En 1996, année de sortie en France de Tesis, premier long métrage du réalisateur hispano-chilien Alejandro Amenábar (à qui l’on doit les deux chefs d'oeuvres que sont Mar adentro, Les autres), j'avais beau squatter quasi quotidiennement les salles de cinéma, je n'étais pas allé voir ce film, déjà parce qu'il était distribué très confidentiellement ( 8 salles seulement sur Paris), malgré un fort succès en Espagne (carton au box-office espagnol et attribution de ,5 Goya, dont celui du Meilleur Film) et aussi parce que facilement impressionnable, je m'étais dit que le film serait trp difficile à supporter sur grand écran.
Le film étant devenu culte plusieurs années après à l'aune des futurs succès du cinéaste espagnol, ainsi que de la vague du cinéma de genre sur la péninsule ibérique qu'il a incontestablement inité, j'avais très envie de rattraper ma lacune, et sa sortie, depuis le 25 juin dernier, dans un magnifique Blu-Ray proposé par Carlotta était donc l'occasion idéale de voir ce film presque 20 ans après sa sortie.
Prenant comme point d'ancrage l'univers des snuff movie, un phénomène dont on commencait à beaucoup parler à cette époque là ( et que le cinéma américain, de Johnny Depp avec le raté The Brave à Joel Schumacher avec le pas terrible non plus 8 mm, exploitera quelques années plus tard), Alejandro Amenábar crée un thriller vraiment envoutant, avec pourtant un budget restreint, et parvient à installer tout du long un climat assez poisseux, voire malsain, qui imprègnera le film usqu'au bout de ses deux heures.
Tesis suit le parcours d’une étudiante réalisant une thèse sur la violence audiovisuelle. Dans cette optique, Angela (Ana Torrent) se rapproche d’un jeune homme aux goûts cinématographiques déviants, Chema (Fele Martinez), avec lequel elle découvre un snuff movie où l’on voit une ancienne étudiante, portée disparue depuis deux ans, massacrée par un homme cagoulé. Ainsi débute une dangereuse enquête où Angela se verra douter des intentions de tout un chacun, de Chema à un ami de Vanessa, Bosco (Eduardo Noriega futur comédiens fétiches du cinéaste espagnol, ici à ses tous débuts également), jusqu’à certains de ses professeurs.
Mais en plus d'être ce thriller angoissant et au suspens parfaitement tenu, Tesis réussit également à être une réflexion fort pertinente sur le voyeurisme et la violence dans les médias en interrogant, et c'est le propre des grands films, notre attirance naturelle, voire notre fascination pour les images violentes, à la télévision et au cinéma.
Si le film parait parfois un peu daté ( entre les VHS que mettent continuellement les protagonistes et le grain de l'image, la thèmatique soulevée par le jeune prodige espagnol de 23 ans à l'époque est plus que jamais d'actualité, l'actrice principale Ana Torrent ( la jeune fille de Cria Cuervos, 20 ans après) y est magnifique et très convaincante, et surtout rarement on n'a parlé du rapport entre l’humain et l’image et de la fascination que l’on peut éprouver envers la violence de manière aussi intelligente et distrayante ( le film est avant tout un thriller sous haute tension avec notamment une exceptionnelle scène où nos deux héros sont contraints de progresser dans un dédale à l’aide d’allumettes) en même temps.
Bref, si on sait que l’image et le son ont été tous deux restaurés pour proposer le film dans sa meilleure version possible et qu'entre plusieurs bonus d'inégale qualité, nous avons une passionnante interview de 40 minutes d' Amenabar sur le film qui nous explique tout, et même plus sur la génèse du film, cette édition de Tesis est assez incontournable pour tous les fans du cinéma de genre, et même sans doute les autres!! Et sachez que même si j'ai 20 ans de plus qu'à l'époque de sa sortie ( eh oui) et que j'ai vu le film sur petit écran, j'ai presque autant sursauté que si je l'avais vu au cinoche en 1996!!
Tesis ( bande annonce VO ) par guiderapide
Nouveau master restauré HD supervisé par Alejandro Amenábar
Introduction d'Alejandro Amenábar
"La mort à portée de main : Alejandro Amenábar à propos de Tesis" (40')
Making of (22')
4 scènes coupées (7')
Bande-annonce