D’aussi loin que je me souvienne, j’ai découvert La Traviata (enfin quelques extraits !) par le biais d’un des films cultes de mon enfance : Pretty Woman.
Le parallèle vous semble étrange ??? Je m’explique !
Edward Lewis initie donc Vivian à l’opéra, grâce à cette œuvre romantique au possible, lui donnant à voir Violetta Valéry, une courtisane ayant sacrifié son seul et véritable amour pour se conformer aux normes sociales. Avant le début du spectacle, Edward lui dit cette phrase – ô combien véridique ! – : « La première fois que quelqu’un voit un opéra, très souvent, il réagit d’une façon très forte : ou il adore ou il déteste. S’il adore, il adorera toujours ; dans le cas contraire, peut-être qu’il apprendra à l’apprécier mais ça ne deviendra jamais une véritable passion… ».
La Traviata est le deuxième opéra que j’ai vu à Bastille (donc vous l’aurez compris, comme le disait Richard Gere, je fais partie des personnes qui ont tout de suite adoré !) et ce jeudi 5 juin 2014, j’ai été embarquée pendant plus de trois heures (no panic ! il y a toujours des entractes !) dans le Paris des années 1850, en compagnie de Violetta (« la Traviata », comprenez la Dévoyée) brillamment interprétée par Diana Damrau (soprano allemande) et d’Alfredo Germont, campé par Francesco Demuro (un ténor italien).
Oubliez vos idées reçues sur l’art lyrique et ne faites pas – comme moi avant d’avoir vécu mon premier opéra – le rapprochement entre opéra = retransmissions soporifiques du dimanche soir sur Arte.
Que nenni !
Pour moi, un opéra, ça se vit sur le moment donc il faut vraiment aller sur place ! Il faut être dans cette sublime salle, sorte d’arène musicale des Temps modernes, pour vibrer à chaque note de l’orchestre, pour observer le travail précis du chef d’orchestre, pour entendre les chanteurs déclamer leurs tirades (et sans micro s’il vous plaît !) et enfin pour profiter du sous-titrage de l’œuvre sur écran géant !
C’est un spectacle tellement grandiose, mobilisant tant de forces humaines et techniques, que le prix prohibitif des places se justifie pleinement lorsque l’on voit les moyens mis en œuvre…
Personnellement, je trouve que La Traviata est l’œuvre parfaite pour débuter son initiation à l’opéra (et c’est une néophyte qui vous le dit !).
Vous allez être surpris, vous, futurs auditeurs ou spectateurs (j’espère vous convaincre du mieux possible) de trouver et de reconnaître de nombreux airs car ils ont souvent été repris par la publicité, le cinéma ou bien encore à tout jamais imprimés dans l’imaginaire collectif ; au même titre que le O Fortuna de Carmina Burana (frissons garantis à chaque écoute !) ou le mythique L’amour est un oiseau rebelle tiré de Carmen.
Dès le prélude, résumant à lui tout seul les trois actes de La Traviata de par son intensité musicale extraordinaire, le spectateur pénètre dans l’œuvre par une explosion de sonorités virevoltantes décrivant les trépidantes mondanités de la vie parisienne. Je peux vous assurer que dans le premier acte, vous reconnaîtrez plus de la moitié des airs : l’introduction du chœur par le légendaire Dell’ invito trascorsa, le toast porté par Alfredo célébrant les plaisirs de la vie Libiamo ne’ lieti calici suivi par sa déclaration d’amour pour Violetta, Un di felice, eterea (qui pourrait faire fondre toute la banquise par sa seule intensité romantique !). Le spectateur reçoit ensuite en pleine face la réponse de Violetta par son émouvant E strano ! E strano !
Nous sommes déjà dans le deuxième acte et O mio rimorso ! décrit sublimement la joie d’Alfredo de vivre une si belle histoire d’amour mais le drame commence à se nouer ; le jeu impulsé par les cordes se fait plus grave, plus violent, plus saccadé. Le spectateur présage déjà le malaise… Le second tableau de cet acte comporte deux des plus fameux morceaux du chœur : le truculent et impertinent Noi siamo zingarelle (qui vous reste dans la tête) et le saisissant air Di Madride noi siam mattadori, une réponse toute masculine des matadors envers les bohémiennes.
A ce moment, il y avait au moins plus de quatre-vingt artistes sur scène et une orgie de costumes et de chorégraphies extrêmement vifs et colorés, un régal pour les oreilles et les yeux !
Le troisième acte s’ouvre, c’est la fin pour Violetta qui confie ses dernières volontés dans le déchirant morceau mais néanmoins pur, rempli d’une clarté toute virginale, toute céleste touchant presque au divin, Teneste la promessa. Les derniers spasmes de vie de la Dévoyée lui font dire O gioia ! (O joie !) avant sa mort subite, illustrée par les percussions (la cymbale éclate !), les cordes et les vents (bref l’orchestre donne tout ce qu’il a dans le ventre !) tonitruants mais à consonance lugubre.
Pour conclure, l’opéra, ce n’est ni has-been, ni élitiste.
Certes, on aime ou on déteste mais la force de La Traviata, c’est qu’elle ne vous laissera pas de marbre et c’est peut-être pour cela que c’est un des opéras les plus connus au monde, voire même LE plus connu !