"De tous les modes de production de l'amour, de tous les agents de dissémination du mal sacré, il est bien l'un des plus efficaces, ce grand souffle d'agitation qui parfois passe sur nous. Alors l'être avec qui nous nous plaisons à ce moment-là, le sort en est jeté, c'est lui que nous aimerons. Il n'est même pas besoin qu'il nous plût jusque-là plus ou même autant que d'autres. Ce qu'il fallait, c'est que notre goût pour lui devint exclusif. Et cette condition-là est réalisée quand - à ce moment où il nous fait défaut - à la recherche des plaisirs que son agrément nous donnait, s'est brusquement substitué en nous un besoin anxieux qui a pour objet cet être même, un besoin absurde que les lois de ce monde rendent impossible à satisfaire et difficile à guérir - le besoin insensé et douloureux de le posséder."
Partant à la recherche de ses souvenirs, le narrateur évoque dans ce premier tome Combray, son enfance, sa famille et les amis de ses parents, contant notamment les désaventures amoureuses de Charles Swann, amant malheureux d'Odette.
Lire (ou re-lire) Proust, c'est entrer avant tout dans une langue riche, dans des phrases complexes et un fil de pensée savamment tissé qui nous laisse au terme des paragraphes ébahi. La grande parenthèse bien connue (et que l'on trouve d'ailleurs facilement éditée à part), très narrative, celle qui traite plus particulièrement des amours de Swann avec Odette n'est pas la partie la plus compliquée à lire, ni celle qui m'a le plus intéressée, elle traite avec brio cependant des affres de la passion amoureuse. Non, ce que j'ai préféré, ce sont les début de ce récit, lorsque nous assistons aux éclats de réminiscence du narrateur, là j'ai véritablement été admirative et séduite par les trouvailles littéraires de l'auteur, subjuguée. Ma fascination mis à part, j'ai quand même été tenue par l'histoire que l'on me racontait, par les liens qui semblent unir ou désunir les protagonistes dans ce premier volet, étonnée que Swann finisse par épouser cette affreuse Odette, malgré ses éclairs de lucidité, et que notre narrateur tombe sous le charme de leur fille dans un jardin parisien, reproduisant le schéma qui a tant fait souffrir Charles. Les mondanités tiennent une grande place dans l'univers des personnages de Marcel Proust, des mondes se côtoient et s'évitent, les réputations se satisfont de ce qui est connu et peuvent s'effondrer suite à une réplique maladroite, voilà qui est cruel et assez captivant.
Séduite par cette lecture, j'ai décidé de continuer ma quête. J'ai téléchargé la suite de La Recherche sur ma liseuse... un peu étonnée que le second tome s'intitule également Du côté de chez Swann (n'en n'aurais-je lu que la moitié ?). A suivre...
Lu sur ma liseuse - téléchargé gratuitement [ici]