Durant l’été, nous vous proposons de découvrir ou redécouvrir certains articles « à succès » publiés cette année sur le blog Finance & Stratégies.
Ces données constituent un pivot de compétitivité et de sécurité pour les établissements de crédit, qui les exploitent d’ores et déjà pour obtenir segmentations, scorings d’appétence, scorings d’acceptation, indicateurs règlementaires, etc… De ce fait, nombre d’acteurs ont par le passé réalisé de lourds investissements pour disposer d’entrepôts de données, d’outils de Business Intelligence (BI) et d’analyse statistique.
Néanmoins, la banque tire-t-elle au maximum parti de cette richesse ? Pourrait-elle accroitre encore son capital de connaissances client et son efficacité ?
Eclairage sur le Big Data
Pour s’adapter aux évolutions comportementales et technologiques, les banques de détail ont innové en diversifiant leurs canaux de distribution. Sites mobiles, applis et PFM ont ainsi fleuri. Cette immixtion du bancaire dans le quotidien, associée à un recours massif aux transactions électroniques, génère une avalanche de données souvent peu exploitées par les outils d’analyse traditionnels.
Associant puissance de traitement et BI, le Big Data regroupe sous ses consonances orwelliennes des solutions technologiques permettant de traiter rapidement de grandes quantités de données de nature différente.
Le Big Data diffère fondamentalement des outils traditionnels d’analyse de traitement de données par sa dimension prédictive. Si la BI décrypte les tendances existantes en utilisant des données riches en information par les statistiques descriptives, le Big Data manie les statistiques inférentielles pour recouper des masses de données à faible valeur unitaire.
Des opportunités novatrices pour les établissements de crédit
Bien que le métier de banquier reste par nature inchangé (assurer l’intermédiation entre ressources et besoins de financement), ces solutions ouvrent de nouvelles perspectives. Voici quelques applications concrètes qui pourraient être envisagées dans le domaine bancaire :
Ces opportunités peuvent être regroupées en trois catégories :
1. Renouveler le modèle de revenus des banques de détail
- Proposer des offres commerciales dynamiques : la compréhension détaillée des profils clients permet de cibler les stratégies commerciales personnalisées à l’échelle du micro-segment. L’adéquation affinitaire des promotions (réductions, cash back, invitations) influera notamment sur les taux de satisfaction client.
- Maximiser le cross et l’up-selling : la connaissance affinée du cycle de consommation d’un client est sur le chemin critique du cross et de l’up-selling. En offrant une vision holistique des insights passés, présents et futurs, le Big Data pourrait mettre les réseaux en capacité d’optimiser leurs processus de vente.
- Vendre des données comportementales : des opérateurs de cartes de crédit américains commercialisent des données comportementales. La confidentialité des données restant un obstacle en France, des alternatives utilisant des agrégats de données personnelles pourraient émerger sous certaines conditions.
2. Approfondir la connaissance client
- Développer une approche relationnelle : la relation client pourrait être repensée sur la base d’une psycho-segmentation (rationnel, relationnel, anxieux, hédoniste) en complément des critères d’âge et de patrimoine. Une telle approche permettrait notamment aux banques privées de disposer de clés de lecture pour répondre aux attentes d’une clientèle exigeante.
- Personnaliser les services : le manque d’adéquation des offres à leurs attentes serait la première raison invoquée par 50% des clients pour changer de banque dans les 6 mois. Ces dernières pourraient atténuer cette tendance en se reposant sur des prévisions à l’échelle de l’individu et non plus sur une extrapolation globale du passé.
3. Enrichir la gestion des risques
- Optimiser les conditions d’octroi : la baisse de qualité des portefeuilles est une des épées de Damoclès menaçant les réseaux. En l’absence de fichier positif, les banques ayant des projets Big Data pertinents seraient plus à même de minimiser leurs risques clients (adaptation du scoring, personnalisation des taux immobilier).
- Lutter contre la fraude : si certains éléments sont utilisés pour la détection de fraudes (plaintes, rapport d’expertises, historique), d’autres le pourraient grâce au Big Data (appels aux services clients, comportement sur Internet). La Banque de France a d’ailleurs lancé un appel d’offre en avril 2013 sur cette thématique.
Toutefois, ces perspectives alléchantes supposent des études de fond de niveau Groupe, et non cantonnées aux départements informatiques. Car l’adaptation du Big data au monde bancaire mettra en exergue sa complexité, de la transparence des calculs aux contraintes juridiques ou opérationnelles. A ces sophistications s’additionnera la mise en cohérence des nouveaux usages avec les règlementations en vigueur et leurs déclinaisons locales, notamment pour les maisons-mères et leurs filiales.
La mise en place du Big Data : des chantiers de grande ampleur
Choisir d’investir dans le Big Data est un premier pas, encore faut-il que les besoins métier soient identifiés en amont. Les étapes d’un tel chantier sont notamment les suivantes :
Essentielle à chaque projet, la phase d’instruction prend tout son poids dans ce type de chantiers. La capacité du réseau à absorber les changements de process, les objectifs de ROI et la communication entre métier et technique devront être cadrés, pilotés et évalués en impliquant certes les responsables techniques, mais surtout les métiers pour garantir l’atteinte des cibles fonctionnelles.
Les éléments suivants seraient dans ce but à étudier :
- La mise en Ĺ“uvre d’outils transverses afin d’atténuer les approches en silos et de diffuser des informations.
- La sécurisation des solutions Big Data, les exigences de protections des données bancaires étant nettement plus élevées que dans des industries classiques.
- Le pilotage financier du projet, basé sur des indicateurs en adéquation avec les préoccupations de l’établissement (ROI, IRR, pay-back period‌).
- La conduite du changement afin de sensibiliser au partage ainsi qu’à la hausse des exigences qualitatives des données, mais également afin de rappeler que la technologie, aussi performante soit-elle, ne remplace pas la réflexion humaine.
- La montée en compétence par la formation, le recrutement, l’instauration de partenariats, l’acquisition de start-up ou encore la location de services Big Data en mode SaaS (Software as a Service).
L’utilisation du Big Data dans l’univers bancaire, se distinguant nettement de celle qui peut en être faite dans l’industrie, imposera de déterminer des objectifs métiers clairs et adaptés aux ambitions, à la taille et à l’ancrage géographique de l’établissement. La mobilisation et l’adhésion de l’ensemble des acteurs de la banque, de la gouvernance globale aux agences, seront au cĹ“ur de la réussite de ces projets de transformation.
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