LE QUOTIDIEN & VOUS > Images "Panini" : symbole obligé de jeunesse

Publié le 08 août 2014 par Fab @fabrice_gil

Equipe de France durant la Coupe du monde de Football 1982 I AFP

Objet de toutes les convoitises dans les cours de "récré" du monde entier, l’image Panini est le symbole d’un passage obligé dans la jeunesse de millions d’enfants. Depuis 50 ans, plusieurs générations ont collectionné sans relâche leurs joueurs de football préférés. Alors que la révolution numérique aurait pu balayer ces autocollants d’un autre temps, elle pourrait bien avoir renforcé la légende éternelle de l’entreprise italienne.
L’effet Mondial 2014 au Brésil n’y est pas étranger. Voilà maintenant plusieurs mois que l’on peut lire ici ou là différents articles de presse concernant les célèbres images Panini. Deux bribes d'articles choisis illustre cet emballement : fin avril à Rio, "un camion transportant 68.000 paquets -soit 300 000 vignettes- avait été braqué lors d’une livraison. Une perte d’environ €36.000 allait ravir de nombreux fans et alimenter le marché noir". Lorsqu’il ne s’agit pas de fans, ce sont les joueurs en personne qui parlent des images Panini, à l’image de Joël Campbell : "Fier d’avoir acheté 500 vignettes, le défenseur du Costa Rica n’a pas eu la chance de trouver son image en ouvrant ses paquets". Une déception qui a fait le tour du monde.
Une histoire incroyableCe sont deux frères italiens, Giuseppe et Benito Panini, qui ont eu l’idée en 1961 de vendre des images où figuraient les joueurs de football de l’époque. S’ils n’ont pas inventé le concept de l’image à collectionner -on pouvait déjà en trouver en cadeau dans des produits alimentaires-, ils sont en revanche les premiers à les commercialiser sur un marché indépendant ; Marché qui ne gravitera qu’autour de ces images. Dans un contexte de forte consommation et d’émergence du football européen, aidés par la retransmission télévisée en plein développement, le succès est absolu.Dans les années 1970, Panini décide de rendre ses images autocollantes. Une révolution  qui rendra la marque incontournable. Convoitée par de nombreuses entreprises, Panini va connaître au fil des années de nombreux mouvements financiers et d’investissements (l’entreprise Marvel notamment) et partenaires (Coca-Cola, Umbro…) soucieux de profiter d’une communication de masse qui séduit toujours les plus jeunes. "Les albums Panini ciblent d’abord les 7-12 ans, mais également ceux de 25 ans car c’est un bon moment qui peut rappeler son enfance" déclare Alain Guerrini, PDG de Panini France depuis 1979.
"Panini contribue à créer une socialisation chez les enfants"En prenant l’exemple du dernier album concernant la Coupe du Monde au Brésil, ce dernier compte 640 stickers à collectionner. Si le coût de l’album reste dérisoire (€3,50), les autocollants sont eux nettement moins abordables pour le budget des enfants. Comptez ainsi €9,60 pour 90 stickers. Dans l’idéal où chaque paquet disposerait des autocollants manquant pour compléter sa collection, il faut au minimum débourser €70. Dans la réalité, le jeu des doublons peut facilement quadrupler le prix initial, sans pour autant avoir la certitude de trouver les cartes « rares » qui semble tirée en édition limitée. Malgré la croyance populaire, Panini assure que chaque image est tirée en nombre égal ; Le jeu de la répartition aléatoire faisant le reste. Fort de ce constat, les enfants ont justement compris que pour parvenir à compléter leurs albums, il leur fallait trouver une solution alternative à l’achat, sans quoi les étrennes de Noël ne suffisent pas. C’est alors que la cour de récré se transforme en un véritable marché parallèle organisé. Ici pas de place pour l’argent, on troque. Chaque image a sa propre valeur en fonction de sa rareté, et chaque enjeu devient plus important au fur et à mesure du nombre d’images manquantes pour compléter son album. Avec ce jeu d’échanges, Panini contribue à créer l’une des premières phases de socialisation chez les jeunes. Ils apprennent ainsi à valoriser les biens dont ils disposent, ceux qu’ils souhaitent acquérir, annoncer leur disponibilité et entrer en contact avec d’autres enfants pour entamer des négociations souvent très intenses. Parfois, les choses vont trop loin, comme en Belgique où une école a décidé d’interdire les autocollants à cause d’écoliers un peu trop gourmands et qui réclamaient parfois jusqu’à €10 par vignette. Finalement, cela nous ramène à certains profils bien connus du monde "adulte", comme le chef d’entreprise inspiré, l’entremetteur intéressé ou le consommateur lambda. Plus qu’un moteur de divertissement, Paniniest devenu l’un des piliers de la socialisation pour de nombreux enfants.
Contrefaçons ?Avec un tel engouement, les images Panini suscitent énormément de convoitise. À l’image du braqueur de Rio ou du marché de la cour de récréation évoqué précédemment, l’intérêt financier est considérable pour la maison italienne. Quand on imagine le coût de fabrication très minime des autocollants, on se dit que l’affaire est particulièrement juteuse. D’autant que selon le site officiel du groupe, ce sont 6 milliards d’images qui seraient produites et vendues chaque année dans le monde, toutes collections confondues. En France, sur la période entre 1982 et 1997, ce sont plus d’1,5 milliard de pochettes d’images autocollantes qui ont été vendues, soit environ 9 milliards d’images. Toujours très discret sur ses chiffres, le groupe Panini a tout de même évoqué son chiffre d’affaires acquis en 2012 : €637 millions. Un profit n’a pas laissé insensible de nombreux faussaires. Avec une technologie d’impression accessible et l’émergence du numérique, il est devenu très facile de trouver la photo d’un joueur, de la maquiller en "image Panini" grâce à des logiciels et de l’imprimer en autocollant. Pour lutter contre cette pratique, Panini a mis en place un système d’hologrammes pour permettre de différencier les authentiques de leurs copies. Protégée comme les billets de banque, l’image Panini prend aussi une valeur inestimable en fonction de sa rareté, de son ancienneté et de son état de conservation. De nombreuses réunions d’échanges entre fans se font régulièrement, et il existe même des côtes officieuses qui attribuent aux images et aux albums des prix pouvant dépasser le millier d’euros, notamment pour les premières éditions. Alors pour savoir si vous avez un trésor dans votre grenier, rendez-vous sur les forums de spécialistes qui sauront vous conseiller… et vous faire retomber en enfance.FG