Bridges of Sarajevo is a Serbian, Russian, French, Italian, Bulgarian, Swiss, German and Spanish film. Not bad, could you say, for one film. It is actually thirteen short films that tell the history of Sarajevo from 1914 to 2014 as seen through the eyes of thirteen European filmmakers and connected by the bridge as a metaphor.More in English >> (Translation in progress, come bubble later)
Entreprise unique en son genre, le film a été projeté le 27 juin dernier dans le cadre de l’opération Sarajevo, Cœur de l’Europe. Ce projet de grande ampleur propose tout au long de l’année 2014 des évènements sportifs, scientifiques, culturels et pédagogique pour mettre en lumière l’histoire tumultueuse de cette ville que l’on a baptisée la « Jérusalem » des Balkans. C’est aussi un regard tourné vers l’avenir, une façon de montrer aux autres pays que Sarajevo est une ville résolument européenne. Sarajevo a marqué le début de la Grande Guerre en devenant le théâtre de l’assassinat de l’archiduc François Ferdinand. La ville sera de nouveau secouée par le conflit qui opposera les serbes et les bosniaques dans l’indépendance de la Yougoslavie dans les années 1990, lors du plus long siège du XXème siècle. C’est peu dire si la projection des Ponts de Sarajevo fut un moment clef de cette commémoration : ce film protéiforme représente la ville et ses enjeux à travers cent ans d’histoire. Plus encore, il rend hommage à la fraternité entre les peuples à travers l’image du pont, mise en animation entre les courts-métrages par François Schuiten et Luis Da Matta Almeida.
Treize cinéastes, donc. En deux heures et quelques de pellicule, cela paraît difficile à appréhender. Jean-Michel Frodon, le directeur artistique, a cherché dans ce patchwork de vécu(s) à rétablir une cohérence. Les films proposent donc une visite chronologique des fêlures de Sarajevo : depuis l’assassinat de François-Ferdinand qui a plongé la ville dans la terreur jusqu’à la reconstruction, après la guerre et les massacres, au XXIème siècle. Le film ne propose pas un point de vue ethnocentré : Vincenzo Marra raconte ainsi l’histoire d’immigrés bosniaques devenus italiens et rêvant une ville qu’ils ne reverront plus. De même, Marc Recha fait parler un protagoniste espagnol qui n’a connu la ville de ses racines qu’à travers les récits de guerre de son père, qu’il nous livre avec délicatesse et honnêteté. On retrouve encore entres autres Jean-Luc Godard, qui avait déjà prouvé son attachement à Sarajevo dans des films comme JLG/JLG, Je vous salue Sarajevo, For Ever Mozart et Notre Musique, Isild Le Besco qui suit l’optimisme d’un jeune enfant dans la ville moderne, Teresa Villaverde… Si le choix de composition autour des réalisateurs est original et pertinent, il peine à maintenir le rythme de bout en bout. L’alternance des langues, des époques et des régimes d’images, selon que l’on soit chez l’iconoclaste Godard ou dans l’univers plus réaliste d’Ursula Meier, n’aide pas forcément aux liaisons cognitives.
Je ne sais pas pour vous, mais malgré toute ma bonne volonté à apprendre mes cours d’histoire, je ne pourrais pas franchement écrire une thèse sur Sarajevo. Or le film m’a paru s’adresser à un public déjà aguerri. En un sens, il n’est peut-être pas tant destiné à des Européens – c’est à dire à des individus partageant une histoire commune et non spécifique - mais bien aux personnages de ces courts-métrages, qui ont été touchés de près ou de loin par les évènements qui ont marqué la ville. Aussi convient-il de venir à une séance des Ponts de Sarajevo avec quelques antisèches dans sa poche, et une bonne dose d’antipathie. « Si vous ne comprenez pas tout, ce n’est pas grave », semble dire le film, « voici des personnages dont le destin a été brisé par une histoire qu’il est nécessaire et urgent de ne pas oublier ».
Ainsi, malgré une logique qui m’a parfois fait défaut, je dois reconnaître au film une sublime prouesse : renouveler sans cesse ma capacité d’empathie en me mettant dans la peau d’une multitude de personnages aux sensibilités toujours uniques. Avec, au cœur, la même douleur et le même amour : Sarajevo, encore et toujours. Je me dois de finir avec une mention spéciale pour Ursula Meier, qui clôt ce travail de mémoire par un petit film remarquable : un enfant à la recherche de son ballon de foot dans un cimetière se retrouve nez à nez avec une dame venue se recueillir sur une tombe. Les dialogues sont minimaux, mais l’émotion est à son comble. La brèche entre cet enfant né après la bataille et cette femme de 40 ans son ainée exprime, mine de rien, la plus grande peur de ceux qui ont toujours œuvré pour la survie de Sarajevo : l’oubli, qui porte en lui le risque de voir l’histoire se répéter.
Marine J.
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