Robert Goddard – Par un matin d’automne (1988, 2010)

Publié le 26 décembre 2013 par Ellettres @Ellettres

Par un matin d’automne dans les années 80, une mère septuagénaire et sa fille arrivent de Londres pour se rendre au cimetière militaire franco-anglais de Thiepval en Picardie. La plus âgée cherche un nom parmi les 73 367 morts de la Grande guerre commémorés ici. L’ayant trouvé, Leonora narre pour la première fois à sa fille l’histoire de sa jeunesse. Une jeunesse définitivement pas comme les autres : ni père, ni mère. Mais encore pire : des parents dont on ne lui parle jamais. Une grande maison aristocratique, Meongate. Un grand’père distant, Lord Powerstock. Une grand’mère haineuse qui n’est pas la sienne, Olivia, deuxième Lady Powerstock. Une enfance malheureuse, et des mystères, plein de mystères. Pourquoi Leonora est-elle née dix mois et demi après la mort de son père au champ d’honneur ? Pourquoi ne lui parle-t-on jamais de ses parents ? Pourquoi Olivia la hait-elle et lui inculque l’idée de son illégitimité ? Qui était cet homme qui fut assassiné à Meongate peu avant sa naissance et qui l’a assassiné ? Quel est le sens de ces deux tableaux malsains peints par le premier mari d’Olivia ? L’horizon est bouché et la petite fille s’est débattue contre les ombres de son passé, en vain.

Jusqu’au jour où…

Cottage – Keith Hornblower

J’en ai déjà trop dit. Voilà un roman envoûtant, qui court sur toute l’étendue fatale et tragique du dernier siècle. Un drame se noue lors de la Première Guerre mondiale. De nombreux protagonistes liés à la famille Powerstock y sont mêlés. Les retombées du drame s’enchaînent comme les pièces d’un domino, avec des conséquences parfois inattendues. Au fil du temps et de la vie de Leonora, fille du malheur mais aussi témoin de la revanche de la vie sur la mort, des témoins du passé réapparaissent au moment où elle s’y attend le moins. A partir de là, des récits s’enchâssent et chacun éclaire une partie du mystère, répondant en partie aux autres. Leonora n’est pas en reste, et à certains moments décisifs, mène l’enquête et provoque le retour du passé.

Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’on est fabuleusement mystifiés, et les différents narrateurs prenant la parole peuvent garder leur part d’ombre… qui, ne vous inquiétez pas, se dissipe presque en entier à la fin du roman. Presque…

La reconstitution des différentes périodes historiques est frappante d’authenticité, sans trop en faire, ce qui conserve le naturel de l’histoire. Un climat légèrement inquiétant pèse sur toute la longue et sinueuse histoire. La construction du récit est virtuose, à une ou deux petites invraisemblances près dues à certains tours de force narratifs. Un ou deux personnages manquent un peu de relief, par rapport à d’autres qui prennent une place démesurée… mais c’est sans doute ainsi que l’on doit comprendre l’ethos (ou le non-ethos) de chacun.

La dernière page retournée, la puissance évocatrice de l’histoire d’une famille pas comme les autres sur le temps long du siècle, est restée un moment marquée dans mon esprit, au point que j’ai eu du mal à m’endormir le soir !