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Couple : Le Web 2.0 et les nouvelles infidélités

Publié le 20 mai 2008 par Henrymichel

En quoi les réseaux sociaux contribuent-ils à redéfinir la notion d’infidélité dans le couple ?
En quelque sorte, est-ce que poker c’est tromper ? La suite après le jump.

Lundi dernier, alors que je me garais dans le parking de mon entreprise après la pause déjeuner, commençait l’émission de Brigitte Lahaie sur RMC, dont le thème était “les nouvelles infidélités”.
Je trouvais le sujet assez intéressant, mais n’ayant pas le temps de rester dans la caisse à écouter deux heures d’émission, j’ai quitté la voiture sans savoir de quoi il en ressortait. Il est apparu, après une bref verif en podcast le soir même, que ça parlait d’infidélité tout court.

Je m’étais fait un peu l’émission dans ma tête en imaginant que par nouvelles infidélités allaient être abordées les nouvelles formes d’infidélités apparues avec les nouvelles technologies et le Web 2.0. Mais non, ce n’était pas le cas. Alors parlons-en maintenant.

Je pense que le sujet est un peu tabou. Je ne m’attends pas à recevoir en commentaires de témoignages, par exemple. Pourtant, partout autour de moi, j’observe que la multiplication des réseaux sociaux définit de nouveaux types de relations, des inhibitions, une confidentialité et des distances favorisant le flirt illégitime, aux frontières de ce que quelques-uns pourraient définir comme la fidélité.

Je ne suis ni philosophe, ni psychologue, ni curé, ni objecteur de conscience, j’échangerai donc juste quelques réflexions dans une liste, un truc bien de blogueur.

Les 6 raisons qui amènent les réseaux sociaux à faciliter l’infidélité :

1. Les réseaux sociaux facilitent la rencontre adequate.
Prenons par exemple un collectionneur de paquet de chips un peu geek sur les bords vivant dans les Cévennes. Nous l’appelerons Aristide. Son milieu environnant tolère avec un peu de moquerie cette marotte, dont son épouse. Par le biais de Facebook, Aristide rejoint le groupe des collectionneurs de paquets de chips sur Facebook (rassurez-vous ça n’existe pas encore). Il y poke une jeune femme habitant à 300km, collectionnant elle aussi les paquets de chips. De messages en messages, les mots se font plus tendre, Aristide, l’incompris, et la jeune femme tombe amoureux, Aristide largue tout pour elle , quitte sa femme et ses 3 enfants et part vivre collectionner les chips loin des Cévennes.

Jamais, sans les réseaux sociaux, Aristide n’aurait fait une rencontre si adequate. Il aurait pu peut-être créer un fanzine, le référencer quelque part sur internet, la femme aurait pu laisser un message dans un forum…Mais on est déjà dans un réseau social. Vous pourriez me rétorquer que les passions communes ne font pas forcément un couple adequat, mais c’est mon blog, et je ne vous ai pas dit non plus qu’Aristide était plus heureux en couple qu’avant.

2. Les réseaux sociaux facilitent la retrouvaille.
Une question simple : combien d’ex petites copines/copains et amours de jeunesse n’auriez-vous pas retrouvé sans Facebook ou copains d’avant ? Pour ma part, un paquet (non je ne suis pas prétentieux). Et quand bien même aviez-vous gardé contact avec chacun d’entre eux, le point 3 va marquer une autre différence.

3. Les réseaux sociaux légitiment les communications sans aucune motif.
Imaginez-vous un instant appeler au téléphone une ex que vous n’avez pas contacté depuis 10 ans, attendre qu’elle décroche, dire “hého ! Ca va toi ?” et raccrocher sans attendre de réponse et affronter un éventuel blanc désespérant pour les deux parties. Impossible (ou alors vous êtes bizarre).
Avec Facebook, c’est possible. Car Dieu a inventé le poke, ça veut tout dire et n’importe quoi le poke. Le poke est la version la plus épurée de ce qu’on appelle en communication la fonction phatique, comme le “allo” que vous faites au téléphone. Le sens du poke n’est pas de communiquer, mais de demander “communique-t-on ?”.
Plus facile de reprendre le contact, et sans risque.

