Mon avis :
Au milieu du mois de décembre 1904, sous la conduite du général NOGI Maresuke, la troisième armée de terre japonaise se livrait à des attaques répétées contre la forteresse de Port Arthur, afin de réduire à néant l’armée russe. Le conflit était alors suivi par toutes les grandes puissances de ce monde et en particulier les États-Unis et l’Europe entière qui avaient à l’époque des accointances soit avec le Japon, soit avec la Russie et le tsar Nicolas II. Quel que soit le résultat de ce conflit, les conséquences en seraient mondiales. C’est pour cette raison qu’il fut décidé d’envoyer à Portsmouth, une ville située dans l’État du New Hampshire au nord-est des États-Unis, les deux meilleurs négociateurs de l’époque, à savoir KOMURA Jutaro pour le Japon, et le Comte Sergueï Ioulievitch Witte pour la Russie. Très rapidement, les deux hommes ont commencé à s’apprécier, à se connaître et surtout à tout mettre en œuvre pour trouver une solution satisfaisante à ce conflit qui avait déjà fait énormément de morts et pour que les deux pays s’en sortent sans perdre la face.
Toutes ces négociations se feront sous la houlette du président américain Théodore Roosevelt. Mais les deux diplomates, tout en appréciant et respectant le président, se rendirent vite compte que leurs autorités respectives, Nicolas II pour la Russie et l’empereur Mutsuhito pour le Japon, étaient loin de ne s’en remettre qu’à lui et étaient prêts à tout pour obtenir ce qu’ils voulaient ou pour ne pas perdre ce qu’ils pensaient leur appartenir, par exemple, l’île de Sakhaline.
Il n’est pas toujours aisé de faire la différence entre un livre d’histoire et un roman historique. Mais dans ce cas-ci, il faut simplement comprendre que YOSHIMURA, tout en se basant sur des faits authentiques, se concentre plutôt sur une étude psychologique de deux négociateurs talentueux qui, tout en se respectant, savent très bien que leur but ultime est un genre de victoire sur l’« ennemi » et leur mission, outre le fait de construire la paix, est de conserver ou de remporter ce que leur gouvernement respectif leur demande, et ce, à n’importe quel prix. L’intérêt du livre, outre ses faits historiques avérés et authentiques, réside dans cette fameuse et récurrente dissection mentale et psychologique des deux protagonistes ; dissection littéraire qui est sans aucun doute la plus grande marque de fabrique de l’auteur japonais. Que ce soit dans « Une jeune fille suppliciée sur une étagère » ou encore « Liberté conditionnelle », il ne laisse aucune place à l’hésitation descriptive. Dans « Les drapeaux de Portsmouth », tout passe par les yeux de Witte et de KOMURA : leurs peurs, leurs fragilités, leurs méfiances, leurs regrets et leurs secrets sont imprimés sur leurs rétines et retranscrits le plus fidèlement possible par ce chirurgien des lettres qu’est le subtil et inégalé YOSHIMURA Akira.