Un tout petit rien, Camille Anseaume

Par Laurielit @bloglaurielit

Un rayon « les premiers romans » dans ma médiathèque, un titre qui m’a attiré « Un tout petit rien », une photo délicate sur la couverture, un nom dont j’avais déjà entendu parler (Camille Anseaume tient un blog www.cafedefilles.com) et un sujet qui m’a touché : la grossesse, le choix d’une femme qui veut garder un enfant à la base non voulu.

Dans ce premier roman, Camille Anseaume décide de traiter d’un sujet pas facile, celui d’une grossesse d’une jeune femme, à la suite d’un rapport sexuel avec son p’tit copain, une relation qui va un peu plus au-delà du sexe mais un peu moins que de l’amour. Il est clair dès le départ que cet homme n’est pas l’homme de sa vie, il est également clair que cet enfant pour elle aussi au départ n’est pas souhaité…mais peu à peu, ce tout petit rien (j’aime beaucoup l’expression) fait son nid dans le ventre de la narratrice et dans sa tête aussi. Elle lutte alors avec elle-même en premier lieu (est-ce bien ? qu’est-ce que cela va changer à ma vie ?), avec la pensée de la société (une femme seule, ce n’est pas sérieux, elle gâche sa vie et puis elle ne va pas s’en sortir et un enfant sans papa, elle y a pensé ?), avec ses parents également (et là le poids de ce qu’a vécu sa propre mère est, il faut le dire, assez écrasant).

Dans une écriture simple, ironique, assez crue, l’auteure met en exergue ce que c’est de batailler et d’assumer ses choix dans une société qui juge, donne son avis, fait douter. La narratrice est curieusement assez forte avec ses amis, beaucoup moins avec sa maman (que j’ai trouvé très dure par moment). J’ai aimé ces extraits de lutte, de questionnement de femme et de choix assumés. J’ai aimé aussi que le papa ne soit tout de même pas totalement absent. J’ai attendu avec un peu d’impatience le dénouement, l’accouchement. J’aurais souhaité en revanche que l’auteure pousse plus loin, car on en reste à une considération d’une femme seule qui projette la naissance de son enfant, l’accouchement est assez rose mais après…on sait aussi que c’est plus difficile, qu’assumer un enfant seule est dure. Un roman qui se lit très bien, un joli thème qui mériterait pour moi d’être un peu plus approfondi mais une plume à suivre et un style, avec des paragraphes-billets & des petites phrases qui claquent, résolument différent.

Une lecture commune que j’ai plaisir à partager avec la pétillante Séverine.

Quelques passages :

« Il m’a fait une gastro », se plaît à affirmer la jeune maman. Car la vie est ainsi faite. Lundi, il lui a fait un dessin, mardi, une gastro. Vue de la mère, l’enfant ne s’adresse qu’à elle, jusque dans ses vomissements nocturnes. Il n’a pas souffert d’une gastro, il l’a faite à sa mère, l’ingrat. L’a désignée comme destinataire, l’a érigée bien malgré lui en actrice principale de sa maladie, lui qui ne récolte que le rôle de figurant de sa propre douleur.

Petite, j’ai fait pas mal d’angines à ma mère. Aujourd’hui, il semblerait que je lui ai fait une grossesse »

 « Depuis que je sais que tu es une fille, je ne pense plus à toi autant qu’avant. Ne le prends pas mal, je crois que c’est bon signe. En quelques jours, ta présence s’est diluée. Elle était en un point précis, source ou nœud de questionnements, d’angoisses et de projections. Et voilà qu’elle s’évapore. Devient normale, acquise, aérienne, intégrée. Aujourd’hui tu coules de source. »