Dark skies - 7,5/10

Un film de Scott Charles Richard (2013 - USA) avec Keri Russell, Josh Hamilton, Dakota Goyo

Excellente surprise.

L'histoire : Une petite famille modeste, typique des années 2010, Papa au chômage, Maman dans l'immobilier, qui peine à faire son chiffre, un ado, Jesse, en voie de rébellion, normal, et un petit garçon, Sammy, qui fait des cauchemars. Et puis soudain des événements très étranges dans leur maison. La cuisine dévastée la nuit, frigo dévalisé et restes en vrac partout ; jolie construction géométrique un matin, empilant vaisselle et boîtes de conserves, défiant toutes les lois de la physique ; les photos qui disparaissent des cadres ; des marques sur les corps... Entre la police qui ne constate aucune effraction, les enfants accusés de faire des sales blagues à leurs parents, ou au contraire ceux-ci accusés de sévices sur leurs mômes... la famille est au bord de l'explosion.

Mon avis : Un petit film dont je n'avais jamais entendu parler, réalisateur inconnu, comédiens idem, à part Keri Russell (pour les très pointus). Je craignais fort de tomber sur un gentil navet bien banal, genre téléfilm et petits moyens.

Il est clair que le budget ne devait pas être élevé. Aucun effet spécial sophistiqué. Et pourtant ! On attend, on frémit, on s'angoisse, la preuve encore une fois qu'il n'est pas besoin de monceaux de dollars pour être efficace. Chapeau. Tout est dans la réalisation, que j'ai trouvée exemplaire. La caméra utilise toutes les techniques, savamment dosées, pour concocter une ambiance sombre et captivante (beau travail de l'ombre et de la lumière), tout en suivant au plus près les personnages (plans serrés, gros plans, caméra à l'épaule, cadrages obliques, contre-plongées... tout pour nous mettre en empathie et aussi nous désorienter).

L'histoire, pas forcément originale sur le fond, reste très prenante du début à la fin. On sait dès le début qu'il sera question d'extraterrestres : l'intro affiche une citation de Arthur C. Clarke, célèbre auteur de science-fiction : "Il y a deux hypothèses : soit nous sommes seuls dans l'univers, soit nous ne le sommes pas. Dans les deux cas, c'est terrifiant." Paf, déjà ça vous colle une petite claque. Mais pas d'aliens en vue ; il se passe tout un tas de choses très bizarres, de plus en plus bizarres, mais nous n'avons des explications et une théorie que sur la fin. Un truc qui tient debout (pour les grands naïfs comme moi) et vous laisse les mains un peu moites... Ceci dit, vu que j'avais regardé quelques heures avant C dans l'air, sur la situation explosive au Proche-Orient, et que ce matin, le premier titre du Portail Orange annonce que le virus Ebola est en train de paralyser toute l'Afrique de l'Ouest... il faut relativiser : de toutes façons, la planète est mal barrée, c'est clair, avec ou sans aliens.

Le film abonde, par petites touches diverses, en angoisses bien contemporaines : inquiétude face à l'avenir, chômage, crise, parano, théorie du complot, regard des autres, dépression (ou pas), folie (ou pas)... Il est des moments où l'on se prend à douter : et s'ils étaient juste dingues, ces parents ? A l'image du titre, qui évoque à la fois la menace des étrangers venus du ciel, ou de sombres perspectives en général.

Je vous encourage à regarder Dark skies si vous tombez dessus. J'ai passé un fort bon moment, accrochée à mon canapé.

Les critiques sont partagées. Entre ceux qui aiment : "Le final est emblématique de l'émotion qui se dégage de ce "petit" film puisant sa force dans la caractérisation de ses personnages et dans une mise en scène solide et sans esbroufe" (Mad Movies) et ceux qui détestent : "Scott Stewart se montre incapable de tisser des rapports crédibles entre des protagonistes peu aidés (...) par un scénario tellement faiblard en termes de caractérisation que chaque dispute ou conflit finit par sonner aussi faux qu'un mauvais mélodrame télévisé" (Mad Movies aussi !). La vérité est sans doute au milieu : "Assez réussi, dans les limites du genre, le film de Scott Charles Stewart devient véritablement inquiétant lorsqu'il ranime une peur qui n'est pas celle d'événements extraordinaires mais plutôt celle, très ordinaire mais très crédible, d'être progressivement exclu de sa propre communauté" (Le Monde).

Les spectateurs n'ont pas trop suivi non plus : 150.000 entrées en France. Mais la distribution a-t-elle été à la hauteur ? Je ne me souviens pas avoir vu une quelconque promo et ceux qui ont regardé la bande-annonce disent que tout est dedans et que le film en est totalement gâché.

En tous cas, moi, qui débarquais, avec un a priori plutôt défavorable puisque justement j'ignorais l'existence de ce film malgré mon assiduité vis-à-vis de l'actualité cinématographique, j'ai trouvé ça épatant !