L’auteure l’a déjà fait deux fois, ce que j’ai su après ma lecture. Je n’ai pas eu l’ombre d’une surprise, les descriptions étant parsemées de détails pratico-pratique qui ne mentent pas. Je ne pense pas qu’une personne qui ne l’a jamais fait s’attarderait à ce point à l’équipement adéquat (surtout les chaussures !), l’itinéraire, le poids à transporter, le ravitaillement, les réservations du logis et, le bouquet, les punaises de lit, ce fléau entre tous les fléaux.
Même si le roman est largement tissé de ce bagage pragmatique, on y trouve, comme on devait s’y attendre, une quête d’identité. Comment pouvait-il en être autrement, si on considère que Mylène Gilbert-Dumas est une fouilleuse effrénée de la motivation féminine. Est-ce que cette femme pose cet enchevêtrement de gestes pour son entourage ou pour elle ? En a-t-elle vraiment le goût, ou c’est la pression sociale qui fait son œuvre ? Ce sont les questions qui reviennent dans son œuvre et, ici, l’auteure s’est trouvé le terrain idéal pour les cultiver.
Ce n’est pas Mireille, la narratrice et personnage principal qui a décidé de faire le chemin, elle n’en a pas pris l’initiative, c’est sa sœur qui l’entraine. D’ailleurs, on ne l’imagine pas du tout la prendre, cette initiative, elle est sa vie de famille et son travail d’épicière avec son mari. Elle n’est pas à proprement parler une femme perdue, loin de là, mais elle est une femme qui s’identifie par son travail et sa vie de famille. Alors, imaginez-vous que placée devant l’abandon de sa sœur (qui a trouvé l'amour) dès les premiers milles, le harcèlement de son questionnement commence : veut-elle vraiment arriver au bout de son objectif ? Ne veut-elle pas plutôt retourner à la maison et retrouver routine et confort ? Bref, veut-elle se donner toute cette misère pour « rien » ? En plus, elle n’a jamais eu le temps dans sa vie de tous les jours de désirer un homme, et si la promiscuité la portait à tromper son mari ?
La question demeure suite à n’importe quelle lecture : avec quel entrain et à quelle vitesse allongeons-nous le pas au cours de cette lecture ? Personnellement, un peu comme Mireille j’ai eu parfois des ralentissements considérables, lasse de m'arrêter à cause des ampoules aux pieds, sujet récurrent entre tous. Évidemment que tout dépend des attentes, un lecteur qui désire un jour faire le chemin apprendra de long en large tout ce qu’il ne faut éviter, et s’il prend des notes devrait contourner plusieurs écueils. Et j’imagine facilement qu’une personne l'ayant déjà fait devrait prendre plaisir à le refaire en compagnie de l’auteure, comparant ses impressions avec elle.
Quoiqu’il en soit, il y a de la matière à réflexion sous l’angle physique, mais sous l’angle spirituel, n’ayez pas d’attente. L’angle spirituel est à ne pas confondre avec l’identité sociale car, celle-ci est abordée, comme mentionné ci-dessus. J’imaginais que ce parcours dégageait quelque chose de mystérieux et de magique et nous entrainait malgré soi au-delà des frontières physiques et sociales. Cette lecture ne m’a pas laissé cette impression. D’ailleurs, je me suis juré de ne jamais faire le chemin de Compostelle !
Alors voilà, même si c’est presque toujours le cas, j’avance plus que jamais que, devant ce titre, tout dépend de vos attentes.