4. Les réseaux sociaux dématérialisent le passage à l’acte mais permettent tout le reste.
Sans rentrer dans de la philo, à quelle moment peut-on considérer qu’un adultère est un adultère ? La majorité d’entre vous répondront au passage à l’acte sexuel.
Que représente le passage à l’acte sexuel dans la construction d’une liaison adultère, en temps investi ? Peut-être 2%. Tout le reste, la création du lien intime, les déclarations, les promesses, la séduction peuvent se passer d’une interface physique. MSN rulez.
La virtualisation de ces relations affranchit donc de toute culpabilité la liaison sur msn, facebook, ou second life, en amenant pourtant très loin.
Un resident notoire du Second Life francophone, Nibb Tardis, avait dit un truc qui m’avait marqué : que le contraire du monde virtuel n’était pas le monde réel mais le monde matériel. La liaison amoureuse sur second life, et même la relation sexuelle virtuelle, n’a en cela rien de non-réelle : elle n’est juste pas tout à fait matérielle.
En ce sens, beaucoup de résidents sur Second Life peuvent entretenir là-dessus une ambiguité assez dérangeante. Au-delà des parties de jambes en l’air, certains couples d’avatars, prétextant le roleplay, ont de véritables histoires d’amour IG (ingame, dans le jeu), tout en reconnaissant très simplement être mariés ou en couple IRL (i real life, dans la vraie vie). Ca , je n’ai jamais vraiment compris ,et a souvent été objet de discorde (courtoise) avec mes amis roleplayers.

5. Les réseaux sociaux facilitent l’intimité, l’anonymat et le secret.
Au boudoir du 18e siècle se sont substitués les direct messages, les PM, MP et autres IM (messages privés).
Alcove numérique: le ton se fait plus tendre, en messagerie privée sur seesmic, m’a-t-on dit parfois.

Le français aime écrire (il suffit de voir le succès des blogs et surtout des forums), et msn restant l’application “sociale” la plus adoptée par le peuple en ce jour, il est devenu un des outils majeurs de la relation amoureuse des 15-25 ans, ex aequo avec les sms.
Lisez d’ailleurs ce thread de forum sur la surveillance msn dans certains couples, assez comique.

6. Les réseaux sociaux reflètent la meilleure partie de vous-même.
Votre photo sur facebook sera la meilleure de votre collection (vous y reflèterez d’ailleurs souvent l’exact contraire de cedont vous avez peur que l’on pense de vous, par exemple un work addict s’y représentera au soleil, à la plage , buvant un cocktail).
Vos phrases de statut ou vos twits parlent plus de vos avions à prendre, vos voyages, vos vacances, vos dernières acquisitions de logiciels ou matériel high tech que de votre boule au cou qui vous inquiète, votre panne d’érection, la saleté de votre appartement ou votre contrôleur fiscal.
Sur Second Life, votre avatar est stylé, plus facilement consommateur qu’IRL, physiquement immortel.
Que cela soit via facebook, twitter, ou n’importe laquelle de ces plateformes, celui que vous reflétez ne peut être que plus attirant que celui que vous êtes.
Les réseaux sociauxreprésentent à la fois un instantané et une évasion du quotidien.
Ils sont de gigantesques aggrégateurs d’individus en constant besoin d’affection et de reconnaissance. Au-delà d’un certain usage, l’interlocuteur importe peu.

La question sera surement posée, est-ce que je me sens concerné par le sujet pour pondre un article aussi long sur le thème ? Pas tellement, non je n’ai pas de trucs plus croustillants que ça à raconter…Mais je me suis un peu retrouvé dans chacun de ces 6 points ! (sans avoir jamais failli à mes responsabilités conjugales).

J’ai juste réalisé assez récemment que je m’étais mis à Second Life lorsque ma femme était enceinte, et que mes expérimentations allaient bon train à cette période, mais c’était plus une excitation de gamin à tester des bites géantes qu’une réelle excursion affective. Je ne crois pas en la virtualisation des sentiments, un sentiment est un sentiment, l’oublier là-bas revient à l’oublier ici. Bizarrement, quand ma fille est née, Second Life devint pour moi plus un lieu de travail bénévole et de création que de roleplay. Cela fait plusieurs mois que je n’y suis plus retourné.

Et quand à mon avis, j’ai toujours utilisé dans cette article le terme de “facilitation”, car quelque soient les nouveaux horizons offerts par les réseaux sociaux, ils ne feront qu’accélérer un processus et/ou un malaise déjà présents dans le couple. Ils catalysent, mais ne créent pas le processus d’infidélité.

Vous en pensez quoi ?

Pour terminer en poésie, et pour revenir sur la définition même de l’infidélité, laissons Agathe, la passionnée du Electre de jean Giraudoux, parler de son infidélité à elle :

“AGATHE. Nous vous trompons avec tout. Quand ma main glisse, au réveil, et machinalement tête le bois du lit, c’est mon premier adultère. Employons-le, pour une fois, ton mot adultère. Que je l’ai caressé, ce bois en te tournant le dos, durant mes insomnies. C’est de l’olivier. Quel grain doux ! Quel nom charmant : Quand j’entends le mot olivier dans la rue, j’en ai un sursaut. J’entends le nom de mon amant !Et mon second adultère, c’est quand mes yeux s’ouvrent et voient le jour à travers la persienne. Et mon troisième, c’est quand mon pied touche l’eau du bain, c’est quand j’y plonge. Je te trompe avec mon doigt, avec mes yeux,
avec la plante de mes pieds.”


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