A moins d’un coup de théâtre de dernière minute, Vicenzo Nibali (30 ans en novembre) remportera dimanche aux Champs Elysées le 101ème Tour de France.
Il faudrait un incident de course regrettable pour le priver d’une consécration qu’il a pleinement méritée après avoir endossé le maillot jaune sur un coup de force inattendu le deuxième jour déjà vers Sheffield ! Au total dix-neuf jours leader sans jamais avoir connu la moindre alerte, conforté par trois autres succès dans le Jura (La Planche des Belles-Filles), les Alpes (Chamrousse) et les Pyrénées (Hautacam). Des réussites réglées comme du papier à musique, avec le soutien d’une équipe Astana bien soudée autour de lui et avec à chaque fois une démonstration d’efficacité comme on n’en avait encore jamais vu de sa part à ce niveau.
Sur ce que Nibali a encore démontré dans la montée de Hautacam en troisième semaine, on peut d’ailleurs légitimement se demander s’il n’a pas disputé cette 101ème édition en état d’apensanteur du premier au dernier jour ! Alors que le peloton est anéanti par la fatigue, lui voltige comme jamais sur cette pente qui avait déjà servi à mettre le sulfureux Bjarne Riis sur orbite en 1996… Il y avait aussi du Pantani dans son attitude, mais pas forcément du Armstrong car l’extra-terrestre américain dégagait à l’époque une plus grande impression de puissance dans les ascensions. Avec Nibali, tout est fluide, léger, aérien. Un régal.
Il n’empêche que tant de supériorité sur une opposition pourtant de qualité mais asphyxiée, reléguée, ratatinée fait resurgir les questions que l’on pensait à jamais enfouies dans les entrailles d’un cyclisme disparu… Mais où donc va-t-il chercher ces forces qui lui permettent tant de panache ? Quand on connaît les antécédents de Vinokourov, le manager d’Astana, on est en droit de s’interroger. La comparaison de Nibali avec ses dauphins saute aux yeux de façon évidente, surtout avec Valverde qui s’accroche comme un forcené pour espérer la deuxième place à Paris. Mais avec le contre-la-montre de 54 km entre Bergerac et Périgueux, ce sera peut-être le vétéran d’AG2R, Christophe Péraud (37 ans), qui réalisera son rêve. A moins que le jeune Pinot (24 ans) ne signe l’exploit du jour.
Bertrand Duboux