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Un nouveau Viking/Laval?

Publié le 13 juillet 2014 par Duncan

8/07/2014, Fonnship, C-83/13.

Dans cette affaire, la Cour était confrontée à une question préjudicielle issue d'un tribunal suédois. La compagnie Fonnship, une société norvégienne, utilise un navire battant pavillon du Panama pour exploiter une ligne commerciale entre différents États de l'EEE. Son équipage est lié par une convention collective russe. En 2001, lors d'un escale en Suède, les syndicats locaux avaient exigé que Fonnship signe une convention collective correspondant aux standards de l’International Transport Workers’ Federation. après plusieurs actions menées par les syndicats suédois, l'accord fut conclu mais Fonnship assigna les syndicats devant les tribunaux suédois. En 2003, lors d'une autre escale en Suède, les syndicats constatèrent l'expiration de la convention collective et exigèrent que Fonnship en signe une nouvelle. Malgré les protestations des membres de l'équipage, une nouvelle convention fut signée.

Fonsship réclame des dommages et intérêts aux syndicats suédois pour les pertes économiques liées à la signature des deux conventions. Dans le même temps, un syndicat suédois a saisi le même tribunal parce que Fonnship n'aurait pas respecté la convention signée en 2001.

La question posée à la Cour est la suivante: la situation de cet armateur entre-t-elle dans le le champ d'application de la libre prestation de services telle que prévue par le règlement spécifiquement applicable en la matière (Règlement 4055/86)?

La Cour répond par la positive. La Cour relève qu’il découle du libellé et de la structure de l’article 1er du règlement n° 4055/86 que, en définissant le champ d’application personnel de la libre prestation des services dans le secteur des transports maritimes à partir ou vers des États parties à l’accord EEE, cet article identifie deux catégories de personnes qui bénéficient, si certaines conditions sont remplies, de cette libre prestation des services, à savoir, d’une part, les ressortissants d’un État partie à l’accord EEE établis dans l’EEE et, d’autre part, les ressortissants d’un État partie à l’accord EEE établis dans un pays tiers ainsi que les compagnies maritimes établies dans un pays tiers et contrôlées par des ressortissants d’un État partie à l’accord EEE.

En incluant dans ledit champ d’application personnel des ressortissants d’un État membre établis dans un pays tiers ou y contrôlant une compagnie maritime, le législateur de l’Union a voulu s’assurer qu’une importante partie de la flotte commerciale détenue par des ressortissants d’un État membre relève de la libéralisation du secteur des transports maritimes instaurée par ce règlement, de telle manière que les armateurs des États membres puissent mieux faire face, notamment, aux restrictions imposées par des pays tiers.

il importe, dans les cas où un ressortissant d’un État partie à l’accord EEE établi dans l’EEE ou une société établie dans l’EEE se prévalent de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement n° 4055/86 dans le cadre d’un litige portant sur la question de savoir si des services de transport maritime effectués au moyen d’un navire battant pavillon d’un pays tiers relèvent de la libre prestation des services, de vérifier si ce ressortissant ou cette société peuvent être considérés comme étant les prestataires de ces services.Il faut pour ce faire vérifier si Fonsship exploite bien elle-même le navire.

La Cour conclut: "Fonnship a soutenu qu’elle exploitait elle-même le Sava Star pendant la période pertinente. Il relève de la compétence exclusive de la juridiction de renvoi d’apprécier la véracité de cette affirmation".

Ce n'était pas sur cette question que la Cour était attendue le plus mais bien évidemment sur celle de la conformité des actions syndicales avec la libre prestation de service.

L'Avocat général avait enjoint la Cour à ne pas répondre à cette question: "si je ne suis pas totalement insensible à l’invitation implicite de Fonnship d’inclure, même à titre subsidiaire, dans l’examen de la problématique qui nous est soumise des considérations sur la nécessité et la proportionnalité des actions syndicales au regard des dispositions de l’EEE pertinentes, en particulier dans un souci d’économie de procédure et au vu de la circonstance que la juridiction de renvoi doit statuer en dernier ressort, une telle inclinaison nécessiterait, dans le cas de figure de la présente affaire, que la Cour opte de modifier sensiblement sa jurisprudence actuelle portant sur l’interprétation de l’article 267 TFUE".

La Cour considère cependant que, si Fonnship est bien un prestataire de services, "toute restriction ayant été, sans justification objective, de nature à prohiber, à gêner ou à rendre moins attrayante la prestation desdits services devrait être déclarée incompatible avec le droit de l’Union. En effet, lorsqu’il est applicable, le règlement n° 4055/86 transpose, en substance, les règles du traité relatives à la libre prestation des services et la jurisprudence y relative". La Cour y ajoute une référence explicite à l'arrêt Laval.

Il sera donc intéressant de suivre les suites de ce litige devant les juridictions suédoises...


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