Un film de Paul Thomas Anderson (2013 - USA) avec Joaquin Phoenix, Philip Seymour Hoffman, Amy Adams
Snif... déçue.
L'histoire : Années 50. Freddie est rentré de la guerre, passablement traumatisé. Il fait tout pour se réintégrer dans la vie normale, mais des pulsions proches de la folie l'empêchent de garder ses emplois, ses petites amies... Il fait des petits boulots et boit comme un trou. Il se retrouve ainsi par hasard, après une nuit d'errance, à bord d'un petit paquebot où il est monté parce que des gens y faisaient la fête. Le commandant l'accueille le lendemain avec bienveillance : doux, charitable, rassurant, il l'incite à rester dans son petit groupe, qui a trouvé l'harmonie et le bonheur, sous sa conduite de père spirituel en totale vibration avec l'univers. Freddie, trouvant là gîte et couvert, se plaît bien dans cette gentille communauté ; il rend de menus services, participe aux manifestations et peu à peu se laisse gagner par la philosophie du Maître qui commence à l'initier à la discipline qu'il a créée.
Mon avis : J'attendais avec impatience de voir ce film, pour trois raisons : je suis hyper fan de P.T. Anderson (j'ai vu tous ses films, sauf le tout premier ; j'ai tout adoré) ; le sujet m'enchantait : histoire de gourou, de manipulateurs et de manipulés, entre spiritualité et charlatanisme ; mon adoré et infiniment regretté Philip Seymour figurait au casting, ainsi que Joaquin Phoenix, également un de mes acteurs préférés. Or, à part Philip, ROYAL, tout le reste m'a laissée un peu sur ma faim... et ce, malgré une mise en scène en tous points parfaite sur le plan purement technique.
D'abord, c'est infiniment lent, bavard. et redondant. Dans ses autres films, Anderson multiplie les personnages, les histoires qui s'entremêlent, c'est fouillé, c'est intense, c'est passionnant. Ici seuls deux personnages émergent : le gourou et son gouroutisé. Le reste de la troupe fait office d'arrière-plan, comme une foule de disciples sans âme. Et ça papote, ça papote, ça papote... sur le monde, sur la philosophie, sur la vie. Et le gros problème, c'est que ces conversations ne sont finalement guère intéressantes. J'avais cru lire quelque part que le réalisateur voulait illustrer la création et l'édification de l'Eglise de Scientologie, et de son leader historique, Ron Hubbard. En fait, à part quelques similitudes, le scénario reste étonnamment léger, sans véritable réflexion, bien trop timoré... Comme si Anderson n'avait pas osé attaqué ladite église de front... (il a reçu des menaces, dit-on) et il a d'ailleurs nié par la suite avoir voulu parler de cette secte-là en particulier.
Heureusement que Philip Seymour donne corps et vie à ce Master, je ne peux imaginer un autre que lui dans le rôle... le film aurait été complètement raté pour le coup.
Car Joaquin Phoenix (très amaigri), par son jeu ultra caricatural, est hélas - selon moi - un autre gros point noir. Son personnage, alcoolique, borderline, traumatisé, constitue une proie bien trop facile... et donc sans aucun intérêt. Il aurait été infiniment plus intéressant de nous montrer l'emprise de la secte et de son chef sur une forte tête ! Du coup, les démonstrations du gourou n'ont pas de prise sur nous puisqu'elles s'adressent à une sorte de clochard complètement asocial ; normal qu'elles le fascinent. Ce que Phoenix accentue un max ; il en fait des tonnes. Démarche étrange, visage déformé par une folie sous-jacente genre je-l'aurai-l'oscar-je-l'aurai... il perd toute crédibilité et il agace. Quel dommage !
Franchement, ce film n'est pas du tout à la hauteur de ce qu'Anderson nous a donné l'habitude de voir !
La critique professionnelle crie pourtant quasi unanimement au génie. Je n'ai trouvés que deux avis qui résument ce que j'ai ressenti : "Chaque scène du film intrigue ou intéresse, mais leur juxtaposition peine à faire sens" (Télérama) et "La complicité mystérieuse d'un gourou et d'un de ses disciples donne un film perclus d'ennui et de frustration." (TéléCinéObs). Le public, lui, tout comme moi, reste dans l'ensemble assez perplexe...