Pastor (Denis Ménochet), jeune loup de la vente de produits pharmaceutiques se réveille un matin, totalement hébété, dans un terrain vague. A la suite d’une radiographie, il constate qu’on lui a volé un rein. Obnubilé par ce vol, il va tout sacrifier pour le retrouver : sa famille, son travail… jusqu’à sombrer dans la folie.
Un scénario de Very bad trip signé Benoit delépine que ce dernier confie au tout jeune Arnold de Parscau, réalisateur de deux courts-métrages présentés au festival de Gérardmer et d’un clip de David Lynch. Autant dire qu’avec un tel duo, Ablations va plutôt lorgner du côté de Twin Peaks certes mais aussi du Polanski de Frantic, de Gaspar Noé. On pense même à Sympathy for Mister Vengeance du coréen Park Chan-Wook (Old Boy). Le regard du duo s’éloigne assez vite de l’enquête (qui m’a pris un rein et pourquoi?) pour plonger au coeur d’un vortex absurde, dans un monde où la limite entre le sommeil et la folie est trouble; un univers alternant entre noir intense et rouge pétant dans lequel Pastor s’enfonce chaque heure davantage, laissant tomber sa vie professionnelle et familiale. D’ailleurs, le « héros » ne va pas voir la police; il ne s’agit pas d’une affaire de vol mais plutôt d’un viol, celui de son identité. Comment un dépôt de plainte peut-il vous ramener ce que vous êtes?
Ablations se veut une expérience visuelle, un trip au sein de la folie d’un personnage peuplé d’images fortes (le corps de Ménochet étalé au bord d’une rivière de bon matin ou encore l’hallucination sous la piscine), une plongée au coeur de l’anormal hélas un peu trop timide. Ablations n’est pas du tout un mauvais film – au contraire même – mais il manque ce grain de folie, cette audace, cette fièvre dans la mise en scène de Parscau : dialogues trop explicatifs, images trop symboliques (le reflet du héros qui se perd dans le siphon de l’eau pour décrire sa folie). En fait, le réalisateur s’applique trop, cherche trop à bien faire (qui pourrait lui en vouloir?) et parfois ça se voit… En même temps, personne ne peut reprocher à un réalisateur (jeune donc avec une forte marge de progression) de vouloir bien faire et Ablations est une chose rare en France: un film de genre, honnête et original.
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