtout l'Allemagne. En septembre 2012, François Hollande avait négocié un pacte de relance d'une centaine de milliards d'euros, sans parvenir à faire amender le TSCG.
"La vérité c'est que, conséquence directe d'une croissance en berne et d'une inflation insuffisante, la France n'atteindra pas cette année son objectif en terme de déficit de ses finances publiques, malgré la totale maîtrise de nos dépenses."
4. Michel Sapin confirme l'essentiel: le Pacte de Responsabilité n'est pas remis en cause: 37,5 milliards d'euros d'exonérations de charges sociales (puisque 2,5 milliards de réduction de charges salariales ont été censurées par le Conseil Constitutionnel). Son aveuglement est sans appel: "la volonté c'est, en France, de mettre en œuvre avec détermination le pacte de responsabilité et de solidarité décidé et voté par le Parlement, pour redonner aux entreprises françaises les marges qu'elles ont brutalement perdues entre 2007 et 2012." Essayons de comprendre le raisonnement: la France est en récession, faute d'une consommation intérieure et extérieure suffisante. Du coup, les entreprises baissent leur prix, mais cela ne suffit pas. Le cercle vicieux de la déflation menace, il est connu: la baisse des prix entretient l'attentisme des consommateurs, et entraine de nouvelles baisses des prix. Les entreprises désinvestissent et/ou licencient. Etc, etc.  Mais le gouvernement n'en a cure. Sapin fait comme si les entreprises françaises souffraient d'un simple manque de compétitivité qui feraient que croissance de l'économie ne bénéficieraient qu'à leurs concurrents étrangers sur fond de reprise générale.
"Quarante milliards d'euros seront ainsi, en quatre ans, redonnés aux entreprises, pour leur permettre de retrouver une bonne part de leur compétitivité dramatiquement amoindrie en dix ans, une capacité d'investissement et d'innovation, une force suffisante pour faire reculer durablement le chômage."
5. Pire encore, Michel Sapin confirme mes 50 milliards d'euros d'économies. On l'a compris, cest dernières ne serviront pas à réduire les agios de la dette qui enrichissent nos nombreux créanciers, mais à financer les réductions de charges sociales pour les entreprises. En 2015, promet à nouveau Sapin, "21 milliards seront mis en œuvre".
6. Pour sortir de la crise, Sapin n'ose même pas reprendre à son compte un argument en vigueur à sa gauche depuis des lustres: que la BCE prête directement aux Etats, plutôt qu'aux banques privées. Il se limite à quelques incantations, profitant de la récession qui frappe même l'Allemagne. Il faudrait " une politique monétaire adaptée à la situation exceptionnelle de faible croissance et de faible inflation que la zone euro toute entière connaît" et "promouvoir une politique en faveur de l'investissement privé et public par la mobilisation des outils existants et par la mise en œuvre de moyens nouveaux."
En résumé, Michel Sapin invoque "la décision politique" pour sortir de l'impasse, et pourtant il ne décide rien.
Sortez les mouchoirs.


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