Pomme S d'Éric Plamondon

Par Venise19 @VeniseLandry
Dure épreuve pour cette lecture, je l’ai terminée depuis au moins quatre moins, elle s’est donc estompée sous le passage du temps. Peut-être aussi parce ce que ce n’est pas une histoire comme j’ai appris à en écrire. Certains ont même été jusqu’à se demander si c’était vraiment un roman. Je n’irai pas jusque là, c’est un récit romancé, rendu par des flashs narratifs de différentes longueurs. Avec un thème  – l’arrivée de l’ordinateur par Steve Jobs.
Pour ceux et celles qui ne le sauraient pas, c’est le troisième récit d’une trilogie : le premier Hongrie-Hollywood Express (2011) mettait en scène Johnny Weissmuller, un athlète olympique, tandis que Mayonnaise est monté autour de Richard Brautigan (2012). Le point commun des trois : l’an 1984 en Amérique du Nord.
Plamondon a poussé le principe du concept dans ses derniers retranchements. J’ai lu Mayonnaise tout en ne connaissant pas Brautigan, même si on le dit en quatrième de couverture, un écrivain-culte. Tandis que Jobs, comment ne pas le connaître, nous qui pianotons sur nos claviers d’ordinateur. Le connaître au moins un peu, de nom ou de réputation.
Dans Pomme S, sa réputation se trouvera parfois confirmée, d’autres fois poussée plus loin ou, sans ambages, infirmée. Éric Plamondon a fouillé son sujet et autour de son sujet, les liens qu’il tisse le démontrent. Il y a le « avant » le coup d’éclat de la mise en marché du premier produit Apple, le « pendant » et le « après ». Tout est prétexte à lier un événement à un autre. Long tissage qui peut apparaitre comme un bric-à-brac jusqu’à ce que l’on découvre ce qui tient les morceaux ensemble, forçant l’exclamation : « Ah, mais, parce qu’il y avait un lien à la fin ? Tout serait-il lié, coudonc ? »
C’est la faute à Jobs si l’avènement du premier ordi Apple a été aussi spectaculaire, l’homme avait le sens du marketing. Une pub inspirée du roman 1984 de George Orwell passée durant le Super Bowl aura des retombées gigantesques. Cet homme n’est pas tant un inventeur qu’un génie pour créer un événement. Il a de l’audace, c’est un sans vergogne, un instable aussi. Les 113 chapitres de longueurs nettement variables ne font pas qu’allusion à Steve Jobs mais c’est certainement la partie qui m’a le plus captivée.
Il y a bien un personnage supposément central nommé Gabriel Rivages mais on le perd parfois de vue, puis, on le retrouve inopinément. Il traverse l’histoire comme nous, nous la traversons sans être toujours présent ; est-ce si nécessaire, après tout.  Cela donne au roman ses airs de chronique. Des airs seulement, à ne pas oublier que l’air n’est pas la chanson !
Je  dois souligner qu’à un certain moment de ma lecture, les larmes me sont venues aux yeux, malgré moi bien sûr. J’ai perdu le contrôle de mes émotions en lisant « À toi de jouer », relatant l’admiration de Gabriel Rivages devant son fils. Fait rare pour moi de m’attendrir à ce point et il fallait que ce soit dans une histoire prise à brûle-pourpoint ! Tant pis pour moi (sourire). 
Ce petit bouquin, je l’aime bien et l’ai référé à deux personnes qui raffolent des produits Apple, ça ne peut que leur plaire. Moi, je suis PC, un peu par la force des choses, comme le monde se partage entre la salade au chou crémeuse ou traditionnelle. Plamondon est un digne représentant de Jobs, qui serait fier de lui j’espère, car à entendre parler de ce bidule génial tout au long de ce récit romancé, ça m’a démangé d’en avoir un. Pour faire partie de l’Histoire, je suppose.
Mais c’est un air que je me donne, je ne chanterai pas, non, trop risqué se sortir en fausse note pour mon budget.
À ingurgiter lentement, ce roman sous forme de chroniques éparses intimement liées et tout en finesse. En définitive, un savant tissage qui nous rend moins niaiseux.