Réédition d'un article initialement paru le 22 décembre.
Avatar, ça fait des semaines, des mois que vous en avez entendu parler. Si vous lisez ces mots sur ce blog, vous faites probablement partie de ceux qui aiment le cinéma, fréquentant voire animant d’autres blogs qui se veulent justement cinéphiles ou cinéphages. Vous l’avez même certainement déjà vu ou alors, si ce n’est pas le cas (encore), vous avez visionné jusqu’à plus soif les trailers qui ont inondé les réseaux. Il y a des chances que vous soyez allés jusqu’à regarder une des nombreuses interviews accordées par le réalisateur miracle, le presque autoproclamé « King of the world ». Vous êtes peut-être même de ceux, passionnés, qui suivent l’actualité du film jour après jour, guettant les nouvelles images et les infos, décryptant les premières impressions, décodant les rumeurs. Avez-vous fait partie des chanceux qui ont participé à l’Avatar Day ? C’est fort possible. Quant aux autres, les rebelles, les ermites, les missionnaires et les ascètes, ne m’en veuillez pas si je ne vous mets pas les renseignements habituels. C’est juste que, ici, j’ai l’impression que ce la ne convient pas. Comme si… comme si écrire sur Avatar sous la forme d’une critique était inopportun.
Parce que c’est déjà fait. Ailleurs. Et souvent très bien.
Et la redondance, vous savez…
Mais n’hésitez pas à farfouiller chez les officiels, si vous en avez envie, ou chez mes collègues ou amis de la Toile qui le font parfaitement bien tout en émettant, au moins, des avis personnels sans aucune autre pression que celle de trouver la manière la plus élégante et la plus attrayante de les exposer. Par exemple Audie vous offre le synopsis chez elle avant un billet ambitieux et réussi sous forme de débat. Vous pouvez aussi coller vos yeux sur l’écran de Jérôme qui s’est enflammé sur le sujet (à raison) tout en sirotant son champagne. Ou encore vous délecter de la prose acerbe de notre Cinéphage préféré (qui en profite ensuite pour vous concocter un article fort à propos sur le cinéma en « relief »). Enfin, n’oublions pas JO4 qui vous exposera avec sa rigueur habituelle son (ou plutôt l’un de ses) coup(s) de cœur de l’année.
Par où commencer ?
Pourquoi pas par la note, hein ?
Boum, la voilà : 5.
OK. Ca, c’est fait.
Donc, j’ai aimé. Adoré même.
Reste à vous dire pourquoi.
Il s’agit de ce complexe, subtil et indéfinissable ensemble de facteurs qui n’expliquent que partiellement le ressenti. Objectivement, face à certains critères, le film est sans doute décevant. Je le reconnais. L’histoire par exemple : ça n’est guère davantage qu’un Pocahontas (ou the New World pour ceux qu’une référence à Disney, pourtant tout à fait pertinente à mon sens, rebuterait) futuriste, à ceci près que John Smith n’était pas volontaire pour s’infiltrer. La démarche d’apprentissage de la culture indigène est en revanche tout à fait similaire, tout comme la relation entre les deux protagonistes empreinte de respect et de passion : on peut également les comparer à celles entre John Dunbar et Dressée avec le Poing dans Danse avec les loups (visionné récemment en blu-ray version longue, le film m’a laissé vide d’émotions, baignant dans une sorte de quiétude extatique). L’observation de la manière dont le peuple infiltré communique, vit en osmose avec la Nature, est également déjà vue par ailleurs. Comme me le soulignait Phil Siné : « rien de nouveau sous le soleil », donc. Mais un film doit-il obligatoirement être fondé sur une histoire originale et surprenante pour plaire ?
D’autant que le script est loin d’être niais. Les parallèles avec certaines situations géopolitiques actuelles sont évidents, toutefois on ne peut guère taxer le scénario d’être vulgaire ou démagogue. Une seule mention, au cours d’un discours de Jake Sully, nous éclaire sur les motivations des humains : la Terre est morte, ou mourante, détruite par une civilisation qui tourne en rond et fuit en avant (tiens, amusante juxtaposition). On ne peut pas vraiment parler de « gros sabots écolos » !
Alors oui, la musique est vraiment quelconque (à un point qu’il est impossible de se souvenir de la moindre mélodie à siffloter – là aussi, quelle différence avec un chef-d’œuvre comme Danse avec les loups dont la partition enchanteresse demeure gravée des heures durant) : il est loin le temps où Horner nous pondait le score du Nom de la Rose !
