“Je vais vous donner des balises pour bien écouter ces cantates” indique Hélène Décis-Lartigau en introduction de sa conférence sur trois cantates de Bach, en prélude au concert donné ce dimanche par Vox Luminis. Une fois n’est pas coutume, la démarche de la musicologue est donc bien de donner au public des clés pour mieux appréhender des œuvres complexes, à la structure extrêmement travaillée. “Chez Bach, poursuit la conférencière, une cantate, c’est une architecture, une structure élaborée avec un but particulier “.
En l’occurrence, le but est facile à cerner : les deux premières cantates, la 106 (Actus Tragicus) et la 131 (Aus der Tiefe) répondent en effet à des commandes, respectivement pour des funérailles et suite à l’incendie de la ville de Mülhausen, l’origine de la dernière (la 150, Nach dir, Herr, Verlanget mich). Les textes choisis, tirés de divers psaumes et chants chorals (le De Profundis, les psaumes 131 ou encor 25) évoquent donc très largement le thème de la mort. Comme le dit si bien Mme Décis-Lartigau, “le texte général d’une cantate, c’est pas rigolo-rigolo“.
Pourtant, c’est sur un ton léger que se déroule la conférence. “C‘est une très bonne nouvelle pour les luthériens, la mort“. Car c’est bien sous cet angle qu’il faut comprendre la démarche de Bach : la mort n’est que l’inéluctable prélude à la vie éternelle ; il ne faut pas la craindre, mais la préparer, comme nous y appelle les 7ème et 8ème vers de de la 106, “Mets ta maison en ordre – Car tu dois mourir et non rester en vie“. La mort n’est pas vue sous une perspective tragique, c’est à dire comme une finalité sans la moindre issue. “Pour un luthérien, oui, il y a du tragique dans la vie, mais ça ne s’arrête pas là” ; car au-delà de la mort, le croyant doit surtout voir la perspective du salut.
Comme à son habitude, Hélène Décis-Lartigau, dans un souci pédagogique, s’est appliqué durant toute la conférence à faire participer son public ; ces qualités didactiques, ajoutées à son humour, lui ont permis de transformer ainsi un exercice qui pourrait sembler rébarbatif en moment vivant et passionnant.
Mahel Nguimbi