Art public : encore une couche !

Publié le 29 juillet 2014 par Pantalaskas @chapeau_noir

Fontaine d'Alain Mila à Hayanges (avant dégradation)

Le tout dernier article des Chroniques du chapeau noir « 1%, la mort en ce jardin » évoquait le florilège des agressions, destructions dont sont régulièrement victimes les œuvres d’art insérées dans l’espace public. A l’indifférence et à la négligence coutumières s’ajoutent aujourd’hui l’ignorance et la bêtise avec la plus récente expression de cette pratique :

"sinistre"

« La municipalité FN de Hayange, en Moselle, qui a décidé de repeindre en bleu une sculpture du centre-ville jugée "sinistre", s'est attirée les foudres de l'artiste qui s'étonne de ne pas avoir été prévenu et entend porter le litige devant les juridictions administratives. L'oeuvre, une fontaine en métal et pierre, avait été achetée en 2001 par la municipalité socialiste de l'époque à un artiste local, Alain Mila, qui a depuis quitté la région. »
Alerté, l’artiste Alain Mila a tenté, en vain semble-t-il, d’obtenir des explications sur cette détérioration invraisemblable. Il a décidé d’attaquer la collectivité devant le tribunal administratif de Strasbourg. « Le maire frontiste de Hayange, Fabien Engelmann, a dit assumer son choix et "ne pas comprendre qu'on fasse tout un pataquès" pour une oeuvre, selon lui, "dont on peine à appeler ça de l'art". "Il n'y avait rien de mal à faire ça. On a une ville assez lugubre, sinistre, on a voulu l'égayer. On a repeint le fond en bleu piscine, le reste en bleu turquoise... »

Fontaine d' Alain Mila après dégradation

« appeler ça de l'art »

Ce « dont on peine à appeler ça de l'art » achève de sceller le sort des valeurs de ceux qui y adhèrent. Sur la voie de « l’art dégénéré », ce symptôme désigne un abîme insondable.
Bien sûr cette agression sur la sculpture d’Alain Mila foule au pied tous les principes de respect du droit moral de l’artiste, de l’identité d’une œuvre d’art, ainsi que toutes les règles du droit, attitude que la justice ne pourra que condamner. Mais surtout elle révèle l’incapacité à appréhender la notion de création. Choix assumé par une municipalité s’arrogeant le droit d’agir en artiste, si l’on peut dire, pour « égayer » la ville.  Ce bleu piscine qui recouvre la sculpture d’Hayange servira de point de repère dans la marche en avant de l’inculture et de l’obscurantisme. La sculpture d’Alain Mila, désormais, en tient une couche. Elle n’est pas la seule.