Père je crois en toi
aussi évidemment
qu’en cet arbre solitaire
qui traverse mon regard
Mais
donne-moi d’apercevoir
quelque trace de ta bonté
n’importe où sur cette terre
où tout ce qui vit
ne vit que de meurtre
Ce matin
les nouvelles du monde
sont mauvaises
L’Afrique
dévorée par la famine
assassinée par le sida
l’enfant palestinien
tué d’une balle dans la tête
par un tireur d’élite
le vieux juif
mort de froid
sur un trottoir du Bronx
la chienne aveugle
qui croyait que c’était pour jouer
battue à mort par des enfants
et quoi d’autre
dans les poubelles débordantes
de l’aube
Père où es-tu
J’accepte mal
que ta bonté soit un mystère
Et pourtant je crois en toi
comme en cet arbre
que tu as créé à ton image
tout rugueux d’écorce qu’il est
et lisse et lumineux de feuilles
et qui prend forme de croix
et fait de mes yeux des oiseaux
***
Serge Wellens (1927-2010) – Il m’arrive d’oublier que je perds la mémoire (2006)