Un film de Margarethe Von Trotta (2013 - Allemagne, France) avec Barbara Sukowa, Axel Milberg, Janet McTeer, Julia Jentsch
...les dernières vingt minutes sont bien.
L'histoire : 1963. Hannah Arendt, juive allemande, réfugiée à New York depuis 1933, est professeur à l'université et a déjà écrit de nombreux ouvrages de politique. Le nazi Eichmann, responsable de millions de déportations, est capturé et transféré en Israël. Hannah propose au New Yorker de couvrir le procès pour eux.
Mon avis : C'est instructif, mais c'est bien barbant ! J'ai songé plusieurs fois à arrêter. Bien évidemment, les procès d'anciens nazis, et tout ce qui couvre la période du Troisième Reich, c'est très intéressant, surtout à l'heure où surgissent partout communautarismes, nationalismes, terrorismes de tout poil. Mais la réalisation est plate, les dialogues convenus ; même le procès d'Eichman, dont des images réelles se mêlent au film, est si écourté qu'il faut en fait attendre la fin pour saisir la substantifique moelle de ce que va défendre Hannah Arendt, scandalisant le monde entier... Mieux vaut lire sa bio sur Wikipédia et le tour est joué. Si ça vous plaît, vous pourrez alors approfondir le sujet en lisant ses livres.
Ce genre de choses n'est pas fait pour le cinéma. La philosophie n'est pas photogénique ! Ou alors il faut un immense talent et des personnages qui pétillent afin de vous envoûter (je pense notamment au Cercle des poètes disparus, mais il y en a d'autres). Ce n'est pas le cas ici. Genre téléfilm, genre docu-fiction, triste et ennuyeux.
Sauf la fin. La façon de voir d'Hannah Arendt sur la "banalisation du mal" est - je trouve - plutôt intéressante. En gros, Eichmann, se défendant en disant qu'il ne faisait qu'obéir aux ordres montre sa bêtise et sa médiocrité : pas d'analyse, pas de courage... Un procès inutile donc. Elle ira plus loin en disant que les Juifs ont "aidé" les nazis : cette même sottise (naïveté), cette même peur, et donc cette soumission... Mais sa démonstration est bien trop complexe pour être explicitée juste dans ce quart d'heure final, même s'il en est plus ou moins question dans quelques scènes précédentes. Elle fut vivement critiquée et aujourd'hui on estime que sa pensée en général est erronée sur bien des aspects.
La communauté juive a eu l'impression d'être trahie. Dans un dialogue avec un ami elle s'explique très simplement : "Mais je n'aime pas les Juifs. J'aime mes amis." Je ne sais pas si la phrase est authentique, elle est en tous cas très pertinente...
Mais, sachant donc, après coup, que la philosophe est controversée, du coup, moi, perso, je ne sais plus où j'en suis ! Pourquoi lui rendre cet hommage appuyé si ses théories sont mauvaises, sans expliquer et sans argumenter.
Pas terrible, tout ça.
Encensé par la presse (ah bon ? encore un coup des intellos parigots ?), le film est toutefois descendu par Les Cahiers du Cinéma, dont je partage l'avis : "S'il est rigoureux dans son exposé, le film ne parvient jamais à dépasser le stade de l'illustration ni vraiment à questionner la pensée d'Arendt, adoptée en bloc. Très didactique, il s'en tient à l'énoncé de faits et d'arguments bien connus sans avancer d'idées fortes et originales"
Il faut surtout, je crois, connaître la vie et l'oeuvre de la philosophe, ainsi que la polémique qu'elle a suscitée, AVANT d'aborder ce film... ce qui n'était pas mon cas.
Ca y est, je suis revenue ! C'était cool.