Voici la suite et la fin de mon article sur le néo-expressionnisme.
Le Néo-expressionnisme en France
Les artistes de la Figuration Libre (Robert Combas, Rémi Blanchard, François Boisrond et Hervé di Rosa), pour la plupart citadins, ont fondé leur art sur la culture populaire urbaine. Les sujets d’inspiration sont la publicité, les médias, la musique rock et la BD. L’iconographie est volontairement naïve, primitive et populaire, avec des couleurs criardes.
L’artiste Ben, qui exposera les jeunes artistes à l’aube des années 80, explique que la figuration libre, c’est être « Libre de faire laid / Libre de faire sale / Libre de préférer les graffitis de métro de New York aux tableaux du Guggenheim (…)« . Et Combas d’ajouter : « La figuration libre, c’est faire ce qu’on veut le plus possible, le plus personnellement, le plus librement. » Bref, à l’aube des années 80, puisant dans l’énergie du punk rock, les quatre compères réussissent à créer une forme d’expression picturale nouvelle, populaire et spontanée.
Rémi Blanchard
[ Présentation de l'artiste et d'autres images, voir ici. ]
François Boisrond
Robert Combas
Hervé Di Rosa
Le Néo-expressionnisme en Pologne
Gruppa, fondée en 1982 par des diplômés de l’Académie des Beaux-Arts de Varsovie, est le principal représentant du néo-expressionnisme polonais. Ce groupe a été formé par Ryszard Grzyb, Pawel Kowalewski, Jarosław Modzelewski, Wlodzimierz Pawlak, Marek Sobczyk et Ryszard Woźniak. Il nait d’une exposition conjointe d’œuvres de ces artistes qui devait se tenir le 13 Décembre 1982, à l’occasion du premier anniversaire de la loi martiale décrétée un an plus tôt par le général Jaruzelski (avec couvre-feu, censure et de nombreuses restrictions, frontières et aéroports fermés et plus de 10 000 cadres et militants syndicaux internés, dont Lech Wałęsa, le président du syndicat ouvrier Solidarność, créé en août 1980). L’exposition a finalement lieu le 14 Janvier 1983, sous le nom de forêt, montagne, nuage. Ces artistes, liés par un style commun inspiré par la tendance néo-expressionniste, évoquent dans leurs œuvres les conditions de la société dans la période de la loi martiale. En plus des expositions de peinture, Gruppa organisait aussi des lectures, des récitations de poèmes et des concerts. Ils ont également publié leur propre journal, dont 9 numéros ont été diffusés.
Gruppa est symboliquement dissous en juin 1989 lorsque Solidarność remporte les premières élections législatives libres polonaises.
En dehors du Gruppa, d’autres artistes de cette génération peuvent être classés comme néo-expressionnistes : Zdzisław Nitka, Zygmunt Magner, Krzysztof Skarbek ou Jacek Sroka.
Le Néo-expressionnisme en Amérique
La Bad Painting et la New Image Painting sont les deux écoles américaines qui sont traditionnellement classés dans la rubrique néo-expressionnisme.
La Bad Painting s’est construite en opposition au soit-disant « bon goût » et à l’intellectualisme parasite de l’art conceptuel. Ses œuvres reflètent la nature inquiétante et violente de la société américaine contemporaine. Empruntant aux arts dans la rue (graffitis, pochoirs) ou même à la peinture rupestre, c’est une peinture païenne et « animale ». La touche est généralement rapide, en apparence primitive et inachevée, et marquée par de forts empâtements. Le mouvement Bad Painting américain va jusqu’au bout d’une expressivité figurative, défiant toute théorie puriste et minimaliste, jusqu’au bout d’une peinture totalement libre de tout esthétisme, de tout concept, rappelant les préceptes de l’Art Brut, si libre qu’elle affirme ouvertement ses aspects bâclés, médiocres, de mauvais goût. Chaque artiste de Bad painting s’exprime comme bon lui semble, et utilise à sa convenance différents matériaux. Neil Jenney (« Bad painting » est comme titre de son exposition de 1978), Jean-Michel Basquiat, Keith Haring, Julian Schnabel, Kenny Scharf sont les principaux représentants de ce mouvement.
La New Image Painting, est un style de néo-expressionnisme né d’une exposition du même nom qui s’est tenue au Whitney Museum of American Art en 1978. Elle est marquée par l’utilisation de la figuration – bien que souvent semi-abstrait – et marque un retour à la peinture après une période où l’art contemporain était surtout axé sur la performance, l’installation et l’art conceptuel. Robert Moskowitz ou Susan Rothenberg appartiennent à cette mouvance.
Sans être spécifiquement classés dans une de ces écoles, David Salle, Chuck Connelly et Eric Fischl sont également considérés comme faisant partie de la mouvance néo-expressionniste américaine.