J’ai pu lire aussi des griefs contre l’interprétation. C’est peut-être dû à l’extrême caractérisation des personnages, certains n’évitant pas le ridicule de la caricature (le colonel Quaritch/Stephen Lang avec ses poses à la Apocalypse now ou encore Giovanni Ribisi dans le rôle d’un représentant de la « Compagnie » cruellement proche de celui qui accompagne Ripley dans Aliens : obtus et avide). Michelle Rodriguez s’en sort assez bien, presque convaincante en pilote à l’esprit ouvert (vous avez remarqué comme Cameron respecte une certaine tendance du futurisme de la SF classique depuis Heinlein – rappelez-vous Starship Troopers : les hommes servent de chair à canon tandis que les femmes, plus rapides, plus sûres, pilotent les coûteux engins spatiaux et occupent les postes militaires sensibles ?). Mention bien également pour l’inusable Sigourney Weaver, qui nous offre la surprise d’un rôle plus étoffé que ce que laissait paraître la bande annonce, et Sam Worthington qui bénéficie du seul doublage convainquant avec cette narration en voix over rappelant celle de John Dunbar (encore). Mais Zoe Saldana en Neytiri est bluffante, surtout quand on connaît les conditions de tournage : à la majesté féline de ses poses s’ajoute une palette très étendue d’expressions faciales. Les amateurs auront aussi reconnu Wes Studi, méchant Pawnee dans Danse avec les loups (promis, c’est ma dernière référence !) et qui éclabousse l’écran dans le Dernier des Mohicans.
On a glosé sur la colorisation des peaux, écorces, carapaces et pétales où flamboient les teintes les plus vives : sont-ce les mêmes qui n’acceptaient pas les dinosaures hauts en couleurs de Jurassic Park 3 ?
Mais tout ça s’efface devant les visions de Cameron. C’est là où il a réussi à m’enchanter, à me combler. Dans cette façon bien à lui d’emmagasiner des décennies de littérature SF entre les mondes enchanteurs de Jack Vance, les époustouflantes descriptions de Philip José Farmer ou de Dan Simmons, de couvertures de pulps et de romans où s’entrechoquent les noms de glorieux illustrateurs tels Joe Petagno, Tony Roberts ou encore Rodney Matthews. L’arbre-monde et les rochers flottants ont suscité chez certains blogueurs des associations avec Miyazaki : je n’irai pas aussi loin, car on trouvait déjà cela dans de nombreux textes fondateurs de la SF. C’est à mon sens la grande force de Cameron : nous entraîner CONFORTABLEMENT dans son univers en le balisant d’éléments connus, qui ont peuplé nos rêves de gosses avides de paysages exotiques, sur-naturels et féériques en quête d’aventures et de passions. Grâce à la magie efficace de la technique 3D qu’il refuse de mettre en avant par d’inutiles procédés outranciers (pas de ces plans stupides où on vous projette quelque chose afin que vous esquissiez malgré vous un mouvement de recul), il nous invite à voyager, sans à-coup mais avec force démonstrations. C’est spectaculaire, puissant et éblouissant. Par le biais d’une mise en scène habile (on reconnaît de nombreux plans d’Aliens tout de même), on passe notre temps à plonger et à s’ébaubir, tout en regardant cette très belle histoire d’amour interculturelle se développer sans fausse pudeur ni voyeurisme inutile. L’issue est connue, mais on s’en fout car on en redemande, encore, et encore. Chevaucher ces créatures ailées, zigzaguer entre les lianes et les chutes d’eau vertigineuses, grimper sur d’incommensurables troncs, courir sur des herbes qui s’illuminent sur notre passage (oui Cultiste, comme dans Billie Jean !).
Rêver, donc.
Et s’émerveiller.
Titre original
Avatar
Réalisation
James Cameron
Date de sortie
16 décembre 2009 avec la Fox
Scénario
James Cameron
Distribution
Sam Worthington, Zoe Saldana, Michelle Rodriguez & Sigourney Weaver
Photographie
Mauro Fiore
Musique
James Horner
Support & durée
3D en 2.35 :1 / 162 min
Synopsis : Malgré sa paralysie, Jake Sully, un ancien marine immobilisé dans un fauteuil roulant, est resté un combattant au plus profond de son être. Il est recruté pour se rendre à des années-lumière de la Terre, sur Pandora, où de puissants groupes industriels exploitent un minerai rarissime destiné à résoudre la crise énergétique sur Terre. Parce que l'atmosphère de Pandora est toxique pour les humains, ceux-ci ont créé le Programme Avatar, qui permet à des " pilotes " humains de lier leur esprit à un avatar, un corps biologique commandé à distance, capable de survivre dans cette atmosphère létale. Ces avatars sont des hybrides créés génétiquement en croisant l'ADN humain avec celui des Na'vi, les autochtones de Pandora.
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