Le palais
A l’extrémité ouest de Sultanahmet, dominant la Corne d’Or, le Bosphore et la mer de Marmara, l’ancien sérail impérial occupe un site de rêve, à l’emplacement d’une ancienne acropole antique. Converti en musée en 1924 et classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1985, il dévoile désormais au monde ses trésors, ses cours ainsi que son harem, un lieu autrefois inaccessible.
Pendant plus de quatre siècles, le Palais de Topkapi fut le centre du pouvoir ottoman. Le chef spirituel et politique des Musulmans, vivait ici entouré de sa famille et de son harem. C’est aussi le lieu où l’on réglait les affaires juridiques de l’empire, où les hauts dignitaires étaient formés et l’élite militaire des janissaires logés.
Son nom signifie "la Porte du canon". Sa construction a débuté en 1462 et s’est achevée en 1478.
Il fut la résidence du sultan ottoman jusqu’en 1855, époque à laquelle Abdul Meçit préféra résider dans le nouveau et somptueux Palais de Dolmabahçe. Seules les femmes des sultans déchus ou défunts restèrent dans l’ancien sérail.
On pénètre dans ce palais par la porte centrale dite aussi "Porte du Salut".
Construite en 1524 sous Soliman le Magnifique, cette porte est flanquée de deux autres portes de plan octogonal où l’on gardait les prisonniers condamnés à mort. Seul le sultan pouvait traverser cette porte à cheval; tous les autres devaient passer à pied.
Les cours
On débouche ensuite sur la première cour, la "cour des Janissaires" où s’alignent, sur la droite un poste de garde, les appartements des domestiques, l’hôpital du palais et les vestiges d’un four à pain.
On pénètre dans la deuxième cour, la "cour des Cérémonies" par la porte du Salut. Avec ses longues allées ombragées de cyprès, la cour évoque plutôt un jardin. Centre de la vie publique du palais, elle a gardé son aspect original, avec d’élégantes façades blanches parées de colonnades en marbre. C’est là que le sultan passait en revue ses janissaires, son meilleur corps d’armée, devant des milliers de personnes dans un silence absolu. Les vizirs se rendant au conseil passaient devant la pierre aux décapitations, dite "pierre de l’avertissement".
Les cuisines impériales, dix vastes pièces reconstruites par Sinan après l’incendie de 1574, occupent l’aile droite de la cour où 1 200 cuisiniers travaillaient à l’époque. Désormais, il est exposé une remarquable collection de porcelaines de Chine, la troisième au monde après celles de Pékin et de Dresde. Grands amateurs de porcelaines, les sultans rassemblèrent également d’exquises pièces de France (Limoges, Sèvres), de Russie et de Saxe (Meissen).
L’accès à la troisième cour se fait par la porte de la Félicité qui s’ouvre sur le pavillon des Audiences du sultan, décoré de faïences. La structure date de Selim Ier, mais seuls le magnifique dais du trône et la cheminée dorée ont survécu à l’incendie de 1856. Au centre de la cour trône l’élégante bibliothèque d’Ahmet III, tandis que près de la sortie du harem, se dresse la mosquée des Ağalar, décorée de faïences d’Iznik. Elle abrite une remarquable collection de manuscrits turcs, arabes et persans.
Dans l’aile droite, vous pourrez admirer le trésor de Topkapi, dont les salles, parmi les plus belles du palais, sont inhabitées depuis le XVIIe siècle. Elles rassemblent aujourd’hui les splendides cadeaux offerts aux sultans par les princes et empereurs de Chine, de Russie et des cours européennes; admirez notamment les quatre trônes incrustées de pierres précieuses – celui de Murat III, en or massif, pensant 250 kg – une énorme émeraude de 3,26 kg, un assortiment de 50 diamants, dont le célèbre Pigot aux 58 facettes et de nombreux objets précieux : poignards ciselés, berceau en ord du XVIIIe siècle, vases en cristal de roche, chandeliers en or de 48 kg incrustés de 6 666 diamants, et reliques de saint Jean-Baptiste.
Au nord-ouest de la cour, la salle des Reliques abrite les épées des quatre premiers califes ainsi que les reliques du Prophète Mahomet. Le pavillon s’ouvre au nord par un portique donnant sur une ravissante terrasse en marbre, agrémentée d’un bassin et d’une fontaine, d’où la vue est superbe. A chaque extrémité se dresse un élégant pavillon : le kiosque de la circoncision et le Revan Köşkü, bâti en 1636 par Murat IV pour commémorer la prise d’Erevan sur les Perses.
La quatrième cour est un véritable jardin d’agrément, elle s’étend sur plusieurs niveaux et est ponctuée de plusieurs kiosques.
A l’angle nord-ouest du jardin des tulipes, le luxueux kiosque de Bagdad élevé par Murat IV pour célébrer la prise de Bagdad en 1638, ses portes et ses fenêtres sont garnies de bois précieux incrustés de nacre.
Sa terrasse offre une magnifique vue sur le Bosphore et la Corne d’Or.
Le kiosque de Mustapha Pacha, un bel exemple du rococo turc renferme un brasero offert par Louis XV à Mahmut Ier.
Enfin le kiosque d’Abdülmacit, bâti par un architecte français en 1840 et dernière adjonction au palais abrite un agréable restaurant en terrasse dominant le Bosphore.
Le harem
Hormis les épouses et concubines du sultan, seules les esclaves chrétiennes, vierges et de grande beauté avaient l’honneur d’être recluses au harem, quartier secret, interdit aux hommes et surveillé par des eunuques noirs d’Egypte.
Bâti sous Murat III à la fin du XVIe siècle, et presque entièrement reconstruit après l’incendie de 1665, le harem est postérieur au palais primitif. Près de 500 personnes y vivaient dans des pièces sombres, souvent très petites et sans fenêtre. L’ensemble s’organise autour de deux patios : celui des eunuques et celui des femmes, où se situaient le salon et la chambre du sultan.
Dès 300 pièces que recèlent ce labyrinthe, seule une trentaine restent ouvertes au public, sans l’ameublement d’origine. Vous aurez néanmoins un aperçu du harem.
L’entrée s’ouvre sur un corridor pavé de galets. La petite cour des Kadin précède la cour de la Valide, centre névralgique du harem, sur laquelle s’ouvre le vaste salon du Sultan lieu de divertissement du souverain.
Plus loin, le souverain accueillait ses favorites dans la salle de la Fontaine.
Le salon de Murat III, certainement l’un des plus beaux, présente des faïences d’Iznik et une cheminée en bronze.
Les deux chambres des Princes, aux superbes carrelages, devaient servir à l’étude des jeunes sultans.
La visite s’achève par la cour des Favorites, dont les appartements à l’étage furent habités jusqu’en 1909.
Ce palais souligne cette délicatesse orientale, prolonge les rêves d’antan et nous plonge dans ce passé fantasmé.