Celle-ci est évidemment jeune, belle, avec une technique superlative. De plus elle joue avec un sourire permanent qui semble dire au monde à quel point elle ne connaît pas la difficulté technique. Evidemment de quoi irriter l’un des critiques musicaux qui souligne la prétendue platitude mécanique du jeu des asiatiques, et l’argument toujours douteux mais ô combien efficace de la jeunesse et de la beauté pour faire vendre la marchandise. Evidemment de quoi faire se pâmer d’admiration l’autre critique qui parle de poésie et d’élégance du toucher au-delà de la virtuosité naturelle de l’artiste.
Le ton devenant de plus en plus virulent dans leurs blogs respectifs, les critiques ne s’épargnent rapidement plus bassesses, turpitudes et mesquineries en passant à leur courriel personnel.
Mais je n’ai jamais été attiré par la performance sportive : ce n’est donc pas pour cette raison que j’ai une profonde admiration pour cette artiste. Un soir à table, un ami a posé son téléphone portable dans son verre à pied vide. On entendit sortir du verre des notes de piano d’une infinie délicatesse. C’était une sonate de Domenico Scarlatti interprétée par une jeune pianiste chinoise que je ne connaissais pas alors : Yuja Wang. Le legato de son jeu et la retenue du tempo laissait transparaître deux impressions contradictoires : d’une part une précision rythmique imperturbable, mais d’un autre côté une absolue liberté d’expression mélodique. La fusion des deux aspects de son interprétation donnait un sentiment de beauté complètement surnaturelle (écoutez de 5:15 à 8:32)
Paul Kristof
RACHMANINOV, Serge Vasilievitch. Rachmaninov no 3 ; Prokofiev no 2 / Yuja Wang, pno ; Simon Bolivar Symphony Orchestra of Venezuela ; Gustavo Dudamel, dir. Disponibilité
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