Ces chroniques diplomatiques nous plongent au cœur d’un monde peu connu du grand public, le Ministère français des affaires étrangères, dirigé par une main de fer par Alexandre Taillard de Vorms. C’est à travers l’œil d’Arthur Vlaminck, chargé de rédiger les discours du ministre, que nous découvrons cet univers marqué par le stress et les nuits blanches.
Le premier tome nous présente les différents protagonistes, des secrétaires aux conseillers, en passant par les diplomates et le ministre évidemment. Hyperactif, celui-ci attend de ces collaborateurs qu’ils se rendent disponibles à toute heure du jour ou de la nuit, leur faisant perdre la tête en raison de ses opinions changeantes et de son humeur exécrable. Le pauvre Arthur Vlaminck en prend d’ailleurs pour son grade, obligé de recommencer plusieurs fois des discours qui ne seront même pas lus par le ministre qui le tyrannise et lui assène ses théories à grand coups d’éclats de voix.
Personnellement, j’ai préféré le second tome de cette série qui se centre davantage sur la préparation d’une intervention du ministre à New York lors d’une réunion de l’ONU (en référence au discours prononcé par Dominique de Villepin à l’ONU en 2003). On y suit les discussions houleuses entre la France et les autres grandes puissances mondiales sur des sujets sensibles tels que la guerre éventuelle en Lousdem, soupçonné de détenir des armes de destructions massives. Les références à l’actualité de ces dernières années sont bien présentes et donnent à cette bande dessinée un caractère vivant intéressant. On y reconnait d’ailleurs plusieurs présidents et secrétaires d’état bien connus, qui s’affrontent à coups de discours tous plus grandiloquents les uns que les autres.
Quai d’Orsay montre la diplomatie au travail à travers les négociations complexes sur des questions liées à l’OTAN, à l’Europe ou au soutien de la France aux pays africains. J’ai été marquée par le personnage d’Alexandre Taillard de Vorms qui, certes est extrêmement dispersé, mais qui fait montre d’une très grande implication dans l’action politique, défendant sans relâche les intérêts du pays face aux autres puissances. Une bande dessinée qui aborde donc un thème sérieux mais qui fait aussi preuve d’humour notamment lorsqu’il s’agit de montrer les excès de ce ministre hors norme, adepte du Stabillo et d’Héraclite.
Notons que derrière Abel Lanzac se cache en réalité le diplomate Antonin Baudry, qui s’est inspiré de son expérience au sein du ministère français des affaires étrangères (entre 2002 et 2004) pour réaliser cette bande dessinée très réussie. Quai d’Orsay a également été adapté au cinéma par Bertrand Tavernier en 2003 avec Thierry Lhermitte dans le rôle principal.
Quai d’Orsay – Blain & Lanzac – Editions Dargaud – 2010 (tome 1) et 2011 (tome2)