Un "philosophe" contemporain qui n'aurait pas traversé de bout en bout l'anti-philosophie de Lacan n'est tout simplement pas un "philosophe" à jour.
Slavoj Žižek, qui est est le philosophe post-lacanien par excellence, s'appuie sur une définition psychanalytique précise de la perversion: celle du "déni de la dimension subjective à proprement parler", pour opposer:
• aux philosophies qu'il qualifie de "perverses" car elles font l'apologie
de l'individu compris comme un être naturel, corporel, vivant, allant de
soi, incarné dans un "monde" conçu comme le lieu "naturel" de son
inscription, un "monde social" dans lequel il entretient des rapports avec
les autres…
• la philosophie authentique, celle de l'hystérique, celle inaugurée par Socrate, dont la caractéristique principale est de partir d'emblée d'un sujet travaillé intérieurement par son manque-à-être, un sujet divisé par la question de savoir:
1/ qui il est pour le désir de l'Autre et
2/ ce que l'Autre voudrait de lui ;
un sujet véritablement sujet donc, ne pouvant se concevoir a priori que dans le retrait, une radicale extériorité par rapport à la "réalité objective".
Ainsi, l’homme, l’être, l’individu, la personne, le da-sein, le sujet… ce
sont des mots qui chacun définissent un certain horizon de sens.
Et de non-sens.
• Dans la tradition philosophique pré-lacanienne, ce qui s’appelle
sujet (cf L’herméneutique du sujet de Foucault) n’est pas en soi sexualisé,
la "sexualisation" c’est quelque chose qui se passe au niveau empirique, contingent, pour cette pensée, il y aurait ainsi d’abord un sujet, et ensuite interviendrait sa sexualisation…
• Dans la théorie psychanalytique, c’est l’inverse, c’est la sexuation (la coupure) qui est la condition formelle a priori de la constitution d’un sujet, raison (entre autres) pour laquelle le sujet de l’inconscient, le sujet de la psychanalyse, est un sujet divisé, un sujet clivé, un sujet barré, inconsistant, qui se note $.
Tout le contraire d'un individu.
Le sujet de l'inconscient, qui n'est autre que le sujet du Cogito, n'a strictement aucun rapport avec les statistiques.
Et donc rien â voir non plus avec les fantaisies pseudo-égalitaristes abstraites de la Gender Theory.