Vicious est sitcom d’ITV qui est diffusée depuis le début juillet sur les ondes de PBS aux États-Unis. Elle met en scène Freddie (Ian McKellan) et Stuart (Derek Jacobi), un couple gai qui vit ensemble depuis presque 50 ans. Devenus quelque peu aigris par la vieillesse, leur appartement est le théâtre des pires insultes, mais demeure cependant le point de ralliement de tous leurs amis, jeunes et moins jeunes, qui viennent y déballer leurs problèmes. De son côté, Mystery Girls est une sitcom diffusée depuis la fin juin sur les ondes d’ABC Family où deux actrices has-been, Holly (Tori Spelling) et Charlie (Jennie Garth) décident d’ouvrir une agence de détectives privés, à l’image d’une populaire série des années 90 dans laquelle elles tenaient les rôles principaux. Ces deux séries ont pour personnages des anciens acteurs en quête d’une gloire depuis longtemps passée, mais n’ont pas recours au même genre d’humour pour atteindre leur public. Alors que la série de PBS se moque davantage de la vieillesse associée au couple, celle d’ABC Family mise sur la personnalité des actrices et non des personnages qu’elles incarnent.
Vicious : un pari risqué
Stuart et Freddie ont dans la septantaine et ne font plus grand-chose de leur journée sinon de ressasser de vieux souvenirs. Freddie a connu une modeste carrière d’acteur, accumulant les petits rôles ici et là, et accepte difficilement le fait d’être passé dans l’ombre. Stuart travaillait dans un bar lorsqu’ils se sont rencontrés et ce dernier avait beaucoup de succès auprès de la gent masculine. C’est tout simplement le fait de vieillir qui l’importune. Parmi les gens qui leur rendent fréquemment visite, notons d’abord Ash (Iwan Rheon), un jeune homme hétéro vivant dans le même bloc appartement et qui vient constamment leur demander de résoudre ses problèmes de cœur. Puis, il y a des amis de longue date comme Violet (Frances de la Tour), qui multiplie les rancards avec des hommes sans scrupules et Penelope (Marcia Warren), femme à demi sourde qui a de constants seniors moments.
Une sitcom dont les deux personnages principaux sont gais, ce n’est pas ce qui rend Vicious audacieuse pour autant. Comme l’écrit Geoff Berkshire dans sa critique : « The taboo here isn’t that the main characters played by Ian McKellenand Derek Jacobi are gay, it’s that they fall far outside the 18-49 demo. » Certes, ce genre d’émission n’est pas fait pour intéresser de prime abord les plus jeunes, mais se révèle diablement efficace lorsque vient le temps de faire rire. Le sujet d’humour numéro un? La vieillesse; thème peu exploité dans ce domaine qui ouvre la porte à des répliques cinglantes :
(Dans un magasin) Penelope : It that prostitutes?
Violet : No, it’s just the way they dress. Everyone’s very proud of their vaginas now.
Ou encore, lorsque les protagonistes décident de sortir dans un bar branché :
Freddie à Stuart: Oh did you look smart! I see you are wearing an extra chin for the occasion!
Puis:
Stuart: Besides, I used to get my fair share of attention… turned a few heads
Freddie: …and stomachs
Malgré le fait qu’elle mette en scène des personnages âgés, la série d’outre-Manche a recueilli un auditoire moyen de 3,37 millions durant sa première saison. Et pour ceux qui persistent à croire que ces personnages ne sont pas assez vendeurs, référons-les à un autre succès semblable : Last tango in Halifax qui a remporté deux prix aux Bafta en 2013 (meilleure série et meilleure scénarisation) sans compter les multiples nominations et un auditoire moyen de 6,3 millions pour la première saison et 6.0 pour la seconde. C’est justement ce manque d’audace qui fait défaut aux Américains, lesquels nous proposent des fictions comme… Mystery girls
Nostalgie d’une gloire très éphémère
Holly est pour le moins tête en l’air. Elle a déjà largué l’amour de sa vie parce que son horoscope le lui dictait et priorise davantage les chaussures au détriment des contrats de clients accordés à son agence. Par chance, elle a à ses côtés Charlie, une femme sérieuse, mariée avec un enfant. C’est d’ailleurs par ennui qu’elle a accepté de collaborer avec son ancienne collègue. Première incongruité de la série : la presse américaine a eu accès en primeur à plusieurs des premiers épisodes, dont le pilote dans lequel on nous explique les raisons des retrouvailles de ces deux actrices. Pour des raisons qu’on ignore, cet épisode a été diffusé à la quatrième semaine, alors que dans la première, on entre dans le vif du sujet avec une enquête qui se met en branle. Au fond, peu importe, celles-ci importent si peu dans le scénario qu’il est inutile de les résumer. Mystery girls est davantage prétexte à des blagues méta : on ne rit pas des péripéties de Charlie et Holly, mais bien des personnalités de Jenni et Tori.
Vicious rassemble deux sommités dans le monde culturel, Ian McKellan et Derek Jacobi, tous deux ayant une feuille de parcours impressionnante et ces têtes d’affiche mettent tout leur talent au service de leurs personnages. Dans Mystery girls, on « célèbre » le retour d’un duo à l’écran qui a marqué une génération des années 90 : Beverly Hills 90210. Sans nécessairement remettre en compte leur talent d’actrices, leur feuille de parcours depuis la défunte série n’a rien de bien reluisant : quelques apparitions ou rôles à la télévision et en particulier pour Tori, une téléréalité médiocre qui a souvent défrayé la chronique. Si les critiques ont particulièrement apprécié le fait que ces femmes n’aient aucune pudeur en acceptant de se moquer de leurs propres défauts, ces constances allusions au passé finissent par lasser à la longue et ce n’est pas prêt de s’arrêter : voici le synopsis de l’épisode #5 sur imdb.com : « Holly and Charlie return to Holly’s alma mater, West Beverly Hills High, in order to stop a senior prank »… C’est ce qu’on appelle être has-been.
Alors qu’une seconde saison de Vicious est attendue dans les prochains mois sur ITV, le sort de Mystery girls demeure incertain. Avec des cotes d’écoute qui s’éloignent du million chaque semaine (0.76, 0.48 et 0,58 respectivement), on doute de son avenir à long terme. Et entre l’audace et la nostalgie, la série britannique l’emporte haut la main.