Généralement, le “reboot” d’une saga cinématographique à succès n’est pas une bonne idée, les nouveaux films s’avérant la plupart du temps de pâles copies des originaux. Mais il y a heureusement des exceptions qui confirment la règle, et cette nouvelle série de film inspirée du roman de Pierre Boulle en est la preuve éclatante.
Sorti il y a trois ans, La Planète des Singes : les origines avait créé la surprise en proposant non pas le remake du film original de Franklin J. Schaffner ou celui de Tim Burton, mais une variante autour du film de Jack Lee Thompson, La Conquête de la Planète des Singes, sorti en 1972. Autre surprise : pour un blockbuster estival, le résultat était assez nettement supérieur à la moyenne, malgré un scénario un brin linéaire et prévisible.
On y découvrait comment César, un chimpanzé doté d’une intelligence supérieure après avoir servi de cobaye à un traitement contre la maladie d’Alzheimer, finissait par mener la révolte des singes contre les humains, avant de fuir vers la forêt, dans les alentours de San Francisco. Le film se terminait sur l’annonce de la propagation fulgurante d’un rétrovirus mortel pour l’homme, mais très bénéfique aux singes.
La Planète des Singes : L’Affrontement se déroule dix ans plus tard. L’humanité a été dévastée par le virus. Les rares personnes immunes au virus tentent de s’organiser pour reconstruire ce qui peut l’être. C’est le cas à San Francisco, où une petite communauté s’est créée autour de Dreyfus (Gary Oldman). Mais les ressources énergétiques s’amenuisent peu à peu, menaçant la survie du groupe. Afin de remédier à ce problème, des ingénieurs s’aventurent hors de la ville pour remettre en service la centrale hydroélectrique située dans la forêt.
La rencontre avec César et sa tribu est inévitable. Les singes se sont eux aussi organisés en communauté. Ils habitent un village fait de cabanes en bois, se sont dotés d’une école rudimentaire, vivent de cueillette et de chasse. Un mode de vie primitif, mais qui leur convient très bien, puisqu’ils vivent en harmonie autour de leur charismatique leader. Evidemment, ils ne voient pas d’un très bon oeil l’arrivée des humains dans leur univers paradisiaque, et leur font comprendre que toute intrusion sera considérée comme un acte de guerre.
Dreyfus sait l’importance du barrage hydroélectrique pour la ville, et il décide de se préparer au combat contre les singes pour prendre cet objectif stratégique. Cependant, il accorde à Malcolm (Jason Clarke) et Elli (Keri Russell) un petit délais pour négocier une solution pacifique avec César.
La tâche ne s’annonce toutefois pas simple, car, dans un camp comme dans l’autre, certains individus se refusent à envisager une issue pacifique.
Chez les singes, César voit notamment son leadership de plus en plus contesté par Koba, un de ses plus fidèles lieutenant…
Tout comme le premier volet, La Planète des Singes : L’Affrontement propose aux spectateurs bien plus qu’un banal blockbuster d’action et de SF.
Il donne à réfléchir sur l’opposition entre les sociétés primitives et la civilisation contemporaine, ainsi que sur ce qui distingue l’espèce humaine de ses cousins simiesques – en bien et comme en mal. Et il montre que l’accès à des niveaux d’intelligence supérieurs a des bons côtés, comme l’éducation, la mise en place de lois et de règlement d’intérêt général, mais permet aussi à des individus mal intentionnés de préméditer des actions criminelles et de fomenter des complots…
Fort de ces thématiques et de cet enjeu dramatique, ce second épisode prend une ampleur toute nouvelle. Les scénaristes jouent avec les codes de la tragédie antique, avec ce que cela implique comme jeux de pouvoir, trahisons et discordes familiales funestes. Et ils lorgnent aussi un peu du côté du western : l’opposition hommes/singes fait évidemment penser à l’affrontement entre les pionniers et les indiens, et l’entrée de la communauté de survivants à San Francisco a tout d’un fort assiégé… Ce faisant, il marche aussi sur les traces de James Cameron et de son Avatar, autre succès récent du film de SF.
Il en découle un scénario foisonnant qui offre de nombreuses possibilités au cinéaste, Matt Reeves. Et celui-ci ne se prive pas de les exploiter, en jouant sur les spécificités de son décor pour orchestrer de somptueux mouvements de caméra, et imprimer ainsi un souffle épique au récit.
La belle partition musicale de Michael Giacchino, l’ambiance sonore très réussie, et l’utilisation intelligente de la 3D renforcent cette impression.
Reeves peut aussi s’appuyer sur des effets spéciaux plus aboutis que ceux du premier volet. Normal : le traitement numérique des images a beaucoup progressé en trois ans, et Andy Serkis, le comédien qui incarne César, est passé maître dans la restitution d’émotions subtiles par le biais de la motion-capture. Un savoir-faire qu’il communique également à ses partenaires, comme Toby Kebbel, Nick Thurston ou Judy Greer, tous impeccables.
Il en va de même pour les acteurs “humains” : Gary Oldman, ambigu et complexe, est parfait dans la peau du leader de la communauté de survivants, tout comme Jason Clarke, dans le rôle de l’ingénieur partisan de la paix et de la diplomatie.
Certains reprocheront toujours à l’oeuvre un déroulement un peu trop linéaire et sans surprises, mais globalement, La Planète de Singes : L’Affrontement est une belle réussite. On est heureux de constater que le cinéma hollywoodien peut encore combiner grand spectacle populaire et ambitions artistiques, et réaliser des remakes/reboots supérieurs aux originaux (les films de Jack Lee Thompson). On est désormais très impatients de découvrir le troisième épisode, d’ores et déjà annoncé, sauf catastrophe majeure au box-office US.
_______________________________________________________________________________
Dawn of the Planet of the Apes
Réalisateur : Matt Reeves
Avec : Andy Serkis, Jason Clarke, Toby Kebbel, Gary Oldman, Keri Russell, Kodi Smit-McPhee, Judy Greer
Genre : blockbuster inspiré
Durée : 2h11
Date de sortie France : 30/07/2014
Note : ●●●●●○
Contrepoint critique : Le Nouvel Obs
(on n’est pas d’accord, mais que c’est finement écrit…)
_______________________________________________________________________________
Jeu de briques
Snake
Pacman
Bubble