Doux murmures dans “L’oreille de Zurbarán”

Publié le 19 juillet 2014 par Abbaye Aux Dames, La Cité Musicale De Saintes @Abbayeauxdames

Avant même que le concert commence on peut remarquer ce petit génie qu’est le chef de chœur, Paul van Nevel, marrant comme tout avec ses petites lunettes et son cigare juste avant son concert. On rentre directement dans une ambiance de tranquillité et d’apaisement. D’emblée les voix du Huelgas Ensemble nous transportent, une touche on ne peut plus monastique résonne dans la cathédrale. Le latin nous ramène à une époque mystique.

On se laisse emmener dans cette musique tranquille, sans réfléchir, elle nous guide tout droit vers le jardin d’Eden. On ferme les yeux et laisse l’imagination faire son travail et on se retrouve en paix. Le chant se termine et le bruit des musiciens changeant de place nous ramène à la réalité pendant quelques secondes. La grande question est « doit-on applaudir entre chaque morceau ou pas ? ». Mais avant même de pouvoir répondre à cette question on replonge dans ce paradis dès la première note.

En écoutant attentivement ces paroles on perçoit une présence supérieure. Ces voix se coordonnent si bien, elles semblent être créées pour être mise ensemble. De temps à autre une soliste se démarque des autres, la beauté de sa voix résonne jusqu’à ce que les autres chanteurs la rejoignent et reforment un tout. Dans la salle personne ne bouge, comme si les anges nous envoutaient. Des sensations multiples émergent : la douleur, la tristesse, l’entrain ou encore le bien être.

La chaise en paille sur laquelle nous sommes assis nous semblait bien raide au début du concert, elle est désormais oubliée. On ne remarque plus que les voix angéliques nous transportant. On passe d’un état serin à un état chaotique en l’espace d’un moment, simplement grâce aux variations de ces voix. Puis vient se mêler l’orage à ces voix mélodramatiques, dès lors tout devient possible pour tomber –si ce n’est déjà fait- dans une ambiance de tristesse qui glace les os. La musique est comme une flèche qui nous transperce à chacune de ses voix.

Par moment la mélodie devient plus rapide et les voix se font plus graves, une explosion surgit de nulle part. Comme si cette tristesse ne supportait plus d’être enfouie et surgissait précipitamment. Les voix féminines prennent la relève et viennent remplacer cette tristesse par quelques petites notes de joie. La main du chef de chœur nous montre à elle seule comment est la musique, elle ne fait aucun mouvement brusque, dirige en douceur ce chant fluide qui ne semble jamais s’arrêter. Tout est dans la continuité du son. Comme si la mélodie suivait une route sans embûches, en passant par des sentiers plus ou moins dangereux, pour au final arriver à la destination « extase ». Cette musique nous plonge réellement dans un univers où plusieurs émotions collaborent, que ce soit la mélancolie et le regret ou bien la quiétude.

Mathilde Plus