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La cantine du Parlement européen : douze étoiles sur fond bleu

Publié le 25 juillet 2014 par Les Assiettes De Juliette @AssiettesdeJu

Le 25 mai dernier en France, 43% d’entre vous (ça fait pas lourd…) ont voté pour élire leurs représentants nationaux au Parlement Européen. C’est peut-être moins que pour la finale de The Voice, mais peut-être plus que Miss France. Au Parleuuu quoi ? Le truc à Bruxelles qui sert à rien et qui coûte cher ? Non, non, l’institution qui décide de la plupart des législations nationales et grâce à qui, entre autres, vous payerez moins cher vos coups de fil à l’étranger cet été …vous voyez ? Et un peu comme dans Kho Lanta, votre voix a décidé de l’avenir des candidats. Christiane de l’équipe des jaunes va pouvoir continuer l’aventure, mais c’en est fini pour Jean-Michel des rouges ; il rentre à demain à Paris. On prendra de ses nouvelles la saison prochaine en espérant qu’il aura refait sa vie.

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Alors, comme à chaque fin de législature, les Parlementaires battus ou démissionnaires ont vidé leur casier Place Luxembourg, rendu leur badge et (presque) signé leur solde de tout compte; pour la plupart à regret après s’être affrontés des mois durant, qui pour la réforme bancaire, qui pour les appellations contrôlées, qui pour le captage de CO2, et surtout pour conserver leur siège et leur indemnité par la même occasion. Et pour quelques semaines, les couloirs du Parlement ont revêtu des allures d’Ikea de seconde main (Billy par ci, Billy par-là), de vide grenier (on jette, on donne, on vend ? Les amendements, on archive ou pas ?) et d’ANPE aux heures de pointe (tu la veux mon assistante ? Il est pas mal mon conseiller politique, tu sais …). Dans une ambiance de fin de règne assez tragique, on a fait place nette à la nouvelle génération, aux adversaires de toujours, aux outsiders imprévus et aux redoutés.

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Une à deux fois par mois, nos 751 législateurs et leurs assistants transhument vers Strasbourg pour voter solennellement en séance plénière. Très bonne opération pour l’économie alsacienne qui bouillonne pendant quelques jours de ces consommateurs au pouvoir d’achat élevé (rien à voir avec les apprentis énarques); opération absurde pour d’autres, effrayés à bon droit par le coût et la logistique de telles translations. Mais comme les colonies de vacances, nombreux sont ceux qui aiment que ça recommence. Car les « semaines Strasbourg » c’est entre le séminaire hors les murs et l’UCPA. Les Députés sont plus détendus et plus accessibles qu’à Bruxelles, les lobbyistes sont souriants, le choix des activités est vaste, le jean serait presque de rigueur. On discute, on squatte le bar des fleurs, on échange sa carte, on prend rdv, on « passe les messages ». Les plus fêtards se donneront rendez-vous au Perestroïka dans le centre pour poursuivre la discussion tard dans la nuit. Bref, on s’ébat plus qu’on ne suit les débats.

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Le « PE » (Parlement Européen pour les cools), c’est une véritable entreprise. Et comme dans toutes les entreprises d’une taille certaine, il y a une cantine, lieu sacro-saint où se font les accords, se défont les alliances et s’échangent les derniers ragots (sérieux, j’aurais pas pensé qu’il pourrait être Rapporteur un jour, lui qui n’a jamais rien rapporté…). Elle a beau être réservée aux Députés, on peut s’y faufiler avec un peu d’adresse et d’entregent et observer l’homo politicus profiter de son « quality time ». Alors, en caméra même pas cachée, on a joué les Marcel Béliveau en Alsace pour vous montrer l’envers du décor et le contenu des assiettes. C’est par là.

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Ils sont venus, ils sont tous là. Aujourd’hui, c’était l’élection du délégué de classe (aka le Président de la Commission européenne). Une immense salle un peu bruyante, des tables nappées de blanc, des verres à pied et des assiettes estampillées du drapeau européen. A première vue, ça fait plutôt salle d’hôtel pour curistes en demi-pension du côté de la Bourboule. Et c’est assez drôle d’observer les convives prendre place de manière hésitante comme un jour de rentrée. On s’assoit d’abord en fonction de son appartenance politique et de sa nationalité dans ce Babel de la nourriture. On y repère rapidement les habitués car ils font signe amical aux serveurs (yeah, I’m back !) et la bouteille d’eau pétillante arrive sans l’avoir commandée. En revanche, les ‘bleus’ sont hésitants à prendre un verre de vin – Big Brother is watching – et ils doivent bâtir leur réputation. A l’heure du café, on pourra aussi identifier les délégations : expresso pour les Italiens, allongé pour les Belge, thé avec un nuage de lait pour nos amis d’Outre-Manche (un signe de partition ?).

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Pas de carte, tout est à disposition sur de grands buffets (ouais, c’est quand même plus Sodexho qu’Alain Passard). Ce qui frappe, c’est l’abondance à croire que le Traité de Lisbonne a inscrit la diversité des hors d’œuvre dans son Préambule. Langoustines, galantine, pinces de crabes (Kamtchatka quand je te vois), surimi (je vous en prie), terrine et poisson froid côtoient potage, rémoulade, coleslaw, concombres à la crème, jambon Serrano et pâté de tête…Il faut bien satisfaire les palais des 28 Etats Membres et leurs régime alimentaires.

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Côté chaud, c’est un peu moins impressionnant, un peu plus déroutant même, quoique propice à aborder les sujets qui fâchent avec les membres des Commissions Commerce international et Pêche : nems (mmhh, ouverture à l’Est ?) et merlu vapeur (et le dossier haute mer, il en est où ? Tu crois qu’elle va faire quoi, la Présidence italienne ?). On observera tout de même que les Parlementaires font la queue comme tout le monde, les resquilleurs seront estampillés. La loi s’applique à tout le monde.

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A table en vérité, on évoque plus les vacances à venir que les dossiers chauds. On verra ça au retour des congés, après Stockholm, Athènes, Malte ou Zagreb. Il faut bien rentrer dans sa circo et remercier les électeurs de leur soutien, et aussi « prendre le pouls » afin de porter les « bonnes idées » dans les années à venir. Oui, on a beau défendre l’idéal européen (enfin, beaucoup…), la politique nationale reste en ligne de mire et les échéances se rapprochent.

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14h approche, la séance va reprendre. On se lève une dernière fois pour remplir son assiette de fromage et / ou dessert (c’est tout compris). Les chouquettes et cannelés – French touch – remportent un franc succès, la salade fruits aussi. A Strasbourg comme ailleurs, un mois avant le maillot, on fait attention à sa ligne…politique.

Où : Parlement européen – Allée du Printemps, 67000 Strasbourg, France +33 3 88 17 40 01

Quand : les semaines rouges ! http://www.europarl.europa.eu/plenary/fr/meetings-search.html

Avec qui : le gratin du monde politique européen, ceux de votre bord et les autres

A vos pieds : cinq ans pour faire avancer vos idées

Dans votre ipod : L’assistant parlementaire, Miossec


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