Dans la Jungle, il se passe parfois de drôles de choses. Heureusement, Gilles la Jungle et sa chérie Jane traînent dans le coin. Comme par exemple lorsque Méchant-Man décide de venir mettre le bazar, avec son uniforme de criminel international, en semant des cadavres derrière lui, y compris certains cadavres pas morts. Ou lorsqu’un certain vampire s’amuse à capturer les gens dans la jungle. Avec son assurance à toute épreuve, sa bravoure et sa ruse, Gilles règle son compte aux mauvais, sauve les gentils. Le tout avec un humour pas toujours très élevé, une narration loufoque, des ennemis parfois bien stupides et une voix off qui multiplie les jeux de mots. Vous l’aurez compris, Gilles la Jungle, c’est surtout complètement déjanté.
Honnêtement, quand j’ai ouvert cette bande-dessinée, je me suis dit “C’est quoi ce truc?” Le graphisme dépouillé, gribouillé, monochrome, m’a fait penser aux strips que l’on trouve dans certains journaux et a demandé à mes petits yeux un temps d’adaptation tant je n’étais pas toujours sure de reconnaître les personnages. Il a fallu vraiment que je me mette dedans pour comprendre qu’on m’invitait vraiment à une lecture sans prise de tête, une sorte de parodie tant de Tarzan que de la BD elle-même.
Commençons par la parodie du personnage lui-même, puisqu’on reconnaît très bien la référence, ne serait-ce que par le prénom de sa compagne. Mais là, on assume complètement le décalage, avec un prénom bien occidental, un surnom que les indigènes lui donnent et une incongruité totale du personnage dont on se demande franchement ce qu’il fiche dans la jungle au su de tous puisqu’il vient volontiers combattre tous les criminels qui s’y réfugient.
Mais le plus drôle reste le texte. Les dialogues sont d’un ridicule hilarant: “Ils n’accepteront jamais de se faire attaquer”, “Je vais te rendre défunt” ou “je crois que j’ai attrapé l’angoisse”, quand les personnages ne se contentent pas d’énoncer des vérités évidentes, telle Jane cherchant une issue de sa prison constatant : “C’est bien ce que pensais: c’est un mur” ou “J’ai l’impression que nous sommes ligotés”. Il y en a à chaque vignette, chacune sur un mode plus ras-des-pâquerette que le précédent, mon préféré restant les interventions du narrateur, tantôt pleine de bon sens: “En moins de deux cases, il rejoint le sergent” ou “le roi de la jungle somnole sans s’en rendre compte”, tantôt répétant soigneusement ce que les personnages vienne juste de dire, mot pour mot. Une manière comme une autre de parodier la BD elle-même.
La note de Mélu:
Pas sûr que ça passe auprès de tout le monde, et je n’en raffolerai pas, mais l’objet mérite le détour! Merci à Babelio et aux éditions La Pastèque.
Un mot sur l’auteur: Claude Coutier est un réalisateur et auteur de BD québécois.