L’amateur des villes et l’amateur des champs.
Un amateur de vin, riche collectionneur
Vantait ses Angelus et Romanée-Conti.
Fréquentait beau monde, et dîners organisait,
Somptueux de chères, de Chambolle-Musigny.
Un jour, il rencontra un bien pauvre amateur,
Qui de sa cave n’avait que modestes Chablis,
Petit crus Bourgeois, quelques rares Beaujolais,
Qu’il dégustait seul, car il n’avait point d’amis.
« Comment, cher ami, se prétendre connaisseur
Sans avoir comme son plus modeste trésor
Quelques-uns des grands crus de notre Côte d’Or !
Nos modestes Pomerol, Petrus et Lafleur !
- C’est que je n’ai point vos moyens, ne suis cador,
Je dois me contenter de mes maigres trouvailles,
Pour boire sans que je me mette sur la paille,
Je me régale, comme un Nabuchodonosor
Qui imagine que sa cave est Babylone,
Qui rêve L’Alsace, Bordeaux, et la Bourgogne,
Et savoure au centuple ses doux breuvages,
Le cœur rempli de joie, l’esprit dans les nuages.
- Venez chez moi, à la ville, pour enfin goûter
Ce que c’est que le vin. Viendra d’autres amis »
L’amateur des champs accepta, et se rendit
Chez l’amateur des villes, où braves gens goûtaient
Force vins, moult Champagnes millésimés.
Mais, soudain, l’oreille attentive du campagnard
Perçut critiques et méchantes railleries
Pour Mouton-Rothschild qui n’était que vil pinard
Richebourg affreux et imbuvable Clos de Tart.
Moralité
Il ne saurait y avoir de moralité
Des amateurs des villes peuvent être connaisseurs,
Et d’un beau patrimoine vinique les vecteurs.
Les amateurs des champs sont une belle entité
Rappelant que le vin n’est que félicité
Pour qui sait à sa juste valeur l’apprécier.
Posté par Daniel S à 00:01 - Commentaires [0] - Permalien [